AEW, l’un des leaders mondiaux du conseil en
investissement et de la gestion d’actifs immobiliers, publie sa nouvelle étude
sur le marché de la dette en immobilier d’entreprise en Europe, qui inclut une
estimation du déficit de financement.
L’étude montre que ce
déficit a reculé de 18% pour atteindre 74 milliards d’euros sur la période
2026-2028, contre 90 milliards d’euros estimés pour la période 2024-2026 dans
l’étude d’octobre 2023. Le déficit de financement correspond à l’écart entre le
montant initial de dette sécurisée octroyée entre 2017 et 2024 et le montant de
dette disponible au refinancement à l’échéance des prêts sur les trois
prochaines années dans 20 pays européens.
Hans Vrensen,
Responsable Recherche et Stratégie Europe chez AEW, commente : « Notre
dernière estimation de 74 milliards d’euros pour le déficit de financement en
Europe confirme que les difficultés de refinancement se sont atténuées. Alors
que les taux de rendement prime se stabilisent et que les coûts d’emprunt se
normalisent, la dette immobilière redevient attractive pour les investisseurs
en capitaux propres. Ce phénomène est particulièrement visible en zone euro, où
les taux swap demeurent plus attractifs qu’au Royaume-Uni. Les volumes de
transactions et d’octrois de prêts ont ainsi rebondi en 2024 et 2025,
témoignant d’un retour de confiance des prêteurs comme des emprunteurs, ainsi
que d’une plus grande capacité des emprunteurs à supporter des niveaux de
levier plus élevés. Dans ce contexte, l’essor des fonds de dette privée et le
recours accru au back-leverage contribuent à atténuer les difficultés de
refinancement. Bien qu'il s'agisse d'une solution à court terme, la croissance
des fonds de dette moins régulés et l’utilisation du back leverage pourraient,
à long terme, affecter la stabilité du système financier européen. »
Les conditions de
financement en Europe se normalisent à mesure que les marges sur les prêts de
bureaux prime se resserrent
Les marges de prêts
dans les différents secteurs immobiliers se normalisent et convergent. En
effet, les marges sur les prêts de bureaux prime se resserrent pour
rejoindre les niveaux observés sur la logistique et le résidentiel, alors que
les taux de vacance ont atteint un point haut et avec une offre neuve désormais
limitée. Des signaux montrent par ailleurs que les ratios de levier LTV augmentent
légèrement, tandis que les covenants financiers deviennent moins
restrictifs, les prêteurs cherchant à rester compétitifs en offrant des marges
mais aussi des conditions de prêt plus favorables. La base de données élargie
d’AEW sur les prêts européens confirme que les ratios LTV sont généralement en
hausse, avec une baisse des coûts d’emprunt et un resserrement des marges pour
les prêts à plus faible levier, notamment sur les actifs adossés à des
sous-jacents français ou d’autres marchés de la zone euro. Les coûts d’emprunt all-in allemands
et britanniques sont restés stables au cours de l’année passée, représentant
respectivement les niveaux les plus bas et les plus élevés des marchés core européens.
Malgré cette amélioration des conditions de financement pour les emprunteurs en
immobilier d’entreprise, certains prêts plus anciens garantis par des
collatéraux secondaires – dont les valeurs ne devraient pas retrouver leurs
niveaux passés – nécessiteront une restructuration avec un accord à trouver
entre prêteurs et emprunteurs.
Les difficultés de
refinancement s’amenuisent en Europe, la France fait exception
La dernière estimation
d’AEW évalue le déficit de financement à 74 milliards d’euros, ce qui signifie
qu’environ 12% des prêts en immobilier d’entreprise en Europe arrivant à
échéance entre 2026 et 2028 seront confrontés à des difficultés de
refinancement. Ce ratio est en baisse par rapport aux 13% estimés en octobre
2024. Cette analyse confirme que les conditions de refinancement se sont
assouplies en Europe, au regard des dernières données disponibles sur les
maturités des prêts, les ratios LTV à l’octroi et les extensions de maturité
mises en place par les prêteurs.
Cependant, la France se
distingue comme le marché le plus exposé au risque de refinancement, avec un
déficit estimé à 20% des prêts octroyés sur la période 2017-2024 – soit la part
la plus élevée parmi les 20 pays couverts par l’étude et en hausse par rapport
aux 18% estimés l’an dernier. Cela reflète un rebond plus lent des valeurs
immobilières françaises, notamment pour les actifs de logistique et de bureaux.
En comparaison, la dernière estimation du déficit de financement pour
l’Allemagne ressort à 16%, en ligne avec l’amélioration générale observée en
Europe, contre une estimation 20% en 2024. L’Espagne et l’Italie affichent
également une nette amélioration, avec des déficits estimés respectivement à 10%
et 8 % des prêts octroyés, nettement inférieurs à la moyenne européenne. Le
Royaume-Uni, quant à lui, se situe dans le bas de la fourchette européenne, à 6%.
Les prêts adossés à des
actifs de bureaux représentent 41% du déficit de financement européen total
estimé à 74 milliards d’euros, suivis des commerces (21%), et du résidentiel
(19%), les autres secteurs comptant pour environ 18% du déficit estimé sur la
période 2026- 2028.
L’étude souligne
également que, outre l’injection de capitaux propres, la croissance des
financements de la part des fonds de dette a fortement contribué à réduire le
déficit de financement. Les fonds de dette prennent des parts de marché, avec
43 fonds identifiés représentant un encours total de 110 milliards d’euros de
dette immobilière mi-2025. Les banques d'investissement et les fonds
opportunistes qui fournissent des financements par emprunt non garantis à des
prêteurs non bancaires (back-leverage ou loan-on-loan) jouent un
rôle de plus en plus important, facilitant le refinancement des prêts existants
arrivant à échéance avec des ratios LTV élevés. Cependant, la croissance des
fonds de dette moins régulés et l’utilisation du back leverage
pourraient, à long terme, affecter la stabilité du système financier européen.
Pour autant, tous les
prêts confrontés à des difficultés de refinancement ne se traduiront pas
nécessairement par une défaillance de l’emprunteur ou une perte pour le
prêteur. L'impact sur les différents secteurs dépendra du millésime et du
volume de prêts accordés, ainsi que des tensions sur les valeurs des
sous-jacents et sur les taux propres à chaque marché sur l'ensemble des prêts
accordés entre 2017 et 2024.
Une baisse des défauts
et de pertes des prêts en immobilier d’entreprise en Europe, qui confirme
l’amélioration des conditions de financement
Selon la dernière
analyse d’AEW, 5,8% des prêts en immobilier d’entreprise européens octroyés
entre 2017 et 2024 sont désormais considérés en risque de défaut, contre 7,1%
dans l’estimation d’octobre 2024. Les pertes attendues associées à ces prêts
sont évalués à 1,6%, en recul par rapport à l’estimation précédente de 1,8%.
Ces nouvelles prévisions demeurent nettement inférieures au taux de 2,3% de
pertes enregistré sur prêts adossés à des CMBS (Commercial Mortgage-Backed
Securities) en Europe pendant la crise financière mondiale.
Une analyse sectorielle met en évidence que les prêts adossés à des actifs de commerce issus des millésimes 2017-2024 affichent toujours les pertes moyennes les plus élevées, proches de 5%, soit plus de trois fois la moyenne tous secteurs confondus. Cette contre-performance s’explique par la correction plus précoce et plus marquée des valeurs des actifs de commerces observée depuis 2018. Les prêts adossés à des actifs de bureaux présentent des pertes estimées à 1,9%, légèrement au-dessus de la moyenne tous secteurs, tandis que tous les autres secteurs immobiliers (logistique, résidentiel, mixte, etc.) se situent nettement en dessous de 1%.


