En France, plus de la moitié des accidents de travail mortels reconnus dans les entreprises relevant du régime général de la Sécurité sociale sont des malaises sans cause externe identifiée. L’Institut national de recherche et de sécurité (INRS) pour la prévention de accidents du travail et des maladies professionnelles, délivre une analyse qualitative de ces malaises survenus entre 2012 et 2022.
Réalisée à
partir des données collectées dans la base nationale EPICEA, elle vise à mieux
qualifier ces malaises, comprendre et identifier leurs causes afin d’améliorer leur
prévention en entreprise.
En 2021, 645 accidents
de travail mortels ont été enregistrés dans les entreprises relevant du régime
général de la Sécurité sociale. 56% d’entre eux sont qualifiés de malaises
mortels. Ces derniers sont définis comme des décès survenus sur le lieu de travail
ou à l’occasion du travail, sans cause externe identifiée (chute, choc,
intoxication ou électrocution…). Ces chiffres rendent nécessaire une meilleure
prévention de ces malaises mortels en entreprise.
Une étude privilégiant
le recours à la base nationale EPICEA
Dans le cadre de son
étude, l’INRS a cherché à mieux qualifier ces malaises mortels et identifier
leurs causes pour mieux les prévenir. L’Institut a donc décidé d’aborder la
question sous un angle qualitatif, en exploitant les récits d’accidents et
recommandations de prévention associées, disponibles dans la base de données
EPICEA (Étude de prévention par l’informatisation des comptes rendus
d’accidents).
« Cette méthode
présente aussi comme intérêt de permettre d’agir pour améliorer la culture de
prévention et ses différentes composantes en milieu professionnel », précise le Dr Philippe
Hache, expert d’assistance médicale à l’INRS, et l’un des auteurs de l’étude.
L’INRS a ainsi exploité les données de la base EPICEA en sélectionnant 25 variables spécifiques (entreprise, victime, accident…), et en incluant dans son analyse les dossiers contenant les termes
« malaise » et degré de gravité « mortel ».
Sur les 1 403 accidents
mortels recensés par la base EPICEA de 2012 à 2022, 143 sont des malaises
mortels et font l’objet de cette étude.
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EPICEA
- Alimentée par les services prévention des Caisses régionales
(Carsat/Cramif/CGSS) de l’Assurance maladie – Risques professionnels, la base
EPICEA regroupe, à ce jour, plus de 26 000 accidents du travail graves, mortels
ou plus particulièrement intéressants pour la prévention, décrits chacun au
moyen de 81 variables et d’un récit anonymisé.
Comme tous les
accidents mortels n’y sont pas systématiquement enregistrés, cela rend
difficile une exploitation purement quantitative. Cependant, le grand nombre de
cas répertoriés confère à cette base une représentativité certaine.
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Malaises mortels au
travail entre 2012 et 2022 : principaux constats de l’étude
93% des victimes de
malaises mortels en milieu professionnel sont des hommes.
L’âge médian de
survenue du décès est de 51 ans. Parmi les tranches d’âge les plus concernées,
on retrouve notamment les 40-49 ans et les 50-59 ans.
Si plusieurs dizaines
de métiers sont recensés dans l’étude, les 3 métiers les plus représentés sont
ceux de conducteurs de poids lourds et de camions (près de 20% des cas),
professionnels qualifiés du bâtiment (gros œuvre) et assimilés, électriciens du
bâtiment et assimilés.
L’activité du
travailleur est décrite comme habituelle (82% des cas). Dans 3 cas sur quatre,
la victime se trouve seule au moment de la survenue du malaise mortel au
travail.
Au vu des récits
figurant dans la base EPICEA, les malaises mortels correspondent à des morts
subites de l’adulte, dont le mécanisme principal est l’infarctus du myocarde.
Or, l’exposition des
salariés à de nombreux facteurs de risques professionnels (risques
psychosociaux (RPS), horaires atypiques, postures sédentaires, ambiances
thermiques, polyexposition froid-bruit, risque chimique…) peut favoriser, à
court, moyen ou long terme, la survenue de maladies coronariennes.
Renforcer la culture de prévention au sein de l’entreprise
Au regard des résultats
de l’étude conduite par l’INRS, trois grandes orientations se dégagent en
termes de prévention :
• Agir sur les facteurs
de risques professionnels associés aux maladies coronariennes
Préconisations : évaluer les risques professionnels et mettre en place les actions de prévention.
Et notamment,
analyser plus précisément certains types de risques auxquels sont exposés les
salariés, mécaniser certaines tâches …
• Améliorer
l’organisation des secours dans l’entreprise
Préconisations : sensibiliser les
salariés et former des sauveteurs secouristes du travail en entreprise pour
savoir comment réagir (alerte rapide des secours…) et connaître les gestes de
premier secours (massage cardiaque…) ; organiser les premiers secours ; adapter
le matériel de premier secours disponible dans l’entreprise…
• Assurer le suivi
individuel de l’état de santé des travailleurs
Préconisations : vérifier que le suivi
des salariés par les services de prévention et de santé au travail est effectué
dans les temps impartis ; mettre à profit la visite de mi-carrière pour évaluer
le risque cardiovasculaire du salarié et le retentissement des contraintes
professionnelles auxquelles il est, ou a été, exposé.
L’INRS va poursuivre l’analyse des malaises mortels survenant au travail.
A noter : depuis 2023,
l’enregistrement de ce type d’accident du travail mortel est devenu
systématique dans la base EPICEA.
« D’ores et déjà, l’analyse préliminaire des 150 nouveaux cas, reçus en moins d’un an, conforte l’ensemble des constats publiés dans l’étude INRS couvrant la période 2012-2022 », conclut le Dr Philippe Hache.