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[Expertises] Décryptage : Réforme des Heures Creuses, la facture des véhicules électriques va-t-elle exploser ?

Depuis le 1er novembre 2025, l’entrée en vigueur de la réforme des heures pleines/heures creuses a redéfini en profondeur les habitudes de consommation électrique en France. Portée par la Commission de régulation de l’énergie (CRE), cette refonte s’appliquera en deux étapes et concernera à terme près de 11 millions de foyers parmi les 14,5 millions ayant souscrit cette option tarifaire.

 

Avec pour objectif d’adapter le système tarifaire aux évolutions du mix énergétique français, cette réforme va massivement impacter les possesseurs de voitures électriques qui sont de plus en plus nombreux (en octobre 2025, les voitures électriques ont représenté 24% des ventes de véhicules neufs en France, contre 15% un an plus tôt). Qu’il s’agisse de particuliers ou d’entreprises, nombreux sont ceux qui avaient pris l’habitude de recharger leur véhicule à moindre coût sur le créneau 22H-6H.

 

Des habitudes qu’il va falloir maintenant changer…

 

Face à cette réforme, Solal Botbol, cofondateur et PDG de la startup française Beev (leasing de véhicules électriques, installation de bornes de recharge, gestion de flotte d’entreprise) analyse ici les conséquences pour les possesseurs de voitures électriques et les moyens de s’adapter à celle-ci pour empêcher que la facture n'explose.

 

 

Qu'est-ce que la réforme des heures creuses de 2025 ?

« Le système des heures pleines et creuses a été instauré dans les années 70-80 et visait à mieux exploiter le parc nucléaire français, dont la production est difficilement modulable. À l’époque, il s’agissait surtout d’inciter les foyers à consommer la nuit, grâce à un tarif avantageux sur une plage continue de huit heures. Mais avec l’essor des énergies renouvelables et l’évolution des usages, ce modèle n’est plus adapté. La CRE a donc engagé une réforme profonde, entrée en vigueur le 1er novembre 2025, pour redéfinir ces plages dans le cadre du nouveau tarif d’acheminement, le TURPE 7. »

 

Quel est l'objectif de cette réforme ?

« L’objectif de cette réforme est d’adapter le système tarifaire à la nouvelle réalité du mix énergétique français. Avec la montée en puissance du solaire et des autres énergies renouvelables, la production d’électricité est désormais plus abondante en journée qu’en pleine nuit. Il s’agit donc d’inciter les consommateurs à déplacer leur consommation vers ces périodes où l’énergie est plus disponible et moins carbonée. Cette réforme tient aussi compte des nouveaux usages, comme le télétravail, la recharge des véhicules électriques... Le déploiement se fera en deux étapes entre novembre 2025 et octobre 2027, avec à la fin la transition de près de 11 millions de foyers vers le nouveau système. »

 

Sur quel principe fonctionne le nouveau système des heures creuses ?

« La grande nouveauté, c’est l’arrivée d’un système d’heures creuses saisonnier. Jusqu’ici, les plages étaient fixes toute l’année ; désormais, elles s’adapteront aux variations de production d’électricité. En hiver, les heures creuses resteront majoritairement nocturnes, entre 22h et 7h, pour répondre aux besoins en chauffage. En revanche, l’été marquera un vrai changement : une partie des heures creuses sera déplacée en journée, entre 11h et 17h, au moment où la production solaire est la plus forte. En clair, il n’y aura plus d’heures creuses le matin ni le soir, et les recharges de véhicules électriques devront s’adapter à ces nouveaux rythmes. »

 

Qui est concerné par la réforme ?

« Cette réforme concerne environ 11 millions de foyers parmi les 14,5 millions ayant souscrit à l’option heures pleines/heures creuses. Elle s’applique uniquement aux clients équipés d’un compteur Linky, car ce dernier permet d’ajuster les plages horaires à distance selon la production et la consommation locales. Les foyers non encore équipés conservent pour l’instant l’ancien système, mais basculeront progressivement au fur et à mesure du déploiement des compteurs. Chaque client est averti par son fournisseur au moins un mois avant le changement. Pour les entreprises, notamment celles gérant des flottes électriques, il est dès à présent essentiel d’anticiper cette transition pour adapter leurs stratégies de recharge et maîtriser le coût de leur consommation électrique. »

 

Quelles conséquences pour la recharge d’un véhicule électrique durant la nuit ?

« La réduction des heures creuses nocturnes va clairement rebattre les cartes pour la recharge des véhicules électriques. Jusqu’ici, la plupart des particuliers et des entreprises rechargeaient leurs batteries la nuit, sur des plages allant souvent de 22h à 6h. Désormais, avec seulement 5 à 6 heures creuses nocturnes, une recharge complète ne sera plus toujours possible. Dans les entreprises, les gestionnaires de flottes devront soit accepter une recharge partielle, soit payer une partie au tarif plein, ce qui pourrait faire grimper la facture de 8 à 14 %. Il va donc falloir repenser les habitudes : brancher plus tôt, renforcer la puissance des bornes et exploiter les nouvelles heures creuses en journée. »

 

Qu’en est-il de la recharge en journée ?

« Si la réforme complique la recharge nocturne, elle crée en revanche de vraies opportunités en journée. L’ajout de 2 à 3 heures creuses entre 11h et 17h, surtout l’été, permet aux entreprises de recharger leurs véhicules sur site à moindre coût pendant les heures de travail. Pour celles équipées de panneaux photovoltaïques, le gain est double : elles peuvent profiter à la fois du tarif réduit et de leur propre production solaire. Cela allège la facture énergétique et améliore le bilan carbone. Pour les particuliers, celles et ceux qui sont à la maison en journée, notamment les salariés en télétravail, vont pouvoir tirer parti de ce nouveau système en rechargeant à domicile en milieu de journée. À condition, bien sûr, d’avoir les infrastructures adaptées et des outils de pilotage de la recharge. »

 

Cette réforme va-t-elle favoriser certaines technologies de recharge ?

« La réforme redonne beaucoup d’intérêt aux technologies de recharge bidirectionnelle, ou V2G

(Vehicle-to-Grid). Ce système permet à un véhicule électrique non seulement de se charger, mais aussi de restituer de l’électricité au réseau quand la demande est forte. Même si cette technologie reste encore marginale en France pour des raisons techniques et réglementaires, elle représente définitivement un levier d’avenir. Avec la variabilité accrue des heures creuses, le V2G permettra demain de stocker l’énergie pendant les périodes les moins chères, puis de la réinjecter ou de l’utiliser plus tard. Elle pourrait devenir une brique essentielle dans la gestion plus intelligente et plus flexible de l’énergie. »

 

Face à cette réforme, avez-vous des recommandations spécifiques pour les entreprises ?

« Avec la baisse du nombre d’heures creuses nocturnes, les entreprises doivent repenser la gestion de leurs infrastructures de recharge. Le choix de la puissance des bornes devient stratégique : plus la borne est puissante, plus il est possible de maximiser la recharge pendant les créneaux tarifaires avantageux. L’une des clés pour les entreprises, c’est le pilotage intelligent de la recharge. Grâce aux solutions connectées, les bornes peuvent désormais dialoguer directement avec les compteurs Linky pour connaître en temps réel les plages horaires les plus avantageuses et ajuster automatiquement la charge des véhicules. Ces outils offrent aussi un suivi complet depuis un smartphone : état de charge, coût, économies réalisées, tout est centralisé. Enfin le choix de l’autoconsommation solaire devient très intéressant : les heures creuses en journée permettent d’utiliser directement l’énergie produite sur site. Une synergie idéale pour réduire les coûts, verdir la recharge et renforcer les engagements RSE des entreprises. »

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