Par Mario Bucciarelli, Fondateur de CoachingCore et créateur du programme
ASSO©
Pour
un changement de paradigme chez les dirigeants : passer du contrôle à
l’encouragement de dynamiques libérées
Il fut un
temps où ce qu’on appelait « la planification stratégique » suffisait à tenir
le cap. Où les modèles prédictifs offraient une illusion de maîtrise.
Ce temps
est révolu.
Nous évoluons désormais dans un environnement VUCA : Volatile, Incertain, Complexe, Ambigu. Cette situation est encore en train d’évoluer et les organisations expérimentent ce qu’on pourrait appeler un
« Hyper-VUCA », où les crises
sanitaires, climatiques, géopolitiques et technologiques se succèdent à une
vitesse telle que toute tentative de contrôle absolu devient vaine.
Pourtant,
beaucoup de dirigeants persistent à s’accrocher à des réflexes rassurants :
ajouter des comités, renforcer les procédures, multiplier les reportings.
Autrement dit, ils tentent de contrôler l’incontrôlable.
L’illusion
du contrôle, un piège mortel
Cette
obsession du contrôle est plus qu’une erreur : c’est un piège. Car à mesure que
les dirigeants verrouillent les processus, ils étranglent la capacité
d’adaptation de leurs équipes. Ils confondent rigueur avec rigidité, stratégie
avec planification figée, leadership avec domination.
Cela est
souvent dû à une approche non-systémique attentive plus aux performances
linéaires qu’aux dynamiques permettant de s’inscrire dans une réalité de
performance durable.
Résultat
: des
organisations saturées d’outils, mais incapables de produire de l’agilité. Des
dirigeants surinformés, mais coupés du sens profond. Des équipes épuisées, mais
sous-exploitées dans leur potentiel créatif.
Là où il
faudrait libérer l’énergie collective, trop de leaders continuent à la
contenir.
Le
nouveau leadership : de l’expérience en solitaire à l’émergence des modèles de
leadership partagé
Le défi
du XXIe siècle ne consiste plus à « savoir » ni à « prévoir », mais à
orchestrer.
Le rôle
du dirigeant n’est plus d’être celui qui tient seul la barre contre vents et
marées. Il est celui qui sait faire jouer ensemble des individualités parfois
divergentes, des talents complémentaires, pour produire une intelligence
collective supérieure à la somme des parties.
C’est le
passage du chef au chef d’orchestre.
Là où le
chef impose, le chef d’orchestre révèle. Là où le chef contrôle, le chef
d’orchestre synchronise. Là où le chef rassure par des certitudes, le chef
d’orchestre inspire par une vision et par une écoute profonde.
Transformer
la contrainte en levier
La
complexité n’est pas l’ennemie. Elle est une donnée irréductible du monde
actuel. La question n’est donc pas : « Comment la réduire ? » mais : «
Comment en faire un levier ? »
Les
entreprises qui réussiront ne seront pas celles qui auront tenté de simplifier
à outrance ou d’éliminer toute incertitude, mais celles qui auront appris à
danser avec elle.
Cela
demande d’accepter la vulnérabilité, de s’autoriser à ne pas tout contrôler, et
de replacer l’humain au cœur de la stratégie. Car c’est là que se trouve le
véritable moteur : dans les dynamiques émotionnelles, cognitives et
comportementales des équipes dirigeantes.
Passer
d’un vision « ressources humaines » où l’ensemble des collaborateurs est
interprété comme un réservoir de ressources à épuiser (en dépensant le moins
possible), à une vision « capital humain » où l’organisation investit sur le
capital représenté par les savoir-faire et les savoir-être des collaborateurs
et s’engage à les faire grandir dans une dynamique d’excellence basée sur
l’apprentissage continu.
Une
nouvelle responsabilité pour les leaders
Dans un
monde hyper-VUCA, la responsabilité des dirigeants ne se limite plus à délivrer
des résultats financiers. Elle est de créer les conditions d’un leadership
collectif, systémique et profondément humain.
Un
leadership qui ne se contente pas d’adapter l’organisation à l’incertitude,
mais qui la rend capable de s’épanouir dans l’incertitude.
Ce
changement de paradigme n’est pas une option : il est la condition même de la
pérennité des organisations.
En
conclusion, nous assistons à la fin d’un cycle : celui du leadership vertical,
du contrôle centralisé, du dirigeant omniscient.
Le futur
appartient aux leaders qui sauront libérer plutôt que contraindre, orchestrer
plutôt que contrôler, transformer la complexité en opportunité plutôt qu’en
menace.
Ce n’est pas seulement un enjeu de performance. C’est une question de survie.


