Une
analyse AlterNego.
Alors que la France
connaît une intensification des tensions sociales — inflation persistante,
multiplication des conflits collectifs, renégociations salariales complexes,
montée des attentes autour du télétravail et arrivée massive de l’IA dans les
métiers — le dialogue social redevient un enjeu central pour les organisations.
Dans ce contexte de
transformation accélérée du travail et de recherche de nouveaux équilibres,
AlterNego dévoile une étude nationale menée auprès de 4 500 salariés et acteurs
du dialogue social. Elle révèle un paradoxe majeur : si le dialogue social est
perçu comme un levier indispensable pour accompagner les transitions, il reste
encore sous-exploité, trop institutionnel et souvent déconnecté des réalités du
terrain, précisément au moment où les entreprises en auraient le plus besoin.
Chiffres clés
• 81% des répondants voient le dialogue social comme
un moyen de défendre les droits des collaborateurs.
• 78% l’associent à une méthode permettant la
convergence d’intérêts divergents.
• 74% le considèrent avant tout comme une obligation
légale.
• 71% y voient un levier pour accompagner les
transformations.
• 57% le décrivent comme un canal privilégié de
transmission de l’information.
• 48% définissent le dialogue social comme les
négociations entre les représentants du personnel et les représentants de
l’employeur.
• 23% le perçoivent comme une source de conflits et
de tensions.
• 47% déclarent souhaiter être représentés par un
syndicat.
« Les chiffres montrent
un attachement profond au dialogue social, mais aussi une frustration
croissante face à son manque d’impact réel. Les salariés y croient, mais n’en
voient pas toujours les effets : ce paradoxe doit désormais agir comme un
signal d’alerte pour les organisations. » analyse Jean-François Poupard,
Directeur de l’expertise Dialogue Social et QVCT - AlterNego
Une dynamique
ambivalente : un dialogue social reconnu, mais encore fragile
L’étude met en évidence
un écart croissant entre l’importance accordée au dialogue social et la manière
dont il est vécu au quotidien. Les salariés reconnaissent son utilité, mais le
jugent encore trop institutionnel et insuffisamment lisible. Ils expriment un
attachement fort à la représentation collective, tout en pointant un manque de
formation et de compréhension des mécanismes qui structurent le dialogue
social. L’étude relève également une faible identification des managers et des
directions RH comme acteurs du dialogue social, alors qu’ils occupent une
position clé dans la régulation sociale. Plusieurs signaux faibles interrogent
enfin : résignation des salariés les plus anciens, déception chez ceux
ayant
16 à 25 ans d’ancienneté, et distance accrue des managers vis-à-vis de la
représentation syndicale. Autant d’éléments qui révèlent un dialogue social
encore trop éloigné du terrain.
Un besoin massif d’information, de formation… et de participation
Les salariés veulent
comprendre davantage, être mieux informés et être plus étroitement associés aux
transformations qui les concernent. S’ils se déclarent globalement bien
informés du dialogue social, ils pointent en revanche un manque significatif de
formation, notamment pour comprendre le fonctionnement des instances, le rôle
des acteurs ou encore leurs propres droits.
Cette méconnaissance
alimente un sentiment de distance vis-à-vis du dialogue social, perçu comme
technique et réservé aux spécialistes.
Par ailleurs, ils
expriment une forte attente de pédagogie face aux évolutions
organisationnelles, aux mutations de leur secteur, aux réformes sociales ou aux
impacts de l’intelligence artificielle sur leurs métiers. Ils souhaitent
disposer d’une information claire, régulière et compréhensible, afin
d’anticiper ces transformations plutôt que de les subir. Ce besoin
d’information et d’accompagnement souligne un décalage structurel : les
salariés souhaitent être acteurs du dialogue social, mais les dispositifs
actuels ne leur permettent pas encore de l’être pleinement.
Les priorités du
dialogue social pour demain
L’étude met en évidence
un large consensus entre salariés, managers et représentants sur les thèmes qui
doivent structurer le dialogue social dans les années à venir. Les conditions
de travail arrivent largement en tête, suivies par l’équilibre des temps de
vie, devenu central dans un contexte de transformation des organisations et de
recomposition des frontières entre sphères personnelle et professionnelle.
Les préoccupations
autour du pouvoir d’achat, de l’inflation et du partage de la valeur restent
également très fortes, tout comme celles liées à la santé au travail, désormais
envisagée sous l’angle plus large de la soutenabilité et de l’impact des changements
organisationnels. À ces priorités établies s’ajoutent des sujets en forte
progression : inclusion et équité, engagement environnemental, et impact de
l’intelligence artificielle sur les métiers et les compétences. Autant de
thématiques qui confirment que le dialogue social devient un levier stratégique
pour anticiper les transformations et sécuriser l’avenir du travail.
Vers un modèle de
dialogue social co-responsable
Les résultats appellent à une modernisation profonde du dialogue social pour en faire un outil stratégique de cohésion et d’anticipation. L’étude souligne la nécessité de mieux outiller les managers, acteurs de proximité essentiels mais encore insuffisamment formés à la régulation des tensions et à la concertation. Elle insiste aussi sur le rôle des directions RH, qui doivent renforcer la lisibilité, la méthode et la qualité des espaces d’échange. La confiance constitue un enjeu central : un dialogue perçu comme trop formel ou éloigné du terrain génère une forte attente de transparence et de pédagogie. Redonner du sens aux instances traditionnelles (CSE, commissions, négociations) est un levier clé.


