Par Sylvain Gruelles, maître d’œuvre
et expert en rénovation.
« La maison qu’on
voulait vendre 280 000€, on nous en proposait à peine 230 000€ à cause du DPE.
On a cru qu’on n’aurait pas le choix », racontent Sophie et Jean, propriétaires
dans l’Essonne.
Un scénario de plus en
plus courant : les passoires thermiques se bradent. Jusqu’à 20% de moins qu’un
bien équivalent rénové.
Sylvain Gruelles confirme : « Je le vois tous
les jours : des propriétaires qui pensent vendre vite pour éviter les
travaux, mais qui réalisent qu’ils perdent bien plus que ce que coûterait une
rénovation intelligente. »
Le piège des apparences
En surface, les prix
immobiliers semblent se stabiliser : +0,5% au 1ᵉʳ trimestre 2025, après un an
et demi de baisse. Mais la réalité est contrastée : « Dans les faits, un
appartement rénové se vend. Une maison mal classée se négocie brutalement.
C’est là que se fait la différence. »
Ce que les
propriétaires n’anticipent pas
Depuis le 1er janvier
2025, les logements classés G sont interdits à la location. Les F suivront en
2028.
« Je rencontre des bailleurs qui découvrent qu’ils ne peuvent plus
louer. C’est un choc. Mais avec un audit, on trouve souvent des solutions
réalistes pour regagner deux classes. »
Et le coût ? « Oui, les
matériaux sont chers. Le ciment a pris 40%, les tuiles 45%. Mais il faut
comparer : une décote à la revente, c’est parfois 50 000€.
Avec les aides –
éco-PTZ, CEE, bientôt MaPrimeRénov’ –, le reste à charge est bien moindre. »
Ce que les gens ne
savent pas
« 80% des devis que je
vois sont mal calibrés : on propose aux gens des pompes à chaleur sans isoler
d’abord. Résultat, des travaux inefficaces et une perte sèche. »
« Beaucoup de
propriétaires pensent qu’un petit rafraîchissement suffit. Mais un simple
changement de fenêtres ne fera jamais remonter une passoire de deux classes. »
Une vérité terrain
« Les banques refusent
encore trop souvent de financer les travaux si le plan n’est pas solide.
Un
client à Orléans s’est vu refuser un prêt parce qu’il ne présentait qu’un devis
vague.
Avec un vrai dossier, il a obtenu 40 000€ d’éco-PTZ. »
Un conseil
« Aujourd’hui, la pire
erreur est de vendre sans avoir fait au moins un audit énergétique. Vous perdez
d’office entre 15 et 20% du prix. »
Une autre façon de
vendre
L’idée de Sylvain
Gruelles :
arrêter d’opposer « vendre » et « rénover ». « Certains de mes clients
choisissent de rénover partiellement, ou même de préparer un dossier de travaux
pour l’acheteur. Ils joignent à leur annonce un audit, des devis, et les aides
mobilisables. Résultat : la négociation n’est plus sur le prix, mais sur un
projet. »
Une vision exclusive
« Ce que je vois
arriver ? Dans cinq ans, certains biens non rénovés ne trouveront tout
simplement plus preneur. Les propriétaires qui n’anticipent pas se retrouveront
avec un actif gelé. »
Le vrai tournant
Pour l’expert, nous
vivons une rupture :
« La valeur d’un logement ne se joue plus seulement sur l’adresse ou la
surface. Elle se joue sur sa performance énergétique. Dans cinq ans, une maison
non rénovée sera un actif toxique. C’est aujourd’hui qu’il faut choisir si on
subit… ou si on anticipe. »
Conclusion
La question n’est donc plus : vendre ou rénover ? Mais : comment transformer son logement pour qu’il garde de la valeur dans les années à venir ?


