Alors que les 2 et 3 avril, le Sénat vote la proposition de loi
visant à lutter contre les fraudes aux aides publiques, la CAPEB alerte sur une
faille majeure qui empêche une lutte efficace contre les fraudes et menace la
qualité des travaux de rénovation énergétique. Si la CAPEB partage certains
constats avec les grandes surfaces, elle met en lumière le véritable problème :
celui des sociétés commerciales opportunistes et fraudeuses qui opèrent sur le
marché et exploitent le système des aides à la rénovation.
Pour lutter
efficacement contre les fraudes, la CAPEB souhaite donc que la PPL en
discussion au Sénat soit amendée afin d’interdire l’accès de ce marché aidé par
des fonds publics aux sociétés commerciales intermédiaires qui prolifèrent
entre les particuliers et les entreprises du bâtiment. Une telle disposition
permettrait de sécuriser les aides publiques et de garantir que chaque euro
investi bénéficie réellement aux ménages et à la rénovation énergétique de leur
logement.
Les aides à la
rénovation énergétique : une politique publique menacée par les fraudes
MaPrimeRénov’ et les
Certificats d’économies d’énergie (CEE), éléments clés de la politique de
rénovation énergétique, sont la cible privilégiée des fraudeurs. En 2023, près
de 400 millions d’euros ont été détournés sur MaPrimeRénov’, et 480 millions
sur les CEE, selon Tracfin, le service de renseignement chargé de lutter contre
le blanchiment et la fraude. Malgré les actions positives engagées par les
gouvernements successifs, les détournements restent massifs, menacent une
politique publique essentielle pour la transition énergétique et fragilisent un
secteur déjà éprouvé.
Depuis 10 ans, la
prolifération des sociétés commerciales intermédiaires entre les particuliers
et les entreprises du bâtiment qualifiées RGE (Reconnu Garant de
l’Environnement) n'a pas soutenu l’activité de rénovation énergétique. Au
contraire, elle a favorisé l’industrialisation de fraudes par ces
intermédiaires sans compétences techniques, qui démarchent agressivement les
ménages, exploitent leur méconnaissance des aides et les appâtent avec des
promesses financières irréalistes (pompes à chaleur à 1 euro, etc.).
Finalement, c’est la confiance des particuliers et des professionnels du
bâtiment dans ces dispositifs d’aides qui ne cesse d’être atteinte.
Le rôle des
intermédiaires non qualifiés dans la fraude aux aides publiques
Les entreprises
commerciales intermédiaires ont accès à ce marché aidé par l’État uniquement
grâce à la capacité qui leur est offerte de sous-traiter les travaux à des
entreprises du bâtiment qui doivent être qualifiées RGE. Il est donc nécessaire
de fermer cet accès au marché de la rénovation énergétique aidé par des fonds
publics à ces sociétés dont la seule activité est le démarchage massif des
particuliers à travers des offres et des méthodes frauduleuses pour capter les
aides, notamment l’usurpation des identifiants RGE d’entreprises du bâtiment.
L’État a rendu
obligatoire, depuis le 1ᵉʳ janvier 2024, l’accompagnement du particulier par un
tiers de confiance dans son projet de rénovation énergétique à travers « Mon
Accompagnateur Rénov' ». Les sociétés intermédiaires sont donc parfaitement
inutiles.
Par ailleurs, le
développement du système d’intermédiation entraîne des conséquences directes
sur la qualité des travaux d’efficacité énergétique. Les sociétés sous-traitent
les chantiers à des artisans obligés de réaliser des travaux sous pression de
contraintes de temps et de coûts, souvent sans pouvoir choisir le matériel
adéquat. La qualité des travaux se dégrade donc, les malfaçons se multiplient,
et les particuliers sont massivement victimes de ces pratiques. Les artisans du
bâtiment respectueux des règles de l’art se retrouvent, eux, à pâtir d’une
mauvaise image, ce qui détériore la confiance des particuliers dans le secteur.
La CAPEB insiste sur un
point fondamental : c’est la compétence des entreprises du bâtiment qui doit
prévaloir. Il est impératif que toute entreprise facturant des travaux de
rénovation énergétique soit une entreprise du bâtiment disposant des compétences
et des qualifications requises, et les fraudes doivent être sévèrement
sanctionnées pour préserver la crédibilité de la politique de transition
énergétique. Plus de 55 000 entreprises du bâtiment, sur un potentiel de 500
000 entreprises artisanales, ont actuellement la qualification RGE et sont
pleinement engagées pour la rénovation énergétique de qualité.
Vers une législation
plus efficace pour sécuriser les aides et protéger les ménages
La proposition de loi
en discussion au Sénat pourrait devenir un levier puissant contre les fraudes
si elle est amendée dans le bon sens. Elle doit avant tout sécuriser les aides
publiques et garantir que chaque euro investi profite réellement aux ménages et
à la rénovation énergétique de leurs logements. Si les amendements nécessaires
sont apportés pour écarter de ce marché aidé les sociétés commerciales
intermédiaires opportunistes et fraudeuses, cela permettrait non seulement de
protéger les consommateurs, mais aussi de renforcer la transition énergétique
en accélérant la rénovation d’un parc immobilier vieillissant.
« Choisir les artisans du bâtiment, et la France en compte 500 000, c’est s’assurer de travaux de qualité et de la protection des particuliers. Nous appelons les sénateurs à interdire aux sociétés commerciales de sous-traiter à des entreprises RGE sur le marché aidé de la rénovation énergétique et à garantir que les entreprises principales de facturation soient exclusivement des entreprises du bâtiment. Il est temps de fermer la porte aux éco-délinquants pour ouvrir celles d'une rénovation énergétique efficace et accessible pour tous. », rappelle Jean-Christophe Repon, président de la CAPEB.