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[Tribune] Taxe sur les ultrariches : une fausse bonne idée ?

Le point de vue de Virginie Saks, Co-fondatrice de Compagnum, cabinet de conseil et d'étude sur la réindustrialisation.

 

1 170 milliards d’euros, c’est le montant cumulé des 500 plus grandes Fortunes de France en 2023. C’est 3 fois plus qu’en 1996.

A l’heure où la France doit réduire le poids de sa dette (3 345 milliards d’euros en 2023) et où les Français ont les yeux rivés sur leur pouvoir d’achat, augmenter la contribution financière des “ultrariches” est une idée qui fait recette.

 

Le réflexe de la taxe

 

Garantir la justice sociale par la redistribution fiscale est un réflexe bien connu. C’est le projet de taxe dite Zucman qui consisterait à taxer les grandes fortunes à hauteur de 2% de leur patrimoine. Pourtant, ce passage par la fiscalité n’est pas nécessairement la meilleure option - et cela pour plusieurs raisons.

 

Avant tout, parce que cette taxe pose de nombreux problèmes : incertitude constitutionnelle, manque de clarté (une taxe oui, mais pour quelle utilité ?), risque de départ des grandes fortunes… avec l’incitation de délocalisations ou de non localisation en France de nouvelles usines, sur lesquelles le dispositif “anti évasion fiscale” envisagé n’aura aucune prise.

 

Ensuite, il est difficile d’estimer les retombées économiques réelles de cette taxe. Entre optimisation fiscale et limites juridiques, une récente tribune d’économistes estime ses recettes à

5 milliards de recettes au lieu des 20 milliards attendus.

 

Enfin, parce que ce nouvel impôt n’implique pas directement une amélioration du quotidien au plus proche des Français. Une nouvelle taxe, oui ; mais pour quoi faire ? Pourquoi ne pas envisager des solutions plus directes incitant nos grandes fortunes à investir dans les territoires et leurs infrastructures ?

 

Par exemple : faire du mécénat auprès d’associations locales, prendre en charge des frais kilométriques des collaborateurs, financer de nouveaux parkings mutualisés pour libérer du foncier dans les zones d’activité, contribuer à la rénovation du bâti ou la construction d’un réseau de chaleur urbain ; accompagner les PME pour relocaliser une partie de leurs approvisionnements en France… Si 2% du patrimoine de la famille Hermès (164 milliards d’euros en 2025) finançait des actions dans l’ensemble de leurs territoires d’implantation, l’impact serait immédiat, mesurable et visible par les Français.

 

Un autre rôle pour l’administration publique

 

Le rôle de la fonction publique serait alors moins de lever la taxe que d'aiguiller les investissements des entreprises dans les territoires. Vaut-il mieux aider à financer des logements sociaux ou des places de stationnement ?

 

Trois objectifs doivent nous guider :

•   Générer un impact réel sur le quotidien des Français, sur leur pouvoir d’achat et leur bien vivre, lutter contre l’exclusion et les inégalités

•   Contribuer à des politiques publiques d’avenir, qu’il s’agisse de formation des jeunes, de maintien de notre système de santé ou d’innovation

•   Recréer un sentiment d’équité et de confiance, avec une nouvelle fierté des Français pour leur territoire.

 

Il faut également de nouveaux outils. Certaines collectivités montrent déjà la voie avec des fonds de dotation, qui mutualisent les investissements de plusieurs acteurs et associent les citoyens aux décisions de financement. En Allemagne, des référendums locaux peuvent être organisés. A titre d’exemple, la municipalité de Pullach im Isartal a lancé en 2018 un vaste projet de logements sociaux pour un coût de 10 millions d'euros, financé par les entreprises locales et validé auprès des habitants par référendum.

 

Enfin, un suivi transparent — sous forme de “dividende territorial” intégré dans la comptabilité des entreprises — permettrait de valoriser ces contributions auprès des investisseurs et des parties prenantes. Une façon de rétablir la confiance entre les Français et les ultrariches.

 

La France a besoin de ses grandes fortunes. Il faut redonner aux Français la fierté de leurs fleurons nationaux et non les opposer.

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