Les entreprises françaises ont encore du chemin à parcourir pour préparer l’entrée en vigueur de la directive européenne en 2026
La directive sur la
transparence des rémunérations, adoptée en mars 2023, impose aux employeurs de
fournir aux salariés, sur demande, des informations sur les niveaux de
rémunération moyens pour des postes équivalents. Elle rendra également
obligatoire les informations sur les fourchettes de salaire lors du recrutement
et interdira toute question relative aux antécédents de salaire. Les
entreprises françaises doivent donc se préparer pour être en conformité d’ici
au 7 juin 2026, date limite de transposition dans le droit national français.
Dans ce contexte, WTW en France publie son enquête annuelle 2025 sur la transparence des rémunérations. Elle révèle que, si les organisations françaises progressent dans leurs démarches, elles restent en retrait par rapport à l’international et leurs pratiques de communication salariale demeurent limitées à ce stade.
• 78% des entreprises françaises considèrent
les exigences réglementaires croissantes comme le facteur déterminant dans la
communication de leurs politiques de rémunération
• 62% des entreprises en France estiment que le
partage des fourchettes salariales entraînera une hausse des questions des
salariés
• 44% des entreprises ont déjà publié leurs
engagements en matière d’équité salariale
• 2% des entreprises utilisent l’IA
dans le pilotage de leur politique de rémunérations (alors que près d’une
entreprise sur cinq recourt déjà à des technologies conventionnelles)
Les exigences
réglementaires restent le premier moteur du changement
En France, près de 4
organisations sur 5 (78%) considèrent les exigences réglementaires croissantes
comme le facteur déterminant dans la communication de leurs politiques de
rémunération. Les autres facteurs énoncés sont les critères ESG et la diversité
et inclusion (46%) ainsi que les attentes des salariés (45%).
Au niveau mondial, si
les obligations réglementaires sont également citées comme premier moteur,
d’autres facteurs – comme la culture d’entreprise ou la confiance du leadership
– ont fortement reculé en importance, confirmant que la pression réglementaire
domine désormais le débat.
Les entreprises encore
prudentes dans leur communication
D’une manière générale,
les organisations en France semblent moins susceptibles de communiquer des
informations sur les salaires que la moyenne internationale. Les informations
les plus communiquées portent sur l’ensemble des éléments de rémunération variable
(39%), la classification des emplois (35%) et la manière dont le salaire de
base individuel est déterminé et évolue (25%). Dans l’ensemble ces chiffres
sont moins importants qu’à l’échelle internationale.
En revanche, si deux
tiers des entreprises françaises (65%) envisagent de communiquer la
rémunération moyenne par catégorie de poste, seules 4% le font déjà.
Les entreprises
françaises estiment que le partage des fourchettes salariales entraînera une
hausse des questions des salariés (62%) et des managers (52%) sur la
rémunération, mais engageront également davantage de négociations salariales
(55%). D’ailleurs, parmi les entreprises qui partagent déjà les fourchettes
salariales, elles sont 79% à déclarer recevoir des questions sur le
positionnement salarial (positionnement individuel, critères de progression,
alignement avec la performance…)
En France, les
principaux freins au développement de la communication sur les programmes de
rémunération sont les réactions possibles des salariés (53%), le manque de
préparation des programmes de rémunération (50%) et l’absence d’une
architecture claire des emplois et des postes (35%).
Pour avancer sur la
mise en place de la directive européenne sur la transparence des rémunérations,
les entreprises forment en priorité les équipes dirigeantes (27%) et les
managers (23%) sur les questions de rémunérations. A l’inverse, seuls 10% des
salariés sont déjà en cours de formation et près de la moitié des entreprises
(47%) ne prévoient, ni n’envisagent de les former sur ce sujet, un chiffre
préoccupant à quelques mois de l’échéance européenne.
Des pratiques encore
limitées en matière d’équité salariale
En France, les
entreprises communiquent majoritairement sur la fourchette de salaire à
l’embauche, et davantage auprès des candidats externes (86%), qu’internes (74%).
En matière d’équité
salariale, 44% des entreprises publient déjà un engagement public et 38%
prévoient ou envisagent de le faire. Par ailleurs, 27% des entreprises publient
volontairement sur leur écart de rémunération femmes-hommes non ajusté (contre
17% au niveau mondial), avec une tendance à recourir aux canaux institutionnels
pour le faire (rapport annuel, rapport ESG, site web, reporting CSRD).
En France, les
indicateurs de performance les plus envisagés pour mesurer les impacts des
exigences règlementaires sont l’écart de rémunération ajusté entre les genres
(56% vs 35% au niveau Global) et l’écart salarial par rapport aux pairs (39% vs
23% au niveau Global).
L’intelligence
artificielle encore marginale
Que ce soit au niveau
national ou global, l’utilisation de l’IA dans le pilotage des rémunérations
reste marginale (inférieure à 2%). En revanche, près d’une entreprise sur cinq
en France utilise déjà des technologies conventionnelles pour analyser les données
de marché, définir des grilles salariales ou identifier des écarts de
rémunération.
Les principales raisons
évoquées étant les risques liés à la confidentialité des données et à la
conformité (62%), au manque de supervision dans les décisions prises par l’IA
(59%) et aux difficultés d’intégration avec les systèmes RH (58%).
Les entreprises doivent
se préparer à l’approche de la directive européenne
Si les exigences
réglementaires croissantes constituent le principal moteur de la transparence
salariale, elles ne sont pas les seules à l’origine de cette évolution. De plus
en plus d’entreprises adoptent une approche globale de la communication autour de
leurs politiques de rémunération. Dans ce contexte, il est essentiel
d’anticiper les transformations du marché de l’emploi, où la transparence
deviendra progressivement un standard de référence.
Pour rester
compétitives et conformes à la directive, les entreprises doivent concentrer
leurs efforts sur trois priorités :
1. Clarifier l’architecture des emplois et les politiques salariales.
2. Mettre à jour les politiques RH et recrutement pour garantir la
communication des fourchettes et l’interdiction de demander l’historique
salarial.
3. Se doter de données fiables et d’outils
analytiques pour préparer les futurs reportings et demandes d’information.
« La directive européenne sur la transparence des rémunérations va transformer durablement le rapport des salariés à la rémunération. Les entreprises qui s’y préparent dès aujourd’hui prendront une longueur d’avance, non seulement en matière de conformité, mais aussi d’attractivité et de confiance auprès de leurs collaborateurs » souligne Laura Grouberman, Directrice de l’activité Work, Rewards & Careers chez WTW en France.


