L’avis tranché de
Sylvain Gruelles, maître d’œuvre et expert en rénovation.
Contexte : un marché
sous tension
Jamais devenir
propriétaire n’a semblé aussi compliqué.
Entre la flambée du
coût du neuf, la hausse des taux d’intérêt et la rareté des biens, de plus en
plus de Français se tournent vers une formule encore confidentielle : le “prêt
à finir”.
L’idée séduit : acheter
une maison inachevée, souvent hors d’eau / hors d’air, à prix réduit, puis
financer et piloter soi-même la suite des travaux.
Mais derrière la
promesse d’une économie rapide, les risques techniques, financiers et
juridiques sont nombreux.
Selon Sylvain Gruelles,
maître d’œuvre et expert en rénovation : « Un prêt à finir,
ce n’est pas un logement bon marché. C’est un chantier suspendu. Et si vous n’êtes pas
prêts à devenir chef d’orchestre, vous risquez de payer très cher une économie
illusoire. »
Derrière la promesse,
la réalité des chiffres
Achever une maison “à
finir” représente en moyenne 30% du coût total du projet.
Pour 100 m², cela
équivaut à 40 000 à 60 000€ de travaux supplémentaires, sans compter les
raccordements aux réseaux (jusqu’à 10 000€ selon le terrain).
« Des familles
achètent en pensant qu’il leur reste 15 000€ à investir.
Six mois plus tard,
elles découvrent qu’il manque encore 30 000€. Résultat : stress, dettes,
conflits
avec les artisans. », poursuit Sylvain Gruelles.
Trois zones rouges que
l’on ne vous dit pas
1. Qualité du bâti existant : défauts d’isolation, dalles non conformes, ponts thermiques…
les économies
s’envolent.
2. Sécurité juridique : la partie non
terminée n’est pas couverte par les garanties constructeur. L’acquéreur devient
responsable des malfaçons.
3. Coordination des
travaux :
sans pilotage, c’est l’anarchie. Retards, reprises d’ouvrages, surcoûts en
cascade.
Le rôle clé du maître
d’œuvre
Pour Sylvain Gruelles,
la différence entre réussite et échec tient à l’accompagnement :
« Un maître
d’œuvre, c’est l’assurance d’avoir quelqu’un qui défend vos intérêts, chiffre
précisément ce qu’il reste à faire et coordonne les artisans. C’est la seule façon
d’éviter que le rêve d’une maison devienne un cauchemar de chantier. »
Son intervention débute
avant l’achat : audit technique du bâti, évaluation du niveau de finition,
chiffrage des postes et marge de sécurité pour imprévus.
Ensuite, il orchestre
le chantier : sélection des entreprises, planification, contrôle qualité,
conformité thermique et électrique, sécurité juridique.
Une alternative
crédible… mais pas pour tous
Le prêt à finir peut
offrir 20 à 30% d’économie par rapport à une maison clé en main, tout en
permettant de choisir ses finitions.
Mais il ne convient
qu’à des acquéreurs solvables, organisés et prêts à s’impliquer.
« Le prêt à finir
n’est pas une solution miracle. Vouloir le présenter comme une réponse facile à
la crise du logement, c’est trompeur. Sans encadrement, c’est une bombe à
retardement.», Sylvain
Gruelles
Vers une nécessaire
régulation
Alors que le marché
immobilier cherche des solutions, le “prêt à finir” pourrait devenir une
tendance majeure.
Mais pour éviter les
dérives, Sylvain Gruelles appelle à un encadrement renforcé et à une meilleure
information des acquéreurs.
« Il ne faut pas diaboliser le prêt à finir, mais en dire la vérité. Ce n’est pas un raccourci, c’est un parcours. Et ce parcours doit être sécurisé de bout en bout. », Sylvain Gruelles


