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[Tribune] Osez les acquisitions internationales, sans oublier les fondamentaux

Le point de vue d’Isabelle Saladin, Présidente d’I&S Adviser

Les entreprises françaises n’ont rien à envier à leurs compétitrices internationales et peuvent tout autant être dans une démarche M&A à l’international. Mais pour que leurs opérations soient des succès, elles doivent s’investir dans le pays visé, élaborer une stratégie moyen-long terme, ne pas y aller seules, impliquer les managements et savoir quel est le niveau de maturité sur des sujets comme la RSE et le digital.

La France est un terrain de chasse très apprécié des investisseurs étrangers. Quand ce ne sont pas des fonds d’investissement qui entrent au capital de start-up françaises à fort potentiel, ce sont des corporate qui rachètent nos pépites. Et on s’en félicite souvent…

Des débats ont néanmoins été ouverts au printemps dernier lors de la tentative de rachat par un groupe américain de l’industriel Segault, fournisseur de l’industrie nucléaire française. Il y a un mois, c’est le britannique JD Sports qui se portait acquéreur de Courir. Et en juin, c’est Novo Nordisk qui s’est positionné pour reprendre la biotech puydômoise Biocorp.

Pourtant, à l’instar de Vestiaire Collective qui a racheté l’un de ses rivaux américains Tradesy, les entreprises françaises peuvent elles aussi être ambitieuses et acquérir des entreprises étrangères afin de déployer leur stratégie et d’assurer leur croissance. La France a en effet la capacité de riposter au pillage de ses pépites industrielles et technologiques !

A une condition toutefois : elles ne doivent pas oublier de respecter plusieurs fondamentaux si elles veulent réussir leur(s) acquisition(s) et que celle(s)-ci serve(nt) le succès de l’entreprise. Elles gagneront en effet à être vigilantes et rigoureuses sur cinq points.

Les ressorts de la culture locale et de la stratégie

Le premier des fondamentaux à appliquer est de passer du temps dans le pays où est basée la société cible pour l’acquisition. Il est fondamental d’identifier les bons interlocuteurs, de faire leur connaissance, de comprendre les us et coutumes “locales”, de s’imprégner de la culture économique qui anime l’entreprise. Sans oublier le fait de vivre au même rythme et sur le même fuseau horaire, en partageant les préoccupations macroéconomiques et sociales du pays et en déjouant les subtilités de la langue et des expressions locales.

Le second impondérable des M&A est d’élaborer un plan stratégique à 3 ou 5 ans incluant cette acquisition, avec une véritable vision globale et un objectif d’accélération de la croissance. Acquérir une entreprise juste pour se faire plaisir et dire que l’on a mené ce type d’opération dans tel pays ne fonctionne pas. Il est nécessaire de définir les enjeux d’un rachat et de se pencher sur la façon dont il va nourrir et enrichir la proposition de valeur faire au marché.

L’erreur d’y aller seul

Troisième clé de succès : se faire accompagner. Attention sur ce point à ne pas confondre investissement et coûts... Ne voir l’accompagnement que le prisme du coût qu’il induit viendrait compromettre fortement le retour sur investissement final. Il est essentiel d’être épaulé par des experts juridiques et financiers des M&A, tout autant que par des operating partners qui ont déjà réalisé des opérations similaires. Cela permet d’éviter un grand nombre d’écueils trop souvent encore observés dans la conduite d’opérations d’acquisition.

Le levier du management

Quatrième levier pour que l’acquisition porte ses fruits : impliquer son management dans le rachat. Comme le chef d’entreprise doit concentrer une très grande partie de son temps et de son énergie au projet en passant du temps dans le pays cible, il est primordial qu’il ait des relais en France et s’appuie sur son équipe de management pour la gestion et le suivi opérationnel. L’erreur d’un dirigeant serait de vouloir tout gérer lui-même. C’est dans les faits impossible de bien le faire et l’un des pays finira par en pâtir.

 Implique le management de l’entreprise rachetée est également essentiel. Il faut anticiper et bâtir un plan d’intégration pour faire adhérer les équipes de l’entreprise rachetée et les embarquer dans son projet. De surcroît, ces collaborateurs ont beaucoup apporté pour réussir le projet d’acquisition hors des frontières françaises, ne serait-ce que parce qu’ils ont la connaissance du pays, des clients et des règles et habitudes locales. L’un des moyens est de créer un comité de pilotage au sein de l’entreprise à racheter.

RSE or not RSE ?

Cinquième et dernier point d’attention : anticiper la maturité RSE et digitale du pays où se trouve l’entreprise cible. Adopter une stratégie globale ne veut pas dire tout faire à l’identique partout dans le monde. Prendre en compte les spécificités locales et s’adapter - dans la façon d’attaquer commercialement un marché, de penser son marketing, de communiquer vers ses partenaires business et ses prospects, etc. – est indispensable. La prise en compte des impératifs de la RSE par exemple est très développée en Europe mais ce n’est pas le cas partout dans le monde.

A l’heure où l’intérêt pour les entreprises françaises ne faiblit pas et où l’équilibre économique mondial est bousculé par le contexte de perma-crise et les jeux géopolitiques, nos dirigeants ont une carte à jouer. Être plus conquérant et oser les acquisitions au-delà des frontières de l’hexagone permettra à moyen terme d’assurer le leadership de nos champions dans leurs industries respectives et de maintenir le rang de la France dans l’économie mondiale.

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