Connexion
/ Inscription
Mon espace
Etudes & Enquêtes
ABONNÉS
Partager par Linked-In
Partager par Xing
Partager par Facebook
Partager par email
Suivez-nous sur feedly

[Expertises] 6 octobre : Journée des aidants

- Frères et sœurs : ces aidants invisibles que l’avenir inquiète

- 95% des parents d’enfants en situation de handicap redoutent l’avenir de leur enfant lorsqu’ils
ne seront plus là.

 

Qu’en est-il des frères et sœurs ?

 

Être frère ou sœur d’une personne en situation de handicap intellectuel, c’est faire l’expérience de la différence et de ses richesses. Mais c’est aussi, souvent, grandir et vivre en assumant progressivement un rôle d’aidant de l’ombre — avec des conséquences sur sa vie personnelle et professionnelle. Pour certains, c’est même assumer un double rôle : soutenir leur frère ou sœur tout en accompagnant un parent vieillissant.

 

Alors que l’Unapei appelle actuellement les fratries à témoigner dans le cadre de sa grande enquête nationale « La Voix des frères et sœurs » (ouverte jusqu’à fin octobre, résultats en 2026), le réseau d’associations met en lumière, à l’occasion de la Journée nationale des aidants, l’une de leurs réalités : l’inquiétude pour l’avenir. À travers ce travail, l’Unapei plaide pour une meilleure reconnaissance du rôle des frères et sœurs et la mise en place des dispositifs de soutien aux familles.
Car si cette responsabilité peut peser, elle peut aussi être une source de richesse et de liens fraternels très forts, dès lors qu’un accompagnement adapté est présent et que des solutions diversifiées permettent de choisir son implication.

 

Quand les parents ne seront plus là…

 

Pour beaucoup de familles, l’avenir est source d’angoisse : qui s’occupera de leur enfant quand ils ne pourront plus le faire ? L’inquiétude est d’autant plus forte que le manque de solutions d’accompagnement adaptées est criant.  Dans ce contexte, les frères et sœurs deviennent des aidants à part entière, souvent invisibles.

 

« On parle de plus en plus des proches aidants, en particulier les parents, mais on oublie trop souvent les frères et sœurs. Pourtant, eux aussi sont souvent un soutien précieux pour les personnes en situation de handicap, eux aussi sont impactés par la situation, et deviennent aidants principaux après les parents. Pourtant, ils ne devraient pas avoir à pallier le manque de solutions d’accompagnement adaptées. Nous voulons leur permettre d’anticiper, de construire leur place et de rejoindre notre combat pour des accompagnements diversifiés et de qualité. En tant qu’association représentative des personnes en situation de handicap intellectuel ou cognitif, mais aussi de leurs proches, nous avons à cœur de mieux comprendre leurs parcours, leurs besoins et leurs ressentis. Il est important de porter leurs voix et de les accompagner ! », explique Luc Gateau, président de l’Unapei. 

 

A l’occasion de la journée des aidants 2025, l’Unapei donne la parole à celles et ceux qui s’inquiètent pour leur avenir et celui de leur proche

 

« Je gère le quotidien de ma sœur depuis le décès de notre mère : l’administratif, les courses, le suivi médical… Je tâche toujours d’appliquer son conseil : « tu n’as pas à prendre en charge ta sœur, mais tu as à en avoir le souci ». L’avenir, ça se travaille et j’ai toujours fait en sorte que ma sœur fasse partie de la famille. Nous, les frères et sœurs, nous sommes formatés pour aider les autres » Andrée, 65 ans, sœur et tutrice de Pascale, 67 ans. Pascale est porteuse de troubles neurologiques et réside en foyer
de vie.

 

« Ma sœur est accompagnée par des professionnels, mais je reste toujours présente. J’ai toujours une pensée dans ma tête, je me demande si elle va bien ou si elle a besoin de quelque chose. Mes parents sont décédés jeunes, nous n’avons jamais parlé de l’avenir, mais ils avaient tout anticipé. Ils ont toujours tout géré. De mon côté, être sa sœur m’a aussi conduit à choisir mon métier. J’ai toujours voulu soigner et je travaille auprès de personnes âgées » Audrey, 44 ans, sœur d’Anne, 48 ans. Anne est porteuse d’un trouble du développement intellectuel. Elle travaille aujourd’hui en ESAT et réside en foyer d’hébergement.

 

« Je soutiens mon frère dans son quotidien. J’essaie de le stimuler, de lui faire raconter sa journée en détails, de faire des activités qui changent. Je pense souvent à l’avenir, même si mes parents anticipent. Toutes mes ambitions sont liées à Simon. Je ne peux pas vivre à l’étranger, car je veux être là en cas de besoin.  Je parle peu de mes craintes et de mes projets à mes parents pour ne pas les inquiéter, et parce que beaucoup de choses peuvent changer d’ici là » Carla, 23 ans, sœur jumelle de Simon, qui est porteur d’autisme et du X fragile. Il travaille à l’ESAT et vit chez ses parents.

 

« Aujourd’hui, ma sœur a trouvé un équilibre et s’épanouit. Nous arrivons à une relation où je ne suis pas tout le temps à l’épauler, à stresser, ou à gérer les aspects médicaux. Cependant, je ne peux pas m’empêcher de penser à l’avenir : que va-t-il se passer quand elle ne sera plus à l’ESAT ? Au foyer de vie… ? Au départ des parents, un glissement de fonction dans la cellule familiale s’opère. Pour moi, être frère, c’est toujours avec sa sœur dans un coin de sa tête » Clément, 41 ans, frère de Domitille, 35 ans. Domitille est porteuse de trisomie 21. Elle travaille à l’ESAT et réside en foyer de vie.

 

« J’ai toujours pensé à l’avancée en âge de mes parents, mais nous n’en parlions pas. C’était un tabou, ce qui rendait difficile l’anticipation. Tout était pourtant préparé pour le changement de vie de Patrick, mais je n’étais pas au courant. Au décès de mes parents, j’ai pris le relai. J’ai d’ailleurs adapté mon parcours professionnel pour être plus proche de lui. Aujourd’hui, mon frère vieillit et régresse. Ma principale inquiétude pour l’avenir est son vieillissement avec les anticipations nécessaires » Jean-Luc, 65 ans, frère et tuteur de Patrick, 60 ans. Patrick est en situation de handicap intellectuel. Il réside au sein d’une Unité pour Personnes Handicapées Vieillissantes.

 

 « En tant que mère, je pense constamment à l’avenir… Que se passera-t-il demain si mon fils rencontre un quelconque problème ? Mon frère est lui aussi en situation de handicap. Plus jeune, il n’y avait aucun pont entre mon frère et le monde. Ce pont était difficile à faire seule. Aujourd’hui, je vois ma fille le faire et je suis fière d’elle » - Perrine, 43 ans, mère de Maxime 14 ans, autiste, et Lisa 10 ans. Perrine est également sœur de Benoit, 47 ans, autiste.

 

« Juliette ne parle pas, mais nous avons toujours eu une véritable relation fusionnelle. J’ai quitté la maison pour mes études. C’était difficile pour tout le monde, mais je serai toujours là pour l’aider. Je pense parfois au jour où mes parents ne seront plus là : est-ce que je devrai la prendre sous mon aile ? Même si j’essaie de ne pas y penser, cette question trotte dans la tête de tout le monde » Valentine,
19 ans, sœur de Juliette, 15 ans. Juliette est porteuse d’une maladie génétique rare.

 

« Au sein de notre famille et avec mes trois enfants, le handicap n’a jamais été un sujet tabou. Le sujet le plus difficile, c’est l’avenir. L’avenir s’anticipe et se discute à plusieurs. Nos enfants nous disent qu’ils seront là mais nous voulons aussi que chacun puisse avoir sa vie. Je veux qu’ils soient là comme des frères et sœurs, pas comme des aidants » - Christine, 65 ans, mère de Romain, 37 ans. Romain est porteur du Syndrome de Williams et Beuren. Il travaille à l’ESAT et vit en foyer d’hébergement.

 

Si l’inquiétude pour l’avenir est omniprésente, il est essentiel de rappeler aussi que, pour beaucoup, le handicap au sein d’une fratrie constitue une richesse. Ces liens particuliers peuvent être source de solidarité, de sens et d’épanouissement, à condition que les frères et sœurs bénéficient du soutien et de l’accompagnement nécessaires.

 

L’Unapei demande plus de reconnaissance, de soutien et une véritable palette de choix pour les frères et sœurs de personnes en situation de handicap

 

Être frère ou sœur d’une personne qui a besoin d’accompagnement permanent peut être une richesse, mais aussi une contrainte. Dans tous les cas, cela entraine de grandes responsabilités.

 

Afin de permettre à chacun de vivre au mieux cette relation, l’Unapei demande à ce que des dispositifs soit mis en place pour :

•   Reconnaitre que la qualité de vie de la personne en situation de handicap dépend aussi de la qualité de vie de ses proches – et réciproquement.

•   Assurer un soutien dédié aux fratries (recueillir leur parole, reconnaitre leur expérience, proposer des soutiens concrets…).

•   Permettre le libre choix des frères et sœurs en anticipant la question du relais, en garantissant des accompagnements de qualité pour leur proche …

•   Donner aux frères et sœurs les moyens d’anticiper et de s’engager pour ne pas subir la charge quand les parents disparaissent, en leur permettant de construire leur place et de rejoindre le combat pour des accompagnements adaptés

 

Quelques initiatives existent mais l’Unapei déplore le manque de financement pour des solutions concrètes

 

En effet, certaines associations tentent de lancer des dispositifs dédiés, l’Unapei déplore le manque de solutions d’accompagnement adaptées qui soulageraient les parents et les futurs aidants. Quelques exemples :

 

•   Les papillons Blancs de Lille : L’association a développé une plateforme d’accompagnement et de répit des aidants, intégrée à la Maison des Aidants Lille–Roubaix–Tourcoing. Elle propose un accueil individualisé, de l’information, un accompagnement psychologique et des temps de partage entre pairs, tout en offrant des solutions concrètes de répit (relayage, accueil temporaire, suppléance à domicile, séjours-vacances). L’objectif : alléger la charge des aidants, favoriser le lien social et leur permettre de souffler tout en restant accompagnés.

•   L’Adapei 91, en union avec l’ADPEP 91 est partie prenante du dispositif inter-associatif
« RAISONNE ». L’objectif est de mobiliser un réseau de bénévoles pour venir en aide aux familles/ aidants, sur plusieurs domaines : répit, trajets quotidiens, soutien administratif ou autre.

•   L’Adapei de la Corrèze a mis en œuvre une plateforme départementale « HOLA » - Halte Orientation Lien pour les Aidants en collaboration avec le conseil départemental, qui deviennent de véritables lieux d’échange et de soutien.

•   L’Adapei 29 a développé un dispositif de soutien aux parents pour anticiper le jour ou ils ne seront plus là. Ce dispositif permet aux parents d’aborder cette question de l’après avec leurs autres enfants pour que chacun soit respecté dans ses choix.

 

Après avoir donné la parole aux parents aidants dans son étude « La Voix des parents », l’Unapei renouvelle l’expérience pour les frères et sœurs adultes ayant un membre de leur fratrie (ou plusieurs) porteur de troubles du neurodéveloppement, en situation de polyhandicap ou handicap psychique, quel que soit son âge.


Lire la suite...


Articles en relation