L’analyse de Silvia Versiglia,
Directrice Legal Tech chez Orisha Real Estate.
L'année 2025 marque un
tournant décisif pour le secteur immobilier français. Entre l'interdiction
totale de location des logements classés G et l'évolution des critères du
diagnostic de performance énergétique (DPE), les nouvelles réglementations
transforment profondément les règles du jeu. Loin d'être de simples contraintes
administratives, ces normes renforcées constituent une véritable opportunité de
professionnalisation pour l'ensemble des acteurs du marché.
L'évolution
réglementaire : un cadre plus exigeant
La réglementation 2025
se caractérise par un durcissement significatif des obligations. L'interdiction
définitive de location des logements classés G au DPE, après celle des
logements G+ en vigueur depuis 2023, illustre cette montée en exigence. Cette
mesure concerne potentiellement 600 000 logements en France, créant un défi
majeur pour les propriétaires bailleurs.
Parallèlement,
l'invalidation des diagnostics DPE réalisés avant juillet 2021 impose de
nouveaux diagnostics pour de nombreux biens. Cette obligation s'accompagne
d'une adaptation des critères pour les petites surfaces (moins de 40 m²),
témoignant d'une volonté d'affiner les évaluations énergétiques.
Les annonces
immobilières doivent désormais afficher clairement la classe énergétique, avec
l'obligation de mentionner "logement à consommation énergétique
excessive" pour les biens classés F. Cette transparence renforcée modifie
les conditions de commercialisation et nécessite une expertise accrue des
professionnels.
La complexité comme
catalyseur d'expertise
Cette évolution
réglementaire génère une complexité croissante qui valorise naturellement le
rôle des professionnels qualifiés. Les propriétaires, confrontés à des
obligations techniques qu'ils maîtrisent mal, recherchent des conseils avisés
pour naviguer dans ce nouveau paysage normatif.
La profession d'agent
immobilier, déjà encadrée par la loi Hoguet de 1970 et renforcée par les
obligations de formation continue de la loi ALUR, trouve dans ces nouvelles
exigences une légitimité supplémentaire. Les 14 heures de formation annuelle
obligatoires pour le renouvellement de la carte professionnelle prennent tout
leur sens face à l'évolution permanente du cadre réglementaire.
Cette montée en
compétence s'avère indispensable : comprendre les subtilités du nouveau DPE,
anticiper les échéances d'interdiction de location, conseiller sur les travaux
de rénovation énergétique, maîtriser les nouvelles obligations d'affichage...
Autant de domaines qui exigent une expertise technique approfondie.
Des contraintes qui
créent de la valeur
Paradoxalement, chaque
nouvelle obligation réglementaire renforce la valeur ajoutée du professionnel
immobilier. Là où un particulier peut se sentir dépassé par la technicité
croissante des normes, l'agent immobilier formé et informé devient un guide indispensable.
Cette dynamique se
traduit par plusieurs évolutions positives pour la profession. D'abord, une
différenciation accrue entre professionnels et amateurs : la complexité
réglementaire constitue une barrière naturelle à l'entrée qui protège
l'activité des professionnels qualifiés. Ensuite, une valorisation du conseil :
face aux enjeux financiers liés à la non-conformité énergétique, les clients
sont prêts à rémunérer une expertise de qualité.
La réglementation 2025
encourage également la spécialisation. Les professionnels développent des
compétences pointues en rénovation énergétique, en diagnostic immobilier, ou en
accompagnement des copropriétés dans leur transition environnementale. Cette spécialisation
permet de justifier des honoraires plus élevés et de fidéliser une clientèle en
quête d'expertise.
Anticiper pour mieux
accompagner
Les professionnels les
plus avisés ne subissent pas ces évolutions réglementaires : ils les anticipent
et les transforment en avantages concurrentiels. Cela passe par une veille
réglementaire constante, des formations spécialisées et le développement d'outils
d'aide à la décision pour leurs clients.
L'accompagnement des
propriétaires dans leurs projets de rénovation énergétique devient ainsi un
nouveau métier au sein du métier. De même, l'expertise en montage de dossiers
d'aides publiques (MaPrimeRénov', éco-PTZ...) représente une compétence différenciante
très recherchée.
En conclusion, la
réglementation immobilière 2025 ne doit pas être perçue comme une contrainte
supplémentaire mais comme un formidable levier de professionnalisation. En
complexifiant l'environnement normatif, elle valorise l'expertise, justifie la
formation continue et légitime l'intervention de professionnels qualifiés.
Les acteurs du secteur qui sauront s'adapter à ces nouvelles exigences, en investissant dans leur formation et en développant leur expertise technique, sortiront renforcés de cette transition. Car derrière chaque nouvelle norme se cache une opportunité : celle de démontrer sa valeur ajoutée et de consolider sa position sur un marché en pleine mutation.


