Connexion
/ Inscription
Mon espace
Culture & Société
ABONNÉS
Partager par Linked-In
Partager par Xing
Partager par Facebook
Partager par email
Suivez-nous sur feedly

[Tribune] Toute nation a-t-elle le gouvernement qu’elle mérite ?

« Les candidats à la présidence des États-Unis placent les électeurs devant un dilemme : incertitude ou statu quo ? Au bout du compte, chacun récolte ce qu’il a semé, n’est-ce pas ? »

Par Guido Barthels, gérant chez Ethenea Independent Investors S.A. et Yves Longchamp, Head of Research chez Ethenea Independent Investors (Schweiz) AG.

La citation du diplomate français Joseph Marie de Maistre « Toute nation a le gouvernement qu’elle mérite » à laquelle ce commentaire de marché doit son titre est souvent reprise pour commenter les résultats des élections. Même les démocrates les plus convaincus ont le ventre noué face à la montée en puissance des partis populistes et sceptiques à travers l’Europe et aux référendums invraisemblables comme celui sur le Brexit.

Plus d’un en vient certainement à se demander si la démocratie est réellement la forme de gouvernement idéale.

Winston Churchill l’affirmait déjà en 1947 : « La démocratie est le pire des régimes, à l’exception de tous les autres. » Malgré tout, nous devons bien vivre avec les résultats (si tant est qu’il y en ait) et donc avec un gouvernement que l’on pourrait parfaitement  dénigrer. Comme on l’a vu en Belgique, un pays peut toutefois survivre pas moins de 541 jours sans gouvernement élu, et ce, visiblement sans trop de dégâts. L’Espagne, qui s’apprêtait à égaler ce triste record mondial après deux élections et plus de 285 jours, a fini par trouver un accord in extrémis avec les socialistes permettant à Rajoy de former un gouvernement.

Mais la principale cause des sueurs froides des observateurs du marché, sont les élections présidentielles américaines prévues le novembre 2016. Sans vouloir minimiser l’importance mondiale des pays susmentionnés, l’hégémonie des États-Unis éclipse toutes les autres puissances. Le pays joue non seulement le rôle de gendarme du monde de manière plus ou moins convaincante, mais il s’agit aussi et surtout d’une puissance économique qui exerce une influence sur les marchés financiers internationaux. Et ce même pays s’apprête à élire un président qui ne pourrait pas être plus impopulaire.
Hillary Clinton ou Donald Trump endossera le costume présidentiel le 20 janvier 2017, deux personnalités qui ne sauraient être plus opposées qui ne partagent un seul et triste point commun : leur impopularité. Selon un sondage mandaté par la chaîne américaine ABC, 56% des adultes américains sont critiques vis-à-vis d’Hillary Clinton contre 63% pour Donald Trum. Le record d’impopularité d’un candidat issu d’un grand parti était jusqu’ici détenu par George H. W. Bush qui, avec 53% d’opinions défavorables en 1992, a finalement perdu les élections face à Bill Clinton. 


Les Américains doivent donc choisir entre le marteau et l’enclume, voire between a rock and a hard place
Malgré toutes les critiques fondées et infondées dont elle fait l’objet, Hillary Clinton est une professionnelle de la politique, qui poursuivrait vraisemblablement la ligne de Barack Obama. Elle est, comme on le dit si joliment, mainstream et représente donc très certainement une candidate acceptable pour les marchés financiers.
Donald Trump en revanche est tout sauf un vétéran de la politique et passe plutôt pour un clown qui flatte à grand bruit les instincts les plus bas des électeurs. L’incarnation même du populisme. L’élection de Donald Trump serait plutôt une mauvaise nouvelle pour les marchés financiers, dans la mesure où il est difficile de prévoir si et dans quelle mesure il voudra et pourra mettre en œuvre ses promesses électorales. Qu’il s’agisse de sa politique fiscale, pudiquement qualifiée de non conventionnelle ou du commerce extérieur, nombre de ces positions sont susceptibles d’influencer profondément le cours de l’économie, même s’il est difficile de prédire de quelle manière. Or les marchés financiers sont très sensibles à l’incertitude et passeraient selon toute vraisemblance en mode risk-off en cas de victoire de Donald Trump.

Le débat pourrait se clore ici, si l’auteur n’était pas un incorrigible américanophile. Toutefois, la situation que nous observons actuellement si nous regardons d’un peu plus près est bien éloignée du célèbre cliché de l’ascension sociale à l’américaine permettant de passer de la misère à la richesse. Le rêve américain semble s’être évaporé. Tous les trois ans, la FED réalise une enquête sur la situation financière des consommateurs. La dernière édition remonte à 2013 (une nouvelle enquête est menée cette année jusqu’en décembre, les résultats sont attendus en début d’année 2017). La dernière enquête avait toutefois mis au jour certains faits préoccupants, en particulier la dégradation de la situation des ménages à bas revenus, plus pauvres en 2013 qu’ils ne l’étaient encore en 2010. Fait plus choquant encore, le patrimoine moyen de la population active a fortement diminué depuis 1989. La répartition des richesses aux États-Unis semble de plus en plus injuste.
Les mêmes statistiques de la FED ont également fait l’objet d’excellents articles, notamment au sein de l’Atlantic Magazine. The Secret Shame of Middle-Class American cite un résultat de l’enquête, selon lequel 47% des ménages américains n’auraient même pas à disposition 400 dollars pour faire face à une urgence. Ils seraient obligés d’emprunter de l’argent ou de vendre des objets.
Près de la moitié des Américains semble vivre au jour le jour, loin, très loin de l’American Dream. S’inscrivant en parfait écho de cette enquête, l’étude du Pew  Research Center conclut que la classe moyenne américaine perd progressivement de son importance.

Cette étude et d’autres analyses similaires (pas seulement aux États-Unis) montrent qu’il existe (surtout dans ce pays) une disparité forte et croissante des revenus et des richesses. Le coefficient de Gini reflète également cette tendance : l’écart entre riches et pauvres ne cesse de se creuser. Ce phénomène entraîne quasi automatiquement un renforcement des alternatives populistes au détriment des partis établis qui, avec leur action, ont engendré cette problématique de répartition des richesses, une évolution indésirable sur le plan de la politique sociale.

Peu importe l’issue du scrutin, nous, les Européens, ne devrions toutefois pas trop nous réjouir aux dépens des électeurs américains. 2017 est synonyme d’échéance électorale aux Pays-Bas, en France, en Bulgarie, en République tchèque et en Allemagne. Qui peut prédire quel Trump pourrait encore émerger dans ces pays ?

Pour nous, ces conclusions impliquent que nos fonds afficheront un risque réduit tout au long des élections américaines. Le mode risk-off signifie moins de risque sur le plan des obligations, tant au niveau du risque émetteur qu’à celui de duration, ainsi que moins de risque sur la partie actions et devises.

http://www.ethenea.com/fr

 

 

Lectures du moment, tribunes d'experts, management et entrepreneuriat...

 

 Comprendre l'économie durable pour s'y investir

 

Lire la suite...


Articles en relation