Retour
sur la 3ème édition de l’Operating Partners Day du 5 juin 2025
Après avoir contribué à mieux faire connaître le métier d’operating partner, puis à développer son écosystème, la 3ème édition de l’Operating Partners Day a fait émerger plusieurs bonnes pratiques ainsi que des domaines où son intervention génère de la valeur opérationnelle mesurable.
Tous les participants à
l’Operating Partners Day – près de 200 chefs d’entreprise, représentants du
capital investissement et operating partners réunis à Paris le 5 juin 2025 -
s’accordent : faire appel à un operating partner désormais est vu comme un incontournable
du dirigeant en quête de levier efficace et efficient pour sécuriser le
développement de son entreprise et avoir un impact en termes de création de
valeur opérationnelle. Le chef d’entreprise providentiel n’existe pas, l’heure
est venue de s’affranchir le mythe du « super dirigeant qui a tout vu et sait
tout faire ». Savoir s’entourer est une des qualités et des forces reconnues
aux dirigeants qui performent.
10 ans après
l’émergence du métier, la question n’est en effet plus de savoir s’il est utile
de s’appuyer sur un operating partner mais comment trouver celui avec qui
travailler. Se pose clairement la question des clés pour reconnaître le bon
partenaire opérationnel dont l’intervention va créer de la valeur.
Au cœur d’une
collaboration réussie : une relation de confiance
En premier lieu, un
operating partner performant sait instaurer une relation de confiance avec le
dirigeant de l’entreprise. C’est une conclusion partagée par les différents
chefs d’entreprise qui sont intervenus – à savoir Adrien CHALTIEL, co-fondateur
du Board Project et d’Eldorado, Antoine CREUZET, co-fondateur de May, Samia
DAHMOUNI, CEO de Cyclezen, Patrick LAYANI, Président de Passmann, Aurélien de
MEAUX, co-fondateur d’Electra, Jocelyne MWILU, Président de PPI France, Nicolas
ROCHE, PDG du Groupe Hozon ou encore Cédric MESTON, CEO de Tupperware France et
Ludovic VALLON, CEO de Mastergrid.
Deux conditions à
respecter
Pour que cette
confiance s’établisse, outre sa connaissance et son expérience des sujets qu’un
chef d’entreprise gère au quotidien, il doit respecter deux conditions :
- D’abord l’operating partner ne doit pas se
tromper de rôle :
il est là pour épauler le dirigeant et non le remplacer. Tous les dirigeants
qui se sont exprimés ont souligné à un moment ou à un autre l’importance de
l’adoption de la bonne posture – car personne ne les remplace, ni ne prend les
rênes de leur entreprise. L’operating partner n’est pas membre du board, son
rôle n’est pas de jouer sur les indicateurs purement financiers ; il est là
pour soutenir l’entreprise et l’entrepreneur. C’est pourquoi il est important
qu’il garde une lecture distanciée, opérationnelle et non financière des
performances de l’entreprise. Copilotage, compagnonnage, sparring partner...
Peu importe le vocabulaire, tant que chacun joue le rôle qui lui revient et ne
prend pas la place de l’autre.
- Ensuite, l’operating partner est attendu sur
sa capacité à s’engager sur et à obtenir des résultats chiffrés et mesurables. C’est une demande
croissante des dirigeants de PME et ETI, notamment ceux à la tête d’entreprises
familiales. Dans le contexte économique actuel encore plus qu’avant, aucun
patron de PME ou d’ETI n’investirait 1€ sans avoir la conviction qu’il en
tirera un ROI. Dans cet esprit, les dirigeants présents à l’événement ont
expliqué qu’ils ont mis au défi leur operating partner en lui fixant des
objectifs clairs et précis. Le fait de s’adresser à un pair facilite les
discussions et évite les jugements à l’emporte-pièce : ils parlent le même
langage, partagent la même expérience face aux prises de décision et ont la
même culture du développement d’entreprise.
La preuve par les
résultats terrain
Ces mêmes dirigeants
ont par ailleurs expliqué avoir très vite constaté, sur le terrain, la valeur
ajoutée opérationnelle créée grâce à l’appui de leurs partenaires respectifs.
L’enjeu qui était de leur faire gagner du temps et de leur éviter de commettre
les écueils les plus fréquents a bien été à chaque fois au rendez-vous, visible
dans les indicateurs de performance de l’entreprise (chiffre d’affaires,
EBITDA, etc.). Et l’un des dirigeant
présent de rappeler : « Je savais que mon operating partner était une
personne qui comprenait ce que je vivais. En une semaine, on a commencé à voir
du concret. Sur la partie chiffre, j’ai vu les résultats en à peine quelques
mois. »
Une collaboration au
service de la performance opérationnelle
L’événement a par
ailleurs mis en lumière la façon dont les operating partners interviennent.
Ceux qui ont pris la parole - dont Isabelle SALADIN et Cédric GAILLARD
d’I&S Adviser, Eric DODIN d’Hekze, Fiona FAUVEL, CEO de DealCockpit et
vice-présidente de la French tech Bordeaux ou encore Philippe KALMIN de LBO
France -, ont expliqué commencer leurs interventions par une phase
d’observation et de diagnostic opérationnel. Puis, ils travaillent main dans la
main avec le dirigeant pour élaborer un plan d’action précis et détaillé avec
un calendrier et des jalons à respecter, et peuvent ensuite l’accompagner dans
sa mise en œuvre.
Trois cas de figure ont
été passés au crible, démontrant l’impact mesurable qu’à l’intervention de
l’operating partner sur la création de valeur économique et financière : le
déploiement d’une stratégie de build-up, le redressement d’une entreprise en
difficulté ; et l’engagement ESG.
- Dans le cadre des build-up, l’operating partner
intervient pour sécuriser la création de valeur en conduisant par exemple des
due diligences opérationnelles qui vont minorer les risques - i.e. en regardant
sous le capot des deux entreprises, il définit le degré de fusion à viser et
trouve des leviers pour bâtir le plan d’intégration. Il peut également
identifier des moyens d’agir auprès des deux équipes (de l’acheteur et du
vendeur) pour préserver le capital humain et éviter le syndrome Koh-Lanta de
deux camps non-réunifiables qui équivaudrait à juste « racheter des tables, des
chaises et des ordinateurs ». Il intervient aussi pour favoriser le dialogue
entre les parties - trop souvent ceux qui ont fait l’acquisition et ceux qui
gèrent l’intégration ne se parlent pas.
Après le deal, il vient
travailler avec le dirigeant sur le déploiement du plan prévu en plus de tous
les autres sujets qu’il a à traiter dans une journée. Car si sur le papier tout
est bon, très souvent, après la signature, les choses se compliquent.
L’important est de ne
pas se tromper de stratégie, d’instiller du rationnel et du pragmatisme dans la
gestion des attentes et des inquiétudes, et d’anticiper les défis à relever
pour écrire une histoire nouvelle. L’apport d’un operating partner est d’autant
plus déterminant que 70% des fusions-acquisitions se soldent encore par un
échec à moyen terme.
- Dans le cas
d’entreprises traversant des difficultés ou situation de redressement judiciaire,
l’operating partner aide le dirigeant à ouvrir les yeux sur des sujets
sensibles et à oser mobiliser les outils comme le mandat ad hoc et la
conciliation. Il fait en sorte qu’il regarde les difficultés en face, les
affronte avant qu’il ne soit trop tard, et prenne des décisions pour avancer.
Il ne refait pas ce que l’équipe en place fait déjà. Ce n’est jamais lui non
plus qui parle aux salariés, il chuchote à l’oreille du dirigeant qui se
chargera de présenter le projet à ses équipes et aussi aux autorités publiques
locales.
Un repreneur d’entreprise à la barre du tribunal gagne lui aussi toujours à être épaulé par un operating partner. « Utiliser un operating partner qui a déjà l’expérience orientera vers les bons réflexes à avoir. C’est clé d’être accompagné par quelqu’un qui l’a déjà vécu car, sur le fond, c’est similaire d’une entreprise à l’autre », a expliqué Cédric Meston qui vient de reprendre Tupperware France.
Il est en effet
fondamental d’être bien accompagné pour opérer le virage à 45 ou 90 degrés
nécessaire à la relance de l’activité. L’operating partner va par exemple
réaliser un diagnostic opérationnel servant à bâtir un plan de reprise
réaliste. Un point de vigilance souligné par Arnaud Pedron, avocat, associé au
cabinet Franklin : à tout moment, l’operating partner veillera à ne pas
participer à la direction de fait.
- Troisième sujet : l’operating partner
peut travailler avec un dirigeant sur la façon de faire de l’ESG un levier de
croissance et un catalyseur de performance. Il va par exemple l’aider à définir
les indicateurs à suivre. Avoir un business ESG est tout à fait compatible avec
la performance économique et financière.
Un rôle de l’operating
partner appelé à se renforcer du fait du contexte économique
Comme l’a rappelé
Thomas Allen, directeur de l’Observatoire des entreprises de la Banque de
France, l’Europe pourrait prochainement vivre un décrochage en termes de
productivité, d’innovation et de productivité. Les décisions de
l’administration Trump ajoutent de l’incertitude et de la volatilité quand le
niveau des défaillances d’entreprises n’a pas encore atteint en France son
point de retournement.
De son côté, Sylvain
Broyer, chef économiste Global Ratings de Standard & Poors, a expliqué que
la note de la France a été maintenue car le pays a pour le moment absorbé les
chocs économiques et que le temps des marchés n’est pas celui de l’analyse économique.
En Europe, il n’y a pas de récession à ce jour, la BCE a pu baisser ses taux
directeurs, et le niveau de plein emploi sans croissance économique reste
historique (169 millions d’emplois). C’est visiblement un nouvel équilibre qui
est en train de s’établir, incertain toutefois selon la coopération économique
qui se nouera avec les États-Unis.
Quoi qu’il en soit,
plus que jamais, les dirigeants auront pour défi d’activer tous les leviers de
création de valeur. Le recours aux operating partners est l’un d’eux et il a
d’ores et déjà apporté les preuves de son impact et de la valeur extra-financière
créée.
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L’operating partner vu
du côté des sociétés de gestion
En Europe,
contrairement aux Etats-Unis, le métier d’operating partner s’exerce de deux
manières : soit directement auprès du dirigeant, soit par l’intermédiaire d’une
société de gestion présente au capital de l’entreprise. L’intervention directe
est la plus répandue à ce jour et prédominera en Europe du fait de la structure
du capital des entreprises ; néanmoins, de plus de plus de sociétés de gestion
proposent un accompagnement par des operating partners.
Entre 2019 et 2024, le
nombre d’operating partners dans les sociétés de gestion a cru de 80%. Leur
présence est devenue quasi systématique, avec des interventions sur des sujets
tels que le pilotage de la R&D, la commercialisation des offres, les projets
d’internationalisation, les enjeux de transformation digitale et de
cybersécurité, etc.
L’operating partner
vient sécuriser les performances des participations. Il joue le rôle
d’intermédiaire entre l’investisseur (qui a un regard financier sur ses
actifs), et l’entrepreneur (qui a la tête dans le guidon). Il s’appuie sur ses
retours d’expérience dans des fonctions de direction, sa capacité à garder son
indépendance d’esprit, il écoute et suggère. On attend de lui qu’il soit
capable de représenter les deux parties et qu’il agisse comme un catalyseur
pour déclencher des réactions en série et accélérées. Cela explique le profil
des operating partners recrutés par les sociétés de gestion : la majorité sont
d’ex-dirigeants d’entreprise. Leur culture entrepreneuriale aide à faire tomber
les frontières culturelles entre l’équipe d’investissement et les CEO.
Pour un acteur du
capital investissement, disposer d’une équipe d’operating partners est un
facteur de différenciation. Elle le rend plus attractif et lui donne de la
valeur à double titre :
• Vis-à-vis des fonds
de fonds
qui sont rassurés de voir que des moyens sont déployés pour sécuriser les
performances des participations et le retour sur investissement. Les operating
partners constituent un atout auprès des LPs. Les levées pour lancer de
nouveaux fonds sont moins complexes à finaliser.
• Vis-à-vis des
startups,
les dirigeants de jeunes pousses étant intéressés par la possibilité d’un
accompagnement opérationnel inclus dans le package proposé lors de l’ouverture
de leur capital.
L’operating partner est
souvent mobilisé d’abord pour participer aux due diligences ; puis son
périmètre s’étend à d’autres sujets. Il va par exemple aider à déterminer les
points d’impact du plan de croissance établi.
Ce qui compte in fine, c’est la valeur générée. C’est pourquoi, l’équipe d’operating partners d’un fonds reçoit en général une partie du carried interest généré. De plus en plus de sociétés de gestion incluent l’appui d’un operating partner auprès de l’équipe dirigeante dans le package, leur mobilisation étant alignée avec les objectifs de développement et de performance fixés par l’équipe d’investissement.