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[Expertises] La maintenance des systèmes de ventilation, le maillon oublié de la performance énergétique

Avis d’expert par Julien Bodin, Cogérant de MVN, Expert en ventilation des bâtiments collectifs.

 

Un logement bien ventilé, c’est un logement plus sain, plus confortable et plus sobre en énergie. Un système de ventilation efficace passe par une maintenance assidue. Cependant, en France, en dehors des installations de VMC gaz, la maintenance des systèmes de ventilation ne fait l’objet d’aucune obligation réglementaire. La RE2020 impose en revanche une vérification à la réception des installations dans le neuf, sans calendrier d’entretien ultérieur obligatoire.

 

Un constat étonnant quand on connait les enjeux sanitaires et économiques qui y sont liés. Contrairement à d’autres domaines, pour lesquels des obligations d’entretien sont claires et normées, la ventilation repose uniquement sur des recommandations techniques, des pratiques hétérogènes et un suivi au bon vouloir des acteurs. Ce qui fait que même lorsqu’un contrat de maintenance existe, la maintenance effective demeure trop rare.

 

Un secteur fragilisé par son modèle économique

 

Aujourd’hui, un contrat de maintenance est souvent facturé à hauteur de quelques euros par logement : des montants insuffisants pour mobiliser correctement des techniciens sur tout le cycle (préparation, déplacements, interventions, suivi). Résultat : interventions bâclées ou non réalisées, et compensation par des marges sur pièces détachées.

 

Les effets sont documentés : baisses de débits de ventilation de l’ordre de plusieurs dizaines de pourcents, jusqu’à des chutes mesurées de 15 à 94% selon les contextes étudiés (encrassement, dérèglements, usages), avec à la clé condensation, moisissures, conduits obstrués et sinistres.

 

Dans la totalité des cas expertisés par MVN, l’absence ou la carence de maintenance était en cause.

 

De plus, les systèmes de ventilation sont initialement calibrés avec précision, mais l’usage de pièces génériques ou inadaptées, fréquent en maintenance, rend l’avis technique initial obsolète et dégrade la performance globale. Les entreprises de maintenance manquent d’une formation spécifique, ce qui entraine une confusion entre maintenance, dépannage, et entretien courant.

 

Maîtres d’ouvrage : le rôle clé du secteur

 

Heureusement, le secteur évolue. De plus en plus d’installateurs se positionnent aussi sur la maintenance, ce qui favorise une continuité de qualité entre pose et suivi. Mais cela reste marginal, car l’impulsion doit venir des maîtres d’ouvrage eux-mêmes.


Ce sont eux qui détiennent le levier d’action : en exigeant des contrats complets incluant formation, pièces détachées, indicateurs de performance, et engagements de résultats, ils peuvent changer la donne. Certains bailleurs ou collectivités l’ont compris : en intégrant la maintenance dans leur stratégie patrimoniale, ils sécurisent leur investissement sur 10 à 15 ans, tout en améliorant la qualité de l’air et le confort de leurs occupants.

 

Les maîtres d’ouvrages sont en train de le comprendre : préserver la qualité de l’air intérieur, ce n’est pas une option, c’est un enjeu sanitaire, social, économique et environnemental. C’est aussi une question de justice, car les populations les plus exposées à un air dégradé sont souvent les plus fragiles.

 

Pour une mobilisation collective, avant même la réglementation

 

Faut-il aller vers une obligation réglementaire ? Probablement, à terme. Mais avant d’attendre un décret, l’ensemble de l’écosystème peut déjà se mobiliser.

 

En effet, les fabricants jouent un rôle pédagogique important. Ils connaissent les installations, forment les professionnels et peuvent accompagner tous les maillons de la chaîne. Les entreprises de maintenance doivent quant à elles monter en compétence, comprendre les spécificités des systèmes installés, et intervenir avec une logique de performance. Et enfin, les maîtres d’ouvrage doivent exiger plus et mieux. Un contrat de maintenance ne doit pas se limiter à une visite annuelle sans vérification réelle.

 

Créer une culture de la maintenance, c’est à la fois simple et primordial. Il est regrettable d’investir dans un système de ventilation pour le laisser se dégrader. La qualité de l’air devrait même devenir un droit fondamental, celui de bien respirer chez soi. Cela imposerait naturellement des obligations renforcées,

y compris sur l’entretien.

 

Sortir de l’angle mort

 

Face aux projets de climatisation massive proposés dans l’urgence des canicules, il faut rappeler une évidence : la climatisation seule ne fait pas tout, pour être pleinement efficace, elle nécessite une ventilation adaptée. Ventiler, ce n’est pas refroidir l’air, c’est le renouveler, l’assainir et garantir un confort durable. Il est temps de sortir la maintenance de l’angle mort. Et de cesser de considérer la pérennité des installations comme un coût : c’est un investissement, du bon sens et surtout, une responsabilité.

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