PFAS : Une contamination
inquiétante de l'alimentation européenne révélée par une nouvelle enquête de
Générations Futures
Afin d'avoir une vision
élargie des contaminations PFAS dans les denrées alimentaires, Générations
Futures a compilé les données et analyses officielles disponibles dans
plusieurs pays européens. Ce travail révèle des informations inquiétantes
concernant l’exposition des européens aux PFAS via l’alimentation et l’inaction
des autorités sur ce problème !
Les substances per- et
polyfluoroalkylées (PFAS), surnommées « polluants éternels » en raison de leur
persistance dans l’environnement, sont susceptibles de contaminer massivement
notre chaîne alimentaire. L’alimentation représente la principale voie
d’exposition pour la population générale, pourtant les données sur les niveaux
de PFAS dans les denrées restent dramatiquement insuffisantes. Ce constat
alarmant appelle des mesures immédiates pour protéger la santé publique et
stopper la pollution à la source.
PFAS : Une
contamination préoccupante de l’alimentation
Nos investigations nous
ont d’ores et déjà permis de constater que sur les milliers de substances que
regroupe la famille des PFAS, la réglementation européenne ne prévoit la
surveillance que de 3 PFAS (PFOS, PFOA, PFHxS) et que seuls 4 PFAS (PFOS, PFOA,
PFNA et PFHxS) sont encadrés par des limites réglementaires. De plus, ces limites
ne s’appliquent que sur un nombre limité de denrées alimentaires (viande,
poisson, crustacés, mollusques et œufs) ce qui ne permet pas de couvrir
l’ensemble de notre alimentation.
Nous avons demandé
l’accès aux résultats disponibles dans chaque pays auprès de l’Agence
européenne de sécurité des aliments (EFSA) qui centralise les données. Sur
l’ensemble des échantillons considérés dans le rapport nous constatons que :
• 69% des poissons, 55% des abats, 55% des
mollusques, 39% des œufs, 27% des crustacés, 23% des laits et 14% des viandes
contiennent au moins l’un des quatre PFAS réglementés.
• En moyenne, le PFOS représente 63% de la
contamination aux 4 PFAS réglementés
• Les taux des 4 PFAS réglementés les plus
élevés sont retrouvés dans les abats et les poissons.
• Sept autres PFAS dangereux, mais toutefois
non réglementés, sont également détectés, notamment dans les abats, les
poissons et les œufs.
• les viandes de volaille, les fruits et les
légumes sont globalement moins contaminés
PFAS : Des limites
réglementaires inadaptées
Les seuils
réglementaires en vigueur pour 4 PFAS n’ont pas été fixés dans l’objectif de
protéger la santé des consommateurs. Au contraire, ces limites ont été établies
à des niveaux suffisamment hauts pour que très peu de produits soient retirés
du marché et ainsi préserver les intérêts économiques des filières. Par
conséquent, les teneurs maximales autorisées font courir un risque très
important pour les consommateurs de dépasser la dose hebdomadaire tolérable
(DHT) établie en 2020 par l'EFSA.
Par exemple :
• Un œuf à la limite réglementaire expose un
enfant de 4 ans à 140% de la dose hebdomadaire tolérable (DHT).
• 100 g de poisson à la limite réglementaire
représente 130% de cette DHT pour un enfant de 11 ans.
• 500 g de viande à la limite réglementaire
équivaut à 2,5 fois la dose hebdomadaire tolérable pour un adulte de 60 kg.
PFAS : Une surveillance
insuffisante en France
En France, la Direction
Générale de l’Alimentation (DGAL) du ministère de l’agriculture réalisent des
analyses de PFAS dans les denrées alimentaires. A ce jour, seules les données
pour 2022 et 2023 sont disponibles et se limitent aux poissons, abats et viandes.
De plus, les bilans réalisés par la DGAL se limitent aux 4 PFAS encadrés par
une limite réglementaire et n’indiquent pas les résultats pour les autres PFAS
analysés. En comparaison, l’Allemagne surveille les PFAS dans les aliments
depuis 2006 avec un échantillonnage robuste. Cette absence de suivi exhaustif
et de transparence empêche une évaluation précise de l’exposition des Français.
PFAS : Des mesures
urgentes à prendre
Face à ce constat, il
est impératif d’agir à plusieurs niveaux
1. Stopper les émissions à la source : Interdire les rejets
de PFAS, en particulier du PFOS et de ses précurseurs, et instaurer une
surveillance stricte des rejets industriels et des stations d’épuration.
2. Soutenir la restriction universelle des PFAS : La France doit
défendre la proposition de restriction déposée en 2023 dans le cadre du
règlement REACh, visant à limiter la fabrication et l’utilisation de tous les
PFAS, sans céder aux pressions des lobbies.
3. Renforcer la surveillance alimentaire : Étendre la
surveillance à un nombre bien plus conséquent de PFAS et à l’ensemble des
aliments, y compris fruits, légumes, céréales, produits laitiers et aliments
pour bébés.
4. Réviser les limites réglementaires : Alignées sur la dose
hebdomadaire tolérable, elles doivent garantir la protection de la population,
en particulier des enfants.
5. Amplifier les plans nationaux : Renforcer les
contrôles et fournir des informations transparentes sur la contamination
alimentaire.
« Notre travail souligne l'urgence de traiter le problème à sa source en stoppant les émissions industrielles de PFAS. Nous appelons la France à soutenir fermement la "restriction universelle" proposée par cinq pays européens dans le cadre du règlement REACh, visant à interdire la fabrication, la mise sur le marché et l'utilisation de l'ensemble des PFAS. A l’échelle nationale, les plans de surveillance et de contrôle doivent être renforcés afin d’assurer une information complète, claire et accessible sur l’état de la contamination de l’alimentation des Français et des Françaises. Dans l’attente de limites sanitaires européennes adéquates, le ministère de la Santé doit saisir le Haut Conseil de la Santé Publique (HCSP) afin d'élaborer des mesures de gestion visant à protéger les consommateurs. En effet, nous sommes face à une question importante de santé publique, l’alimentation étant la première source de contamination de la population aux PFAS. », conclut Kildine Le Proux de la Rivière, pharmacienne et chargée de mission scientifique chez Générations Futures.