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Révolutionner le recrutement en évaluant (rapidement) vos candidats

Tribune d’Emeric Kubiak - Research Psychologist @Assessfirst

Les processus de recrutement sont trop longs : en France, la durée moyenne d’un recrutement est de 39 jours, et va en s’accroissant. Cette tendance est expliquée par le besoin de procéder à des évaluations fiables du potentiel d’un candidat, sur des postes changeants et de plus en plus complexes. L’erreur des décisionnaires RH est alors de multiplier les entretiens, au détriment d’analyses réellement explicatives de la réussite, comme les tests de raisonnement : les théories de l’évaluation basée sur le jeu permettent pourtant de révolutionner l’expérience des candidats.

Engagement par le jeu

Longtemps considérés comme inadaptés au recrutement, les tests cognitifs sont en plein renouveau, notamment grâce aux nouvelles technologies et à la gamification. Un groupe de chercheurs de l’Université de Madrid démontrent par exemple qu’il est possible d’extraire une mesure fiable de l’intelligence générale d’un individu lors de l’utilisation d’un jeu vidéo, et donc de prédire sa performance au travail. La plupart des personnes réfractaires à ce type d’évaluation expliqueront que les problèmes à résoudre dans ces jeux sont loin de la réalité future du candidat, et qu’il est donc inutile d’y prêter un intérêt : toutefois, comme l’explique Linda Gottfredson, professeure émérite à l’Université du Delaware, c’est surtout les fonctions cognitives mobilisées lors de ce genre d’exercice qui sont similaires à celles qui sont utilisées lors de l’activité de travail quotidienne.

Aussi, les modèles adaptatifs (CAT : Computer Adaptive Testing), qui sont régulièrement sollicités lors de la création de tests basés sur le jeu et qui permettent de proposer à chaque personne un test sur-mesure, optimisent l’expérience candidat grâce à deux avantages : la réduction drastique du temps de passation et la réduction de l’anxiété. En effet, en ayant accès à des exercices ou jeux qui sont adaptés à son niveau réel et à ses performances précédentes, chaque candidat a le sentiment d’être en situation de réussite. Les facteurs de motivation impliqués dans les jeux, comme par exemple l’immersion dans un scénario interactif, suscitent dès lors l'engagement des candidats.

Toutefois, même si ces conclusions paraissent flatteuses, tous les tests cognitifs sous format de jeu ne permettent pas d’évaluer les capacités de raisonnement d’un individu. Selon Tomas Chamorro Premuzic, professeur de psychologie à l’Université de Columbia, il existe une tension naturelle entre l’expérience candidat et la précision de la mesure : en conséquence, plus l’exercice est amusant, moins la mesure réalisée tend à être précise. Dans les processus de recrutement, il n’apparait donc pas pertinent de faire « jouer » les candidats, mais plutôt de leur proposer une expérience d’évaluation cognitive complexe, qui fait appel aux mêmes leviers de réponse et de motivation que ceux utilisés dans les jeux : construction de la réponse en plusieurs étapes, adaptation des items en fonction du niveau réel du candidat ou encore feedback en temps réel. De tels procédés permettent ainsi de dépoussiérer les évaluations traditionnelles, longues et ennuyeuses, tout en s’assurant de la valeur scientifique du questionnaire.


Des informations plus précises

Contrairement à des tests cognitifs classiques, les évaluations faisant appel aux théories du jeu ont l’avantage de donner accès à un plus grand nombre de données. Chaque action réalisée est en effet recueillie, permettant d’analyser avec précision la façon d’agir et les comportements d’apprentissage du candidat. Au-delà d’une simple évaluation des capacités de raisonnement, différents indicateurs de potentiels et facteurs de risques sont ainsi mesurables, parmi lesquels :

1) la gestion de la complexité, qui permet de savoir dans quelle mesure une personne peut prendre en considération la complexité de l’information présentée,

2) la vitesse de décision, qui indique la capacité d’une personne à décider dans l’urgence,

3) la précision, qui renseigne sur la qualité des décisions,

4) la précipitation, qui reflète la tendance à faire des erreurs en prenant des décisions trop rapidement,

5) le niveau de prudence dont le candidat fait preuve dans ses réponses,

6) la propension à prendre des décisions inexactes à cause d’erreurs d’analyse, ou encore,

7) l’indécision, qui correspond à la tendance d’un candidat à ne pas prendre position.

Traitées de manière instantanée par les algorithmes, ces informations permettent d’anticiper de manière plus efficace l’adéquation d’un candidat aux exigences d’un poste. Alors que les recruteurs font trop souvent l’erreur de privilégier le parcours scolaire, les entretiens ou les référentiels de compétences pour supposer des capacités intellectuelles, les tests cognitifs gamifiés semblent être une nécessité pour améliorer la qualité des démarches de recrutement et limiter leur durée : en effet, là où la planification d’un entretien ajoute environ 5 jours au processus global, les tests cognitifs permettent d’obtenir une mesure précise en…10 minutes.


Une meilleure accessibilité

Intégrer ce format d’évaluation cognitive dans les politiques RH permet par ailleurs d’ouvrir les recrutements au plus grand nombre, grâce à une accessibilité accrue.

D’une part, à l’heure où plus de la moitié des candidats postulent directement avec leur smartphone, ce type d’outils semble particulièrement adapté : souvent pensés et conçus pour les mobiles, ils répondent aux exigences modernes des candidats en termes de facilité d’accès et d’utilisation.

D’autre part, même s’il serait facile de penser l’inverse, toutes les générations y trouvent une certaine satisfaction : Lennart Nacke, Anne Nacke et Craig Lindley, chercheurs en expérience utilisateur à l’Université de Waterloo et à l’Organisation de recherche scientifique du Commonwealth, démontrent ainsi que les exercices cognitifs sous forme de jeux apparaissent plus stimulants, quel que soit l’âge de l’utilisateur. Enfin, en limitant les éléments verbaux ou numériques lors de la passation, ces formats de tests sont accessibles aux personnes qui présentent un handicap, comme la dyslexie : leur construction permet ainsi de respecter les réglementations en termes de non-discrimination lors de la sélection, tout en s’assurant d’une mesure fiable des capacités cognitives.

L’intégration de certains principes liés au jeu dans les évaluations cognitives permet aujourd’hui d’associer validité psychométrique et optimisation de l’expérience candidat.

L’utilisation de ces nouveaux formats de tests réduit ainsi considérablement les délais de recrutement, et préserve l’engagement des candidats tout au long du processus.

Face à la complexité grandissante des recrutements, les managers ont donc tout intérêt à s’appuyer sur ce type d’analyses non-biaisées, pour prendre des décisions sûres et pérennes.

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