Par Rebeca Rocha chez
Altospam.
Pendant des décennies,
la cybersécurité des organisations reposait sur une approche traditionnelle et
relativement simple : le périmètre de sécurité. Ce modèle consistait à protéger
un réseau interne considéré comme « sûr » et à en isoler les menaces extérieures.
Tout ce qui se trouvait à l’intérieur du périmètre était jugé fiable, tandis
que l’extérieur était perçu comme un environnement hostile. Cependant, cette
approche s’est révélée inefficace face aux nouvelles réalités du monde
numérique moderne. L’augmentation du télétravail, l’essor du cloud et
l’adoption de modèles d’infrastructures hybrides ont bouleversé ce périmètre.
Aujourd’hui, les cyberpirates exploitent de plus en plus des vulnérabilités au sein même des réseaux internes, notamment en s’attaquant aux identités et aux accès des utilisateurs. C’est précisément ce contexte qui a donné naissance à une nouvelle approche de la cybersécurité : le Zéro Trust.
Le Zéro Trust repose
sur un principe fondamental : ne jamais faire confiance, toujours vérifier
Contrairement aux
modèles traditionnels, il ne suppose aucune confiance par défaut, même pour les
utilisateurs internes et les ressources qui semblent légitimes. Chaque
tentative d’accès, qu’elle provienne de l’intérieur ou de l’extérieur du
réseau, est rigoureusement vérifiée et validée avant d’être autorisée.
Quels sont les piliers
fondamentaux du Zéro Trust ?
Le Zéro Trust repose
sur plusieurs concepts essentiels, qui permettent de garantir la sécurité des
ressources de manière plus dynamique et granulaire.
• Une authentification forte et
continue : L’authentification des utilisateurs ne se limite pas à un simple
mot de passe. Dans un environnement Zéro Trust, l’authentification multifacteur
(MFA) devient une norme, complétée par des méthodes telles que la biométrie ou
des tokens d’accès temporaires. De plus, l’authentification est réévaluée en
continu, ce qui permet de renforcer la sécurité en temps réel, même si un
utilisateur a déjà été vérifié au départ.
• Contrôle des accès basé sur le
moindre privilège : Chaque utilisateur ou appareil se voit attribuer des
permissions strictement nécessaires à l’accomplissement de ses tâches
spécifiques. Par exemple, un collaborateur d’un service financier n’a pas
besoin d’accéder aux ressources de l’équipe informatique. Cette approche réduit
les risques de compromission en cas de phishing, car les cyberpirates se
retrouvent limités dans leurs mouvements au sein du réseau.
• Segmentation du réseau et
micro-segmentation : Plutôt que d’offrir un accès global au réseau, le Zéro
Trust isole et contrôle chaque section, limitant l’impact d’une attaque en cas
de compromission.
• Surveillance et analyse continue : L’intelligence
artificielle (IA) et les systèmes de détection des anomalies jouent un rôle
majeur dans la mise en œuvre du Zéro Trust. Ces outils surveillent les
activités des utilisateurs et des appareils en temps réel, permettant
d’identifier des comportements suspects. Lorsqu’une anomalie est détectée, les
politiques de sécurité peuvent être ajustées immédiatement pour contrer la
menace.
• Protection des endpoints et du
cloud : Le Zéro Trust couvre les appareils utilisateurs et les services
cloud, garantissant une sécurité adaptative avant tout accès aux ressources de
l’entreprise.
Pourquoi faut-il
adopter cette approche aujourd’hui ?
Explosion des
cyberattaques
Les ransomwares, le
phishing ou les attaques par ingénierie sociale, exploitent souvent des
identifiants volés ou des accès insuffisamment sécurisés. Un modèle Zéro Trust
permet de limiter les risques associés à ces attaques en restreignant les
permissions des utilisateurs et en vérifiant continuellement leurs actions au
sein du réseau.
Télétravail et
infrastructures hybrides
De plus, le travail à
distance, amplifié par la pandémie, et l’adoption du cloud ont modifié la
manière dont les entreprises interagissent avec leurs ressources. Les équipes
n’accèdent plus à leurs applications depuis des réseaux internes sécurisés,
mais depuis des environnements externes, souvent depuis des terminaux
personnels. Le périmètre de sécurité classique, qui se concentrait sur la
protection d’un réseau interne, n’est plus suffisant dans ce contexte. Le Zéro
Trust permet de sécuriser l’accès aux ressources, quelle que soit la
localisation de l’utilisateur.
Réglementations et
conformité
Les réglementations en
matière de cybersécurité, telles que le RGPD, la norme ISO 27001 ou la
directive NIS2, imposent des exigences strictes en matière de protection des
données et de sécurité des infrastructures. Le Zéro Trust, avec son contrôle
d’accès rigoureux et sa surveillance continue, est un moyen efficace de se
conformer à ces normes tout en garantissant la confidentialité des informations
sensibles. En intégrant ces principes, les entreprises peuvent éviter des
sanctions coûteuses et renforcer leur position face aux auditeurs et aux
régulateurs.
Protection proactive
plutôt que réactive
Le Zéro Trust permet de
ne pas seulement réagir aux attaques, mais de les anticiper. En vérifiant
systématiquement l’identité et l’accès à chaque ressource, l’approche Zéro
Trust bloque proactivement toute activité suspecte avant qu’elle ne puisse
causer des dommages.
Comment mettre en place
une stratégie Zéro Trust ?
Adopter le Zero Trust
peut sembler intimidant, mais il est possible de procéder étape par étape pour
l’intégrer dans une organisation.
• Évaluer son niveau de sécurité
actuel : Avant d’implémenter le Zéro Trust, il est essentiel d’effectuer un
audit des systèmes existants. Cette étape permet d’identifier les
vulnérabilités actuelles et de comprendre les besoins spécifiques de sécurité.
• Implémenter l’authentification
forte : Le déploiement de l’authentification multifacteur (MFA) est une
priorité. Il convient également d’intégrer des solutions de gestion des
identités pour garantir l’accès sécurisé aux ressources.
• Restreindre les accès selon le
principe du moindre privilège : Définir des politiques d’accès claires et
strictes. Chaque utilisateur ou appareil ne doit disposer que des droits
nécessaires pour accomplir ses tâches spécifiques.
• Sécuriser l’accès aux données
locales : L’utilisation d’un VPN peut vous permettre de garantir un accès
sécurisé aux ressources de vos équipes, que ce soit sur site ou dans le cloud.
Cela réduit les risques liés aux connexions non sécurisées et empêche les
attaques par interception de données.
• Adopter une surveillance continue :
L’utilisation de solutions d’analyse comportementale et de détection des
menaces basées sur l’IA permet d’assurer une vigilance permanente et de
détecter toute activité anormale en temps réel.
• Sensibiliser les équipes : Il
est crucial de former les collaborateurs à la cybersécurité et aux principes du
Zéro Trust pour garantir une adoption fluide et une mise en œuvre efficace.
Une approche à manier
avec équilibre
Si le modèle Zéro Trust
renforce indéniablement la cybersécurité, il pose aussi des défis en matière
d’usabilité, notamment avec le chiffrement de bout en bout (E2EE). L’E2EE
consiste à chiffrer les données directement au niveau utilisateur, avant même leur
stockage dans le Cloud, garantissant une confidentialité totale.
Cependant, appliqué à
l’extrême, ce modèle peut rendre les données inutilisables (plus d’aperçu de
fichiers, plus de collaboration en temps réel, moins d’IA pour optimiser la
gestion des données…). Cela peut mener à une sur-sécurisation contre-productive,
où les utilisateurs contournent les règles en utilisant des solutions non
approuvées.
Plutôt que de supprimer totalement la confiance, optez pour une approche qui prône un équilibre entre sécurité et usabilité. Le Zéro Trust doit s’utiliser avec intelligence et pragmatisme.