Le point de
vue de Delphine Séné, experte des transports chez Klee Group - Alenium,
En France, le débat sur
les transports publics tourne souvent autour d’une seule question : comment
trouver plus de financement ? Mais, dans un contexte de restrictions
budgétaires et de besoins croissants en mobilité, cette approche atteint ses
limites. Le véritable enjeu n’est pas seulement de lever de nouvelles recettes,
mais de revoir le modèle dans son ensemble.
Pour Delphine Séné la
clé est ailleurs : « Nous avons tendance à raisonner uniquement en termes de
projets d’infrastructures et de financements, alors qu’une grande partie de la
solution réside dans l’optimisation de l’existant. Le bon mode, au bon endroit,
au bon moment : cela relève du bon sens, mais notre organisation en silos, la
dispersion des compétences et l’absence de vision intermodale empêchent encore
de le systématiser. Tant que l’on ne remettra pas à plat notre façon de
concevoir et d’exploiter les réseaux, les milliards investis ne produiront pas
tous les effets attendus. »
Réorganiser les
horaires, fluidifier les correspondances, adapter l’offre aux flux réels ou
combiner intelligemment différents modes de transport peuvent offrir des
résultats rapides et significatifs, souvent à moindre coût. Cela suppose de
repenser la gouvernance et la planification, pour sortir d’une logique où
chaque mode évolue isolément.
Au niveau de son
financement, le modèle économique actuel repose largement sur les
collectivités, alors que la vente des billets ne couvre qu’une faible part du
coût réel. Ni l’augmentation brutale des tarifs, ni la surcharge fiscale des
entreprises, ni la gratuité ne constituent des réponses viables, car elles
déplacent le problème sans le résoudre.
Des marges de manœuvre
existent pourtant : Renforcer la lutte contre la fraude, qui coûte des
centaines de millions d’euros par an, mobiliser de nouvelles ressources comme
une part des bénéfices des concessions autoroutières ou élargir la fiscalité de
la mobilité à mesure que les véhicules électriques se généraliseront sont
autant de pistes concrètes.
Enfin, l’ouverture à la
concurrence a montré qu’elle pouvait à la fois réduire les coûts et améliorer
la qualité de service, avec des tarifs en baisse en Italie et une offre
renforcée en Autriche.
Repenser nos transports, ce n’est donc pas qu’une question de financement mais aussi une question d’efficacité. Mettre l’optimisation, l’agilité et la cohérence intermodale au centre des décisions permettrait d’offrir aux citoyens un service plus régulier, plus accessible et plus durable, sans attendre des financements toujours hypothétiques.


