Par Abdel Mammad nouveau co-président de la FNTV Auvergne-Rhône-Alpes
C’est sur le thème de son avenir que la Fédération Nationale des Transports de Voyageurs Auvergne-Rhône-Alpes a tenu son Assemblée Générale Annuelle, qui s’est déroulée mardi 30 avril 2024 à Romanèche-Thorins (71), en présence de Jean-Sébastien Barrault, président de la FNTV et de plus de 220 participants transporteurs, partenaires, élus locaux, collaborateurs et techniciens.
Profession à préserver, le transport routier de voyageurs est dans une situation particulière. Il est pris en étau entre une reprise dynamique, une situation tendue en matière de recrutements et une transition énergétique très contraignante. Selon le projet européen sur les émissions de CO2 pour les poids lourds, 45% des véhicules devront être « zéro émission » à l’horizon 2030. « Si cela ne passe que par l’électrique, cet objectif aura des conséquences désastreuses et mettra au tapis tout un tissu industriel, constitué en Auvergne-Rhône-Alpes de 217 entreprises dont 57% de plus de 50 salariés ! » alerte Pascal Favre, le co-président sortant de la FNTV Auvergne-Rhône-Alpes.
L’occasion pour la profession régionale de renouveler sa présidence et d’élire Abdel Mammad, co-président aux côtés de Michel Seyt réélu, pour un mandat de 3 ans. Abdel Mammad remplace Pascal Favre arrivé au terme de son mandat. « Avec 300 000 élèves transportés par car chaque jour en Auvergne Rhône-Alpes, 12 229 salariés dont 40% a plus de 50 ans et un peu plus d’1 milliard d’euros de chiffre d’affaires en 2023, le transport routier interurbain de voyageurs est un secteur d’activité majeur pour l’économie régionale ! » souligne Abdel Mammad.
La profession encourage les solutions du mix énergétique en attendant la maturité des technologies électriques
Le transport routier de voyageur est un acteur majeur de la transition énergétique. Un autocar circulant équivaut à 30 à 40 voitures en moins sur la route, et les vertus environnementale du carburant diesel EURO VI ne sont plus à prouver. Le transport routier de voyageur est un acteur majeur de la transition énergétique. Un autocar circulant équivaut à 30 à 40 voitures en moins sur la route, et les vertus environnementales du carburant diesel EURO VI ne sont plus à prouver. Mais, avec en 2023 une part du diesel de 85 % pour le segment des autocaristes (19 % pour le segment des bus urbains), la transition énergétique est plus complexe à mettre en place pour les autocaristes.
Et, contrairement aux bus urbains qui sont sur une mono-activité avec des circuits assez courts en ville, les métiers du transport de voyageurs regroupent plusieurs activités qui ont des usages différents, des besoins en autonomie différents et des modèles économiques différents.
La 1ère table ronde a permis de travailler sur le développement des énergies alternatives sur le segment des autocars et sur les enjeux du futur règlement européen sur les émissions de CO2 des poids lourds. Intervenants :
- Paul Vidal, conseiller régional délégué aux transports scolaires et interurbains
- Marjolaine Meynier-Millefert, députée de l’Isère (38)
- Jean Sébastien Barrault, président de la FNTV
- Pascal Favre, co-président de la FNTV Auvergne-Rhône-Alpes
« Nous sommes très inquiets ! Nous ne savons pas comment nous allons faire pour la longue distance, car l’offre en cars électriques est inexistante. Nous avons absolument besoin du mix-énergétique et nous défendons la possibilité d’utiliser différentes sources d’énergie. C'est une réflexion assez pragmatique, qui vient des difficultés des entreprises sur le terrain ! », affirme Michel Seyt, co-président de la FNTV Auvergne-Rhône-Alpes.
Le frein est financier
Dans les activités du transport routiers de voyageurs, 80% des activités relèvent des transports scolaires et lignes régulières, qui font l'objet de marchés publics délégués aux entreprises par la région principalement. Si les budgets ne sont pas en augmentation, il sera difficile de financer le surcoût lié à la transition énergétique.
La transition massive des flottes d’autocars n’a véritablement pas été entamée, principalement pour des raisons de coût et d’insuffisance de l’offre industrielle. Actuellement le prix d’un car thermique est de 190 000€ ; celui d’un car rétrofité gaz ou électrique est de 250 000€, soit 30% de plus qu’un car thermique roulant au diesel. Le prix d’un car rétrofité hydrogène est de 500 000€.
L’hydrogène est 3 à 4 fois plus cher au km
Actuellement, 1 kg d’hydrogène coûte 12€ ce qui représente 120€ pour 100 km contre 30 à 40€ pour 100 km pour un car roulant au diesel EURO VI, dont les vertus environnementales ne sont plus à prouver.
Cela suppose aussi de se donner les moyens pour développer les cars express métropolitains, mais peu de choses bougent car l’argent manque… Cela fait également réfléchir pour des circuits scolaires et donc des distances peu importantes.
A chaque usage son énergie
La difficulté des nouvelles énergies est qu’aucune ne remplace le diesel à elle seule, qui permet de faire de la longue ou courte distance.
Pour les motorisations alternatives, certaines énergies vont correspondre à un usage. Le GNV et BioGNV par exemple sont adaptés pour les lignes régulières. Sur les marchés scolaires, qui sont sur des lignes assez courtes, l'électrique va pouvoir se développer quand la technologie sera mature. Sur la longue distance, c'est plus compliqué, notamment pour des questions d’autonomie et d’approvisionnement.
Le frein est financier, surtout pour les énergies les plus coûteuses comme l'électrique ou l'hydrogène. Mais sur l'offre industrielle proposée aujourd'hui, la maturité des autocars 100% électriques ne le sera pas avant
2035-2040.
Utiliser les solutions du mix énergétique en attendant la maturité des technologies électriques
Dans les 10 à 15 prochaines années, la profession souhaite utiliser toutes les énergies disponibles, puisque la décarbonation est urgente pour répondre au réchauffement climatique. Aujourd'hui, le bioGNV est plébiscité par les transporteurs de voyageurs qui auraient même davantage investi s'il n'y avait pas ces incertitudes au niveau national et européen.
Le règlement européen sur les émissions de CO2 des poids lourds disqualifie tout ce qui n'est pas zéro émission à l’échappement. « C’est une notion faussée qui ne tient pas compte de la totalité des émissions du cycle de vie. Aujourd’hui, tout le monde s'engouffre dans le tout électrique alors que le pragmatisme voudrait qu'on utilise déjà des biocarburants, en attendant la maturité des technologies électriques », conclut Jean-Sébastien Barrault, président de la FNTV.
La situation est très tendue en matière de recrutements.
La profession crée des nouvelles formations
Avec 12 229 emplois dans le transport de voyageurs et 38 entreprises créés en 2022, la région Auvergne-Rhône-Alpes est la 2e région la plus dynamique de France. La croissance de l’activité est portée notamment par le développement du tourisme ainsi que par les transports organisés par les régions qui ont pris la compétence mobilité.
C’est l’objet de la 2e table ronde qui a présenté les bases du constat et des solutions mises en œuvre, avec les interventions de :
- Paul Vidal, conseiller régional délégué aux transports scolaires et interurbains
- Jean Sébastien Barrault, président de la FNTV
- Pierre-Yves Péguy, maître de conférences en sciences éco. et directeur du Laboratoire d’Aménagement et d’Économie des Transports (LAET) Université Lyon II
- Michel Seyt, co-président de la FNTV Auvergne-Rhône-Alpes
La situation est très tendue en matière de recrutements
Avec 94% de CDI et temps complet, des emplois pérennes et pas d’augmentation du turn-over, les mouvements de main d’œuvre stables. La profession n’a pas perdu d’emploi en 2022, et cette tendance s’est confirmée en 2023. Mais la situation reste très tendue en matière de recrutements.
En 2022 en Auvergne-Rhône-Alpes, selon l’enquête BMO de Pôle Emploi qui a recensé 2 510 projets de recrutements, 63% des établissements interrogés reconnaissent avoir des difficultés à recruter. De 2021 à 2022, le nombre d’effectifs par intérim dans le transport de voyageurs en Auvergne-Rhône-Alpes a augmenté de 50%, en passant de 135 à 204. A la rentrée scolaire de septembre 2023, il manquait encore 6 000 conducteurs au niveau national, contre 8 000 l’année précédente. Au niveau régional, c’est 1 000 conducteurs manquants en Auvergne-Rhône-Alpes !
Rajeunir les effectifs
Avec 40% des effectifs qui a plus de 50 ans dans le transport de voyageurs, la profession agit pour que ses métiers ne soient plus uniquement des emplois de reconversion en 2nde partie de carrière. Elle a contribué au niveau national à abaisser à 18 ans, contre 21 ans auparavant, l’âge du permis D pour conduire certains services de transport en commun, mais cela ne suffit pas !
Comparaison des pyramides des âges pour le transport Routier de Marchandises
Comparaison des pyramides des âges pour le transport Routier de Voyageurs
Création du C4A et d’une nouvelle offre de formation en Auvergne-Rhône-Alpes
Opérations de recrutements sur les parkings de grandes surfaces sur tout le territoire, actions d’accueil et fidélisation des conducteurs et opérations job-dating « coups de poing » chez les transporteurs, promotion des métiers sur les divers forums Emplois/Orientation/ Carrières en tout point de la région, pour les rendre plus attractifs … les initiatives menées par les entreprises de transport routier de voyageurs d’Auvergne-Rhône-Alpes sont nombreuses.
En parallèle, la profession a fait de gros efforts sur la formation, avec ses partenaires.
En 2022, France Travail a délivré en 864 titres professionnels Conducteur de transport en commun sur route (urbain + interurbain), en hausse de 51% par rapport à 2021. Avec un taux de féminisation de 22%, la part de femmes dans cette formation est supérieure à la moyenne de la profession qui est de 19%.
En partenariat avec l’AFTRAL, la FNTV Auvergne-Rhône-Alpes a également développé l’offre de formation.
En 2023, elle a créé un le CAP C4A de Conducteur Agent d’Accueil en Autobus et Autocar qui a permis de former 32 jeunes. Il est enseigné sur le territoire en 4 lieux de formation à Bron (69), Pont-de-Chéruy (38), Chambéry (73) et Montélimar (26).
En 2024 et pour faire évoluer l’accès à la formation, 3 nouvelles formations en apprentissage ont vu le jour à Bourg-en-Bresse (01) et Saint-Quentin-Fallavier (38).
Taux d’insertion élevé : 6 mois après la fin de leur formation, 70% des sortants sont en emplois
La FNTV Auvergne-Rhône-Alpes sur le terrain
La FNTV Auvergne-Rhône-Alpes représente en région 217 entreprises et 12 229 salariés qui opèrent sur tous types de services : lignes régulières départementales et régionales, lignes scolaires, transports à la demande, services occasionnels, lignes nationales, tourisme...