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[Etudes] La France a table, le Sud paie l'addition

Les dépendances alimentaires fragilisent les agriculteurs et agricultrices en France et dans les pays du Sud.

 

Alors que les questions agricoles sont au cœur de l’actualité depuis plusieurs mois avec des temps forts majeurs (LOA votée et promulguée en février 2025 – Mobilisations des agriculteurs par vagues depuis octobre 2023 – Sommet UE/UA du 27 juin 2025) le CCFD-Terre Solidaire (1ère ONG internationale de développement) publie pour la première fois son Observatoire de la souveraineté alimentaire, mettant en lumière les interdépendances entre la France et les pays du Sud.

 

Cet observatoire se donne pour ambition de documenter et analyser les échanges commerciaux pour permettre de mettre en lumière les impacts économiques, sociaux et environnementaux de ces dépendances sur les systèmes alimentaires.

 

Il révèle comment le modèle agricole actuel français, axé sur l'exportation, nuit non seulement aux agriculteurs et agricultrices en France mais aussi à ceux des pays avec lesquels elle commerce, exacerbant les inégalités et les problèmes environnementaux.

 

1/ Interdépendances France-Sud Global

 

La France exporte principalement des produits transformés vers les pays les moins avancés (PMA) et importe des produits bruts, créant une asymétrie qui concentre la valeur ajoutée du côté des pays du Nord.

 

Les PMA sont particulièrement vulnérables aux fluctuations des marchés internationaux, ce qui fragilise leurs économies et leur autonomie alimentaire.

 

Selon Lorine Azoulai, chargée de plaidoyer Souveraineté alimentaire au CCFD-Terre Solidaire et auteur de l’Observatoire : « La souveraineté alimentaire ne peut se penser sans une évaluation lucide des impacts de ces dépendances. Le recours accru au commerce mondial pour l’approvisionnement alimentaire pose des questions majeures sur l’autonomie des systèmes alimentaires français et européen. »


Chiffres clés

• Les pays les moins avancés (PMA) représentent 12% de la population mondiale mais concentrent 22% des personnes touchées par la faim dans le monde.

 

 

2/ Impact sur les agriculteurs et agricultrices

 

En France : La spécialisation des terres agricoles pour l'exportation réduit la complémentarité entre cultures végétales et élevages, augmentant la dépendance aux engrais minéraux importés.

Dans les PMA : Les dépendances et spécialisations enferment ces pays et les empêche de développer leur autonomie alimentaire, comme le montrent les cas du Sénégal et de Madagascar

 

Chiffres clés

• En France : 43% de la surface agricole utilisée (SAU) de la France est mobilisée pour des produits agricoles destinés aux exportations.

• Dans les PMA : Les importations françaises représentaient environ 12% du total des importations sénégalaises de produits agricoles en 2023.

• La France fournit 37% des importations de blé sénégalaises et 65% des importations de produits laitiers.

 

 

3/ Étude de Cas : Les Importations de Tomates Marocaines

 

Le Maroc est devenu le premier fournisseur de produits agricoles et agroalimentaires de la France, avec des importations atteignant près d’1,5 Md € en 2024.

 

La production de tomates au Maroc soulève des enjeux de souveraineté alimentaire, avec des impacts écologiques (surexploitation des nappes phréatiques) et sociaux (conditions de travail précaires des ouvrières agricoles).

 

Chiffres clés

• Le Maroc fournit à lui seul 76% des importations françaises de tomates, 69% des importations de pastèques et 22% des importations de melons.

• La production de tomates au Maroc mobilise 27% des surfaces cultivées et contribue à la surexploitation des nappes phréatiques.

• Les importations de tomates marocaines en France ont augmenté de 46% en volume et de plus de 220% en valeur entre 2014 et 2024.

 

 

4/ Recommandations pour une Politique Alimentaire Plus Juste

 

Régulation du Commerce International : Reconnaître l'exception agricole et renforcer la gouvernance alimentaire mondiale pour permettre aux États de protéger leurs agricultures.

 

Transition Agroécologique : Orienter les soutiens publics aux investissements agricoles vers l'agroécologie pour bâtir des systèmes agricoles plus résilients et durables.

 

Gouvernance Démocratique des Systèmes Alimentaires : Intégrer les enjeux de solidarité internationale dans les politiques alimentaires territoriales et organiser une Convention citoyenne sur l’alimentation.

 

 

5/ De la compétition à la coopération, une nécessaire bifurcation

 

Il est temps de tourner la page d’un système alimentaire fondé sur la compétition, la domination et le pillage des ressources. L’agriculture ne peut plus servir les profits de quelques-uns au détriment du droit de toutes et tous à se nourrir dignement.

 

Protéger ses frontières des importations tout en exportant massivement, ce n’est pas de la souveraineté alimentaire

 

Face à l’urgence climatique, aux inégalités croissantes et à la montée des tensions géopolitiques, un choix s’impose : faire de l’alimentation un bien commun, plutôt qu’une arme. Élaborer des politiques publiques pour nourrir les peuples, plutôt que les marchés.

 

Nous devons nous réapproprier le contenu de nos assiettes, et demander une gouvernance démocratique de l’alimentation, à toutes les échelles : il en va de la résilience de nos systèmes alimentaires, de la justice entre nations, et de la capacité collective à répondre aux crises du XXIe siècle.

 

Lorine Azoulai, chargée de plaidoyer Souveraineté alimentaire au CCFD-Terre Solidaire et auteur de l’Observatoire, conclut : « Faire de l’alimentation un bien commun, plutôt qu’une arme. Élaborer des politiques publiques pour nourrir les peuples, plutôt que les marchés." - CCFD-Terre Solidaire ».

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