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[Etude] Absentéisme et arrêt de travail

Sortir de la politique de l’autruche, de la calculette et du bâton.

Plusieurs études récemment publiées par des groupes d’assurance s’accordent sur une croissance inexorable de l’absentéisme au travail ! Les réactions politiques et syndicales sont vives.

Malheureusement, le débat se résume à la politique de l’autruche, de la calculette et du bâton. Christian Mainguy, consultant Senior global du cabinet Workplace Options, expert en QVCT (qualité de vie et des conditions de travail) pose la question de la pertinence de l'action au-delà des réflexes dogmatiques pour améliorer la santé des salariés.

Le cabinet Workplace Options publiait en juin 2023 la 6ème édition de son baromètre de l’absentéisme réalisé par BVA People Consulting auprès de 303 DRH et 1 500 salariés en mai 2023.

31% des arrêts de travail (hors maladies ordinaires) sont liés à des problématiques mentales dont 18% sont liés au travail.

28,6% d’augmentation du taux d’absentéisme depuis 2014.

58% des salariés ne posent pas d’arrêts alors que cela le nécessiterait (+14 points depuis 2019).

61% des DRH pensent que certains arrêts maladies ne sont pas justifiés par des raisons médicales.

51% des salariés déclarent avoir reçu un soutien de leur employeur à l’occasion de leur retour après un arrêt long, (+15 points depuis 2019).

Le coûts des arrêts de travail représente 18% de la masse salariale.

La politique de la calculatrice, avec le débat sur les délais de carences et la promesse hypothétique d’économies de plusieurs milliards. Or cette mesure incite les salariés à s’absenter plus longtemps pour compenser leur perte de revenus ou au contraire à renoncer à un arrêt de travail alors que leur situation médicale le nécessiterait, ce qui est déjà le cas de 58% des salariés, selon l’enquête « Regards croisés de DRH et de salariés sur l'absentéisme en entreprises. »

Ce surprésentéisme illustre qu’un arrêt de travail se traduit souvent par une perte de revenus et d’opportunité de carrière. Renforcer ce phénomène ne peut qu’aggraver la santé des salariés, et donc accroître l’absentéisme.

La politique du bâton, car, face à l’absentéisme, le réflexe reste pour beaucoup le renforcement des contrôles. S’il existe des abus, ceux-ci sont marginaux et la recette du contrôle a montré ses limites. Il n’est pas rare que des salariés en arrêt pour maladies longue durée soient contrôlés trois fois : par la sécurité sociale, leur entreprise et leur assureur. N’y a-t-il pas d’autres messages que la suspicion et la stigmatisation à apporter ?

La politique de l’autruche consiste à vouloir casser le thermomètre au lieu de s’intéresser aux causes de l’absentéisme. Les résultats de cette même étude* invitent à une réflexion prenant en compte la complexité et les transformations du monde du travail, au-delà du mirage de solutions simplistes.
En effet, pour plus d’un tiers des salariés arrêtés, l’arrêt de travail est imputable à l’organisation du travail, au management de l’entreprise.

Ces trois réflexes ne risquent pas de réduire l’inexorable montée des arrêts pour motif psychologique, devenus première cause d’arrêts, hors maladies ordinaires, et notamment de l’explosion des burnouts. L’étude CoviPrev indique que 24% des Français montrent des signes d’un état anxieux, soit 11 points de plus qu’avant le Covid.

Quant à la hausse de l’absentéisme chez les jeunes et les encadrants, elle illustre une plus grande exigence des salariés sur leurs conditions de travail car le marché du travail leur est plus favorable. Elle fait aussi écho à l’avis du CESE du 25 avril d’inscrire l'écoute des salariés parmi les principes généraux de prévention du code du travail. Les managers doivent notamment être mieux accompagnés et formés, face aux nouvelles formes de management (à distance, hybride, etc.).

De nombreux leviers existent pour réduire l’absentéisme à la racine. Une récente étude montre qu’instaurer un télétravail à la main du travailleur débouche sur un absentéisme plus faible que le télétravail systématisé sur des jours fixes, en raison de la trilogie confiance/ autonomie/responsabilité.

Ne conviendrait-il pas de s’inspirer de modèles qui ont montré leur succès à l’étranger ? Au Québec, les salariés peuvent se tourner vers des personnes de confiance, à l’intérieur de l’entreprise, pour évoquer leurs difficultés avec la ligne managériale et leurs besoins d’aménagement. Le modèle Néerlandais passe, lui, par une systématisation des accompagnements au retour à l’emploi. En Belgique, un parcours de réintégration des salariés est prescrit dès 6 semaines d’arrêts de travail.

De timides avancées sont aussi à signaler en France : le rendez-vous de liaison, introduit par la loi du 2 août 2021, a pour objectif de maintenir un lien entre l’employeur et le salarié pendant son arrêt et d’informer le salarié qu’il peut bénéficier d’actions de prévention de la désinsertion professionnelle. Ce dispositif aurait été utilisé dans 30% des arrêts de longue durée.

Ainsi, ce ne sont pas les solutions simplistes et les réflexes dogmatiques qui amélioreront la santé des salariés, mais des plans d’action visant à corriger les causes organisationnelles de l’absentéisme.

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