Par Loïc Cantin, président de la FNAIM
Il y a un
moment où un pays doit arrêter de se raconter des histoires. En matière de
logement, ce moment est arrivé. Depuis trop longtemps, nous assistons à une
succession de diagnostics sans décisions, d’indignations sans solutions, de
discours qui masquent mal une réalité que chacun vit au quotidien : la France
ne parvient plus à loger les Français.
Dans ce
vacarme, certains voudraient faire croire que le problème vient des
propriétaires, d’autres qu’il suffit d’un décret ou d’une taxe pour débloquer
des années d’immobilisme. Tout cela est faux, terriblement faux. Le logement
n’est pas un champ de bataille. C’est un bien vital. Et quand un bien vital se
dérègle, il faut du courage, pas des postures.
Le
courage, d’abord, de regarder la situation en face : locataires et
propriétaires ne sont pas des adversaires. Ils sont les deux faces d’un même
besoin, celui d’un toit digne et stable. Le locataire n’est pas un éternel
dépendant ; il est un citoyen qui porte souvent sur ses épaules la fragilité
économique que notre époque impose. Beaucoup rêvent de devenir propriétaires,
non par vanité, mais pour s’extraire d’une incertitude qui dure depuis trop
longtemps. Leur rendre cette perspective n’est pas un luxe : c’est un devoir.
Le
propriétaire, quant à lui, n’est pas un spéculateur à abattre. C’est celui qui
entretient, rénove, loue, prend le risque que l’État refuse d’assumer. À chaque
fois qu’on le décourage, c’est un logement qui disparaît. À chaque fois qu’on
le stigmatise, c’est un locataire qui en paie le prix. Voilà la vérité que
beaucoup s’acharnent à contourner : on ne protège jamais un locataire en
affaiblissant un propriétaire. On ne protège pas un propriétaire en oubliant un
locataire.
Ce qu’il
faut, c’est reconstruire un pacte. Un pacte où le propriétaire retrouve la
stabilité qui lui permet d’investir, et où le locataire retrouve l’espoir de
franchir, un jour, le seuil de la propriété. Un pacte où l’État accompagne au
lieu d’accabler, où les règles cessent de changer au gré des polémiques, où la
rénovation ne devient pas une punition mais un mouvement collectif.
Car oui,
le marché envoie aujourd’hui un signal que nous n’avions plus vu depuis des
années. Les prix se stabilisent, les transactions repartent, les taux se
détendent. Le pays tient un moment rare : la possibilité d’un redémarrage. Mais
ce moment n’attendra pas. L’histoire est pleine d’occasions manquées ;
n’ajoutons pas le logement à la liste.
Il faut
du courage pour dire cela.
Le
courage d’admettre que l’on ne répare pas un marché en opposant ceux qui le
font vivre.
Le
courage de reconnaître que le propriétaire n’est pas un coupable commode, et
que le locataire n’est pas un pion à déplacer.
Le
courage, surtout, de mettre fin au confort des discours pour entrer enfin dans
celui des décisions.
Le
logement n’a pas besoin d’une énième promesse.
Il n’a
pas besoin de slogans ni de symboles.
Il a
besoin d’un pays qui se redresse et qui agit.
D’un État
qui cesse d’osciller et qui assume.
D’une
politique qui rassemble au lieu de diviser.
Il a
besoin de courage.
Et le courage, c’est maintenant.


