Analyse réalisée par
Milleis Banque Privée sur les enjeux juridiques, fiscaux et patrimoniaux liés à
l’acquisition et à la location d’une résidence secondaire.
Les vacances sont un
moment propice pour s’évader. Maison de campagne, pied-à-terre côté mer ou
montagne, la résidence secondaire fait rêver de nombreux français et pour
beaucoup, elle a une réelle valeur affective lorsqu’elle se transmet de
génération en génération.
Pour autant, de
nombreuses questions juridiques et fiscales sont à se poser lorsqu’on envisage
d’acquérir une résidence secondaire, voire de la louer lorsqu’elle est
inoccupée.
Véritable coup de cœur
ou s’inscrivant dans une stratégie patrimoniale plus globale, l’acquisition
d’une résidence secondaire est un acte à ne pas prendre à la légère car elle
engendre souvent des coûts non négligeables et n’offre aucun avantage fiscal spécifique.
Outre le prix de vente,
le coût du crédit, les taxes foncières et d’habitation (souvent majorées en
zone tendue), l’assurance, l’entretien, les charges de copropriété voire
l’impact sur l’impôt sur la fortune immobilière viennent grever le budget.
De facto, acquérir une
résidence secondaire doit être mûrement réfléchie.
Afin de compenser les
dépenses engendrées, de nombreux ménages se tournent vers la location meublée
saisonnière pour générer des revenus lors des périodes où ils n’occupent pas
leur bien et ce, sans les contraintes d’une location à long terme.
Dans certaines
situations, les revenus générés sont supérieurs aux charges et permettent même
de se constituer un supplément de revenus.
Flexibilité et
perspective de gain sont autant d’atouts que les propriétaires d’une résidence
secondaire ont également bien intégrés, participant au boom des locations
saisonnières touristiques depuis une dizaine d’années, facilité il est vrai,
par le développement des plateformes numériques.
Corrélativement, la
pénurie d’offres de résidences principales n’a cessé de croître, notamment en
zone touristique ou tendue, incitant collectivités locales et législateur à
prendre des mesures pour minorer l’intérêt fiscal des locations meublées
saisonnières et encadrer drastiquement ces locations (durée de location
limitée, autorisation à solliciter à la mairie, éventuel changement d’usage
etc.).
Aussi, avant toute mise
en location saisonnière, il faudra donc accomplir un ensemble de formalités et
s’assurer en premier lieu, pour les appartements, que le règlement de
copropriété autorise le meublé de tourisme.
A titre d’exemple, une
clause « d'habitation exclusivement bourgeoise » interdira la location meublée.
Acquérir sa résidence
secondaire en direct ou en SCI ?
1/ Acquisition en
direct
Détenir une résidence
secondaire a pour finalité première la jouissance du bien, de facto,
l’acquisition en direct reste le mode d’acquisition privilégié.
Le bien est utilisé
pendant les week-ends ou vacances et parfois loué en meublé saisonnier pendant
quelques semaines. L'achat en direct est le plus simple. Il n’y a pas de
société à créer, donc sans aucun formalisme particulier à prévoir, ni coût à
supporter. Cependant, en cas de décès, l’un des inconvénients majeurs d’une
acquisition en direct, par rapport à l’acquisition via une SCI, est que les
héritiers se retrouveront propriétaires indivis de la résidence secondaire. Une
indivision est contraignante, car toutes les décisions doivent être prises de
façon collégiale.
Quelle fiscalité alors
pour les revenus tirés de la location saisonnière ?
Même si votre résidence
secondaire n’est louée que quelques jours par an, les recettes perçues à ce
titre seront à déclarer au titre de l’impôt sur le revenu et des prélèvements
sociaux (voire aux cotisations sociales le cas échéant).
Si la location
saisonnière est confiée à une plateforme, cette dernière communiquera à
l’administration fiscale les revenus versés à ce titre.
En préambule et dès le
début de votre activité, il vous faudra la déclarer et réaliser des démarches :
• Déclaration
d’activité au guichet unique (pour obtenir un numéro SIREN) réalisée par le
loueur ou par la plateforme numérique via laquelle est loué le bien.
• La déclaration auprès
de la mairie de la commune où est situé le bien (cerfa 14004*02), pour les
communes de plus de 200 000 habitants ou celles ayant instauré l’autorisation
préalable. Cet enregistrement peut être réalisé en ligne (télédéclaration).
Un accusé-réception est
délivré et comprend un numéro d’enregistrement, numéro qui doit apparaître dans
l’annonce ou l’offre de location.
A compter d’une date
ultérieurement fixée par décret (et au plus tard le 20 mai 2026), toute
location touristique devra faire l'objet d'une déclaration préalable
d'enregistrement auprès d’un téléservice national.
À partir de 2025, les
communes pourront limiter à 90 jours par an la durée maximum pendant laquelle
les résidences principales peuvent être louées à des touristes (au lieu de 120
jours aujourd'hui). Une amende civile de 15 000€ pourra être appliquée en cas
de dépassement du nombre de jours de location autorisé sur la commune.
Quant à la fiscalité,
c’est le régime fiscal de la location meublée non professionnelle (LMNP) qui
aura vocation à s’appliquer.
L’activité de location
meublée, qu’elle soit saisonnière ou non, est considérée sur le plan fiscal
comme une activité commerciale. Aussi, les revenus générés par la location
saisonnière ne sont pas des revenus fonciers mais des bénéfices industriels et
commerciaux (BIC) taxés à ce titre à l’impôt sur le revenu.
Impôt sur le revenu
Il existe deux régimes
d’imposition :
• Le régime du micro-BIC ou régime forfaitaire qui s’applique de plein droit Ce régime est très simple : pour les loyers encaissés à partir de 2025 (et donc imposés en 2026), un abattement fiscal forfaitaire de 30 % est appliqué automatiquement sur le montant brut des recettes perçues à condition qu’elles n’excèdent pas 15 000€. Cet abattement s’élève à 50% si votre bien est classé en meublé touristique avec une limite à 77 700€. En pratique, vous n’aurez qu’à renseigner les revenus de la location saisonnière sur une annexe de la déclaration de revenus : le formulaire 2042 C pro. En définitive, le revenu imposable sera le montant des recettes brutes diminué de l’abattement forfaitaire.
• Le régime réel
d’imposition
Il s’applique soit sur option, soit automatiquement si les recettes issues de
la location saisonnière excèdent 15 000€ ou 77 700€ pour les immeubles classés.
Attention les seuils sont réajustés pour les activités commençant en cours
d’année. Le régime réel permet de déduire de vos recettes annuelles l’ensemble
des frais et charges engagés. Au regard de l’abattement forfaitaire existant
dans le régime du micro-BIC, il n’est intéressant que si l’ensemble des charges
de propriété, locatives et de gestion réelle excède 30 ou 50% pour le meublé
touristique classé.
Point d'attention
Remarques sur la taxe
de séjours et sur l’impôt sur la fortune immobilière (IFI) : Attention, en location
de courte durée, les locataires doivent s’acquitter de la taxe de séjour.
Toutefois, si vous passez par une plateforme de réservation comme Airbnb, cette
taxe sera récupérée directement par la plateforme. De plus, si votre patrimoine
immobilier est important, il se peut également que vous soyez assujetti au
paiement de l’IFI car les biens mis en location sont également inclus dans le
calcul de celle-ci.
Les intérêts d’emprunt
et l’amortissement sont déductibles au prorata de la durée globale des
locations saisonnières. Ce régime suppose donc de tenir une comptabilité. L'option
pour le régime réel doit être exercée au plus tard à la date limite de dépôt de
la déclaration d'ensemble des revenus. La période de validité de l'option est
fixée à un an. L'option est reconduite tacitement chaque année pour un an, tant
que l’option s’applique.
Remarque : donation de
la nue-propriété du bien immobilier et amortissement
L’usufruitier, qui
perçoit les revenus du bien immobilier n’est plus titulaire que d’un droit
d’occupation ou d’un droit au revenu et n’est plus le véritable propriétaire. A
ce titre, il ne peut plus amortir la pleine propriété du bien mais pourra, en
revanche, amortir la valeur de l’usufruit viager (point confirmé par un arrêt
du 24 avril 2019 du Conseil d’Etat n° 419912). Il est également possible de
déterminer une durée d’amortissement, soit égale à la durée du démembrement en
cas d’opération à durée déterminée, soit calculée selon les données
statistiques d’espérance de vie de l’INSEE quand le démembrement est viager.
La valeur d’usufruit
étant inférieure à la valeur globale de l’immeuble, dans ce contexte précis.
A contrario, dans le
régime micro BIC, le démembrement n’a aucune incidence sur le taux de
l’abattement.
Prélèvements sociaux et
cotisations sociales
Les revenus issus de la
location saisonnière sont soumis aux prélèvements sociaux au taux de 17,20%.
Dans l’hypothèse où ils excéderaient 23 000 €, ils seraient alors soumis aux
cotisations sociales (dont le taux varie entre 20 % et 43 %). Il faudra veiller
à indiquer sur la déclaration de revenus le montant des recettes concernées. Ce
point sera à étudier en amont notamment si vous exercez par ailleurs une
activité non salariée. Vous pourriez également être assujetti à la contribution
économique territoriale (CET).
Dans l’hypothèse d’une
revente, c’est la plus-value des particuliers qui s’appliquera, laquelle sera
donc taxable à l’impôt sur le revenu au taux forfaitaire de 19 % auquel
s’ajoutent les prélèvements sociaux de 17,20%. Dans le cadre du régime réel
d’imposition, les amortissements déduits pendant la période de location meublée
saisonnière sont pris en compte dans le calcul de la plus-value immobilière,
ils minorent le prix d’acquisition du bien.
Les abattements pour durée de détention restent toutefois applicables (exonération totale au-delà de
30 ans de détention) – report vers les chiffres clés de la fiscalité et du
guide fiscal 2025.
2/ Acquisition par une
Société civile immobilière (SCI)
Dans une optique de
facilité de gestion lorsque l’acquisition se fait à plusieurs ou dans une
réflexion de transmission du patrimoine, choisir la SCI peut se révéler être
une solution intéressante, sous réserve d’avoir bien intégré ses avantages et
inconvénients.
Créer une SCI pour
acheter un appartement permet aux associés de faciliter la transmission
ultérieure du bien immobilier. La SCI permet d’anticiper la succession. La
création d’une SCI familiale est généralement préconisée pour éviter la
détention d’un bien immobilier en direct, sous forme d’indivision. De plus,
l’achat d’un bien en SCI familiale permet à des parents d’impliquer leurs
enfants dans la construction de leur projet d’investissement immobilier.
S’il est aisé de créer
une SCI, les démarches administratives restent parfois contraignantes tant pour
la création que pour la gestion. En outre, la constitution d’une SCI nécessite
la rédaction de statuts appropriés à chaque situation personnelle avec une
attention toute particulière souhaitable quant à la rédaction de l’objet
social, des agréments pour les futures cessions de parts et la gérance. De
même, il convient d’organiser chaque année une assemblée générale et de tenir
une comptabilité.
La responsabilité des
associés étant indéfinie dans ce type de structure, le patrimoine personnel de
chacun est engagé au prorata de sa participation au capital social. Par
conséquent, chaque associé devra contribuer au remboursement des éventuelles
dettes contractées par la SCI, en fonction du nombre de parts détenues.
En SCI, la résidence
secondaire peut être mise gratuitement à disposition des associés si les
statuts le prévoient ou être proposée à la location saisonnière. Sauf option
pour l’impôt sur les sociétés (IS), la mise à disposition gratuite du bien
détenu par la société pour la jouissance personnelle des associés n’entrainera
aucune conséquence fiscale.
En revanche, la
location saisonnière pourrait s’avérer plus problématique fiscalement.
En effet, si la
location d’un bien immobilier est une activité civile sur le plan juridique, la
location en meublée doit être regardée comme l’exercice d’une activité
commerciale au sens fiscal, entrainant une imposition de plein droit à l’IS.
L’imposition à l’IS
permet pour la société d’amortir le bien et d’être imposée sur une base plus
faible au taux de 15% jusqu’à 42 500 € de recettes et 25% au-delà.
En revanche, pour appréhender les revenus issus de la location, il faudra non seulement que le résultat comptable de la société soit positif, mais également le verser sous forme de dividendes aux associés qui devront alors s’acquitter de la fiscalité sur ces revenus (flat tax au taux de 30% ou option pour le barème progressif de l’impôt + prélèvements sociaux).
Par ailleurs la
plus-value susceptible d’être générée lors de la revente du bien par la SCI
relève du régime de la plus-value professionnelle. Celle-ci est alors calculée
en tenant compte des amortissements pratiqués et sans que puisse être appliqué
un abattement pour durée de détention.
Dans cette hypothèse,
si l’immeuble est totalement amorti, la plus-value taxable à l’IS correspond au
prix de cession de l’immeuble.
Par ailleurs,
l’utilisation de la résidence secondaire par un associé est susceptible d’être
qualifiée d’un avantage en nature taxable dans la catégorie des revenus de
capitaux mobiliers. De son côté, la SCI à l’IS devrait faire l’objet d’une
taxation sur le montant théorique des revenus qu’elle aurait dû percevoir à ce
titre.
Acquérir en SCI peut présenter des risques lorsque les associés envisagent même ponctuellement de louer la résidence secondaire quelques semaines par an.


