Par Eric Houdet,
Fondateur de la plateforme Homapi.
Nous entrons dans une
nouvelle ère. Une époque où il ne sera plus possible de fermer les yeux sur les
impacts climatiques de nos décisions, notamment dans l’immobilier. En effet, pendant des
décennies, on a acheté, vendu, rénové sans vraiment se poser la question de l’empreinte
laissée derrière chaque mètre carré. Aujourd’hui, ce confort de l’ignorance
n’est plus une option.
Les catastrophes se
succèdent, canicules, inondations, effondrements, révélant à chaque fois un
point faible : l’incapacité à anticiper. Pourtant, les textes existent : DPE,
CIL, audit énergétique, bilan carbone, BEGES, CSRD, PPT, DTG, BACS, LOM,
obligations ENR… Chaque nouvelle loi vient combler une lacune, corriger un
angle mort, alerter sur un risque. Mais elles peinent à produire un effet de
levier à la hauteur de l’urgence.
Pourquoi ? Parce qu’on
les applique trop souvent comme des cases à cocher, sans cohérence d’ensemble.
On additionne les obligations sans construire une vision. On informe sans
structurer l’information. Or, le défi climatique est systémique. Il appelle une
réponse systémique.
Ce qu’il manque, ce
n’est pas une loi de plus, mais une capacité à relier les lois entre elles. À
faire dialoguer le diagnostic énergétique d’un logement avec sa stratégie de
rénovation, son exposition aux risques naturels, sa consommation réelle, sa trajectoire
carbone. À créer un langage commun, lisible pour l’acheteur, utile pour le
professionnel, exploitable pour la collectivité.
Cette vision globale,
certains essaient de la bâtir. Pas à coups de normes, mais à coups
d’architecture de données, d’interopérabilité, d’outils intelligents. Car on ne
pourra pas affronter les enjeux du XXIe siècle avec les méthodes du XXe.
L’immobilier est à un
tournant. Il peut continuer à être un passif écologique, ou devenir un levier
de transformation. Cela suppose un changement de culture : passer d’un réflexe
de possession à une logique de responsabilité. Cela implique aussi de mieux
former, mieux connecter, mieux piloter.
Les fondations réglementaires sont là. Les signaux d’alerte aussi. Ce qu’il nous manque, c’est le ciment : la capacité à faire tenir l’ensemble, à rendre lisible l’invisible, à articuler ce puzzle d’exigences dans une trajectoire compréhensible et engageante.
Parce que chaque logement est plus qu’un bien : c’est un point de bascule. Et notre avenir collectif se joue dans la manière dont nous saurons, ou non, les relier entre eux.