Gérard Bekerman, président de l’Afer, dénonce le projet
d’amendement contre le PERIN, qu’il juge juridiquement contestable,
économiquement contreproductif et fiscalement infondé
Quelques députés, sans
doute conscients de la précarité de leur mandat, multiplient, avant qu’il ne
soit trop tard, un amendement par-ci, un amendement par-là. En voici un nouveau
: l’amendement d’un député PS contre le PERIN. Cet amendement est funeste.
Pourquoi ?
En 2018, l’Afer avait
salué la création du PERIN, le Plan d’épargne individuel. Pour la première
fois, un ministre des Finances avait compris qu’en donnant la liberté aux
Français de sortir soit en rente soit en capital, ils n’en abuseraient pas.
Finis les sombres produits tunnel, PERP ou Madelin.
Vive la liberté ! Le
résultat, le voici : 7 millions de Français, la plupart des gens modestes et
soucieux de leurs vieux jours, ont souscrit un Perin. L’encours : 100
milliards d’euros... C’est cette réussite que notre député entend détruire.
Le PERIN a été conçu et
adopté sous forme de loi avec une promesse forte : un avantage fiscal à
l’entrée avec la déductibilité des versements dans les limites fiscales
classiques, puis une souplesse à la sortie en rente ou capital, après l’âge de
la retraite sans obligation de dénouement immédiat. Je pense que nos
constitutionnalistes ne seront pas insensibles au changement de la nature
économique du contrat.
Je ne suis pas persuadé que la place de cet amendement,
qui n’est pas fiscal mais contractuel, puisse relever d’une loi de finances.
Une modification d’un régime contractuel ne saurait affecter un contrat en
cours. Nos sages pourront le dire.
Ces députés, qui n’ont
pas toujours un grand amour pour les choses qui fonctionnent bien, évoquent une
« optimisation fiscale ». Cette « optimisation » est dans leur tête. La réalité
est tout autre. L’avantage fiscal à l’entrée constitue un simple différé de
taxation puisque le rachat ou la rente sont taxés.
Oser évoquer une
« opportunité d’optimisation fiscale massive consistant pour un détenteur du
PER de le conserver jusqu’à son décès » relève d’une parfaite indécence.
Bien sûr, il n’y a
alors pas d’impôts sur le revenu puisqu’il n’y a pas de revenus perçus, sauf à
ce que notre noble député aille les chercher sous terre.
Des millions de
Français ont raison d’avoir peur des régimes de base, qui répartissent pour
beaucoup de monde, mais qui ne répartissent maintenant que des miettes. On ne
peut en vivre dignement. Ces Français ont davantage fait confiance à eux-mêmes
pour épargner qu’à leurs élus de l’Assemblée qui convoitent le fruit de leur
travail. Laissons les épargnants tranquilles. Respectons leur liberté. Eux,
savent gérer leurs deniers comme ils l’entendent. Eux ne croulent pas sous des
dettes publiques entassées par ceux qui sont incapables de gérer les finances
de l’État et qui tentent de s’en prendre aux ressources privées. Nul ne connaît
sa date de décès. À la sortie du PERIN, l’assuré peut ne pas avoir liquidé son
contrat. Un autre assuré préfèrera le liquider à une date ultérieure.
Interdire la souplesse,
c’est punir la prévoyance. Être retraité n’est pas un point fixe dans la vie. La
nature de la vie est un horizon de risques : une dépendance tardive, des
dépenses de santé, des carrières irrégulières, des familles à charge. Je ne
sache qu’une chose certaine dans la retraite, c’est qu’elle est incertaine.
La décision publique
n’a pas vocation à contraindre les épargnants par une date de dénouement mais à
les accompagner pour faire face à des besoins souvent imprévus. Cet amendement
mine la confiance des Français dans l’épargne longue.
Le PERIN était conçu
pour durer parfois jusqu’à 30 ans. On entend bouleverser son statut en cours de
route. Comme si notre député, auteur de cet amendement, voulait s’en prendre au
code de la route en franchissant un feu rouge, un stop ou une ligne blanche. Il
est temps de lui enseigner le code d’une bonne conduite. On a posé avec le
PERIN des règles claires dans la durée. Cet amendement entend tout bouleverser
dans la précipitation, dans l’éclair de l’instabilité législative.
Qu’allez-vous proposer à ces salariés qui continuent de travailler après l’âge
légal de départ en retraite, à ces jeunes retraités qui ont recours au cumul
emploi-retraite pour vivre mieux et préserver leur pouvoir d’achat, à ces
médecins, ces chefs d’entreprises qui, eux aussi, continuent de travailler à 75
ans ? Dire aujourd’hui le contraire de ce qu’on a promis hier est une
indignité. À tous ces élus, disons : ayez au moins la dignité de réserver votre
sanction aux futurs souscripteurs.
L’Afer s’est battue, et a gagné, pour la liberté de sortir en capital. Elle continuera à se battre contre le diktat de sortir en capital. Oui, nous croyons en notre PER.


