Une nouvelle étude du Nürnberg Institut für Marktentscheidungen (NIM), célèbre institut de recherche allemand, en coopération avec le St. Gallen Symposium, l’un des forums les plus prestigieux organisé par l’université de St. Gall, qui occupe la première place mondiale dans le classement 2024 du Financial Times, révèle le choc intergénérationnel entre les dirigeants expérimentés et les jeunes leaders dans leur compréhension du monde.
Pendant des décennies,
l’Occident – avec les États-Unis et l’Europe comme piliers – a dominé les
marchés, les institutions et les normes mondiales. Aujourd’hui, leur hégémonie
est remise en cause. Combiné à cela, le retour de Donald Trump en tant que président
marque le début d’une ère imprévisible : alliances transatlantiques,
multilatéralisme et accords de libre-échange sont de plus en plus questionnés
Cette nouvelle étude montre que si les dirigeants d’entreprises sont conscients
de ces bouleversements, ils en sous-estiment largement la portée.
Pour l’édition 2025 du
rapport Voices of the Leaders of Tomorrow (VOLOT), plus de 800 jeunes talents
de moins de 35 ans – les « Leaders of Tomorrow » – ainsi que 275 dirigeants
expérimentés issus des plus grandes entreprises mondiales ont été interrogés.
Les dirigeants
expérimentés misent encore sur la stabilité de l’ordre établi
L’optimisme exprimé par les dirigeants vis-à-vis de la continuité de l’ordre mondial pourrait révéler un sentiment de sécurité trompeur. En effet, 49% des répondants estiment que les évolutions géopolitiques actuelles auront un impact positif à long terme sur la stabilité et la prospérité. Dans l’autre temps,
43% adoptent une
position neutre et seulement 8% se montrent pessimistes face aux conséquences
de cette reconfiguration hégémonique et à l’éclatement de l’ordre économique
mondial.
De manière générale,
les élites économiques interrogées font preuve d’une grande confiance dans la
solidité des institutions dominées par l’Occident. La majorité des dirigeants
considère que des organisations, telles que l’OTAN, l’Union européenne ou l’OMC,
conserveront ou renforceront leur importance à l’avenir. Trois sur quatre
croient que les coalitions internationales favoriseront une nouvelle ère de
coopération et de stabilité.
Une vision plus
réaliste du côté des jeunes leaders
Dr. Fabian Buder,
auteur de l’étude au NIM, explique : « Les évolutions géopolitiques actuelles
indiquent qu’il sera de plus en plus difficile pour des concepts comme la
coopération ou la division du travail de s’imposer. Notre enquête montre que de
nombreux dirigeants ont été surpris par des évolutions pourtant prévisibles.
Les entreprises doivent désormais mieux intégrer ces réalités dans leur
réflexion stratégique. »
Les résultats de
l’étude suggèrent aussi une piste concrète : associer davantage les jeunes
dirigeants aux décisions stratégiques. Ces derniers adoptent une vision plus
réaliste des mutations en cours. Comparés à leurs aînés, ils se montrent bien
plus sceptiques et anticipent une perte d’influence des institutions et
alliances occidentales comme l’OTAN, l’UE ou l’OMC.
Une majorité des
Leaders of Tomorrow (62%) ne croit pas que les accords de libre-échange ou une
politique économique coopérative permettront à l’avenir de garantir une
croissance soutenue et inclusive. Ils sont également nombreux à douter que les
coalitions internationales ouvrent la voie à une nouvelle ère de collaboration
globale.
Felix Rüdiger,
co-auteur du rapport VOLOT pour le St. Gallen Symposium, souligne : « L’expérience est
précieuse mais elle devient un frein lorsqu’elle empêche de repenser des
modèles archaïques. Aujourd’hui, c’est une réorientation audacieuse qu’il faut
engager. »
L’étude recommande donc aux entreprises d’impliquer les jeunes talents plus tôt dans les décisions stratégiques. En effet, leur vision pourrait être essentielle pour renforcer leur capacité d’action dans un contexte géopolitique instable.