Les ressources humaines ont un rôle crucial à jouer pour insuffler une culture d’entreprise propice à la transition écologique jusqu’à l’échelle des salariés.
Une étude de Pascal Paillé, chercheur à NEOMA, met en lumière les
leviers à actionner pour engager les personnels dans des comportements
écoresponsables au travail.
La
transition écologique des entreprises n’est plus une option. D’ailleurs, 78%
des salariés choisiraient, à offres équivalentes, une entreprise engagée dans
la transition écologique. Attirer et fidéliser les talents passe donc par une
stratégie écologique crédible. Mais comment opérer ces changements en
profondeur ?
C’est
là que les ressources humaines (RH) entrent en jeu. Car il ne s’agit pas que de
revoir ses processus ou de verdir ses produits. Pour transformer durablement
une organisation, il faut embarquer les salariés et ancrer l’écologie dans la
culture d’entreprise.
Par
quels moyens ? La formation est souvent présentée comme le levier numéro un. 86%
des entreprises déclarent d’ailleurs sensibiliser leurs salariés aux enjeux
environnementaux. Mais est-ce suffisant ? L’étude menée par le chercheur de
NEOMA et ses collègues dévoile que la formation seule ne constitue pas un
levier aussi puissant que l’on pourrait le croire.
Former
ne suffit plus
Contrairement
à ce que des recherches antérieures affirmaient, cette nouvelle étude montre
que la formation verte n'est pas une condition sine qua non pour engager des
employés dans des comportements durables. En effet, il ne suffit pas de
connaître les enjeux pour avoir envie d’agir. La formation n’est pas pour
autant inutile. Au contraire, les chercheurs supposent que son importance varie
selon le niveau d'engagement environnemental d’une organisation. Autrement dit,
une entreprise qui débute dans la gestion verte pourrait d'abord miser sur la
formation, tandis qu'une entreprise plus avancée pourrait privilégier d'autres
leviers.
Alors,
quels sont ces leviers ?
Les
chercheurs insistent sur trois dimensions : la capacité, la motivation et
l’opportunité. La capacité, c’est donner aux salariés les moyens d’agir.
Concrètement, cela peut passer par des formations sur des pratiques écologiques
précises, telles que la sobriété numérique, ou des outils, comme des calculateurs
d’empreinte carbone. La motivation, elle, vise à créer un véritable engagement
des salariés. Organiser des défis écologiques ou des projets participatifs
comme la plantation d’arbres peut être un bon moyen de stimuler cet engagement.
Enfin, l’opportunité repose sur la mise en place d’infrastructures favorables.
Bornes de recharge, primes pour les trajets à vélo ou en transports en commun,
plateformes pour que les salariés expriment leurs idées… Ces conditions
permettent aux collaborateurs de mettre en œuvre concrètement ce qu’ils ont
appris et souhaitent appliquer. Reste à savoir quels leviers privilégier et
actionner.
Quels
leviers pour quels résultats ?
Les
chercheurs sont catégoriques : il n’est pas nécessaire de jouer sur tous les
tableaux pour observer des effets positifs. Des actions touchant à la
motivation, comme les récompenses et rémunérations, et le soutien de la
direction, comme les leviers d’opportunités, sont particulièrement efficaces,
ensemble ou séparément. La formation n’est quant à elle pas essentielle.
Par
ailleurs, il n’existe pas de recette universelle. Chaque organisation doit
adapter ses leviers aux spécificités de son secteur, de sa taille et de son
niveau de maturité écologique. Une même entreprise peut également emprunter
plusieurs chemins pour susciter des comportements écoresponsables selon les
différents profils de ses salariés. L’enjeu est de s’engager sur une démarche
cohérente et personnalisable, qui permette à chacun de s’impliquer à son
échelle.
L’engagement
des employés, une dynamique qui transforme les pratiques RH
Loin de
rester un simple effet de mode ou un discours des services de responsabilité
sociétale des entreprises (RSE), la transition écologique est également de plus
en plus portée par les salariés eux-mêmes. Cela souligne l’importance des
leviers RH susmentionnés. Les entreprises disposant d’équipes déjà engagées
écologiquement ont intérêt à miser sur la co-construction d’un plan de
transition avec leurs collaborateurs, à la manière d’une opportunité. En effet,
l’implication durable des salariés ne repose pas uniquement sur une série de
mesures incitatives comme la formation aux écogestes, par exemple éteindre
l’ordinateur ou trier les déchets, mais sur des mesures qui prennent en compte
leur avis.
L’un des principaux défis pour les ressources humaines sera donc de réussir à coordonner cette dynamique individuelle avec les objectifs globaux de l’entreprise, ce qui pourrait impliquer une remise en question des modes traditionnels de gestion. Les salariés, souvent relégués au rôle de simples exécutants des politiques écologiques décidées en haut lieu, seront désormais des parties prenantes au changement.