Le point de vue de Yves Pellicier, président du groupe MAIF.
Les primes à la
performance sont devenues un élément central du sport de haut niveau. Chaque
victoire donne lieu à une récompense. Chaque podium, à une visibilité
démultipliée. C’est logique. Mais c’est aussi incomplet. Car un exploit sportif
qui abîme la planète est d’abord une défaite environnementale
En effet l’urgence
écologique s’impose à tous, y compris au monde du sport. Et nous avons
collectivement tardé à poser une question essentielle : quel est le coût
environnemental de notre pratique sportive, des professionnels comme des
amateurs ?
C’est précisément cette
question que posait le rapport « Décarbonons le sport ! », publié par le Shift
Project de Jean-Marc Jancovici en 2025 avec le soutien de la MAIF. Ce travail
pionnier, mené en concertation avec de nombreux acteurs du secteur, a permis de
dresser un diagnostic lucide : l’empreinte carbone du sport est significative,
principalement du fait des transports induits, de la construction des
équipements et de la production d’événements.
Ce diagnostic, comme
cette tribune, ne condamnent pas. Ils appellent à se réinventer. Si le sport
veut continuer à rassembler, inspirer, émanciper, et tout simplement à exister
il doit aussi apprendre à se réinventer. Car aucun sport ne sera possible sur
une planète brûlée.
Les entreprises
engagées et militantes doivent l’être partout, y compris dans le sport.
Ce constat doit nous
amener à agir. Certaines fédérations, événements et athlètes ont déjà engagé
cette transition écologique. Nous les accompagnons depuis 2019 avec le
programme MAIF Sport Planète, pour explorer d'autres façons de se déplacer, de
construire, d’organiser sans amoindrir la performance sportive. Mais ces
efforts, bien que réels, restent dispersés, souvent invisibles, rarement
justement valorisés.
La transformation
écologique du sport ne peut reposer uniquement sur les fédérations ou les
athlètes.
Elle concerne aussi les partenaires privés, qui jouent un rôle clé dans
l’organisation, le financement et la valorisation du sport.
Les entreprises ont une
responsabilité particulière : que leurs engagements climatiques s’appliquent
aussi à leurs actions dans le domaine du sport.
C’est cette cohérence
que nous recherchons à la MAIF. Depuis plusieurs années, nous avons engagé une
stratégie climat ambitieuse : alignement sur l’accord de Paris, sortie des
énergies fossiles, financement de la transition, adhésion à la Net Zero Asset Owner
Alliance (NZAOA)… Malgré les revirements démagogues récents de quelques-uns,
nous gardons ce cap responsable pour œuvrer au mieux-commun.
Nous ne pouvons pas,
d’un côté, investir pour limiter le réchauffement climatique, et de l’autre,
soutenir des modèles sportifs qui y contribuent encore hélas fortement.
Le sport ne peut rester
à l’écart de cet effort. Il est un levier de transformation puissant dans la
bataille culturelle à l’œuvre, un lieu où la transition écologique et solidaire
peut devenir visible, vivante et même désirable.
Le Plan national
d'adaptation au changement climatique (PNACC) du ministère de la Transition
écologique et les chartes d’écoresponsabilité du ministère des Sports invitent
déjà les partenaires privés à se mobiliser. Pour être à la hauteur des enjeux,
il est plus que temps d’aller un cran plus loin.
Il faut désormais
passer d’une logique de soutien à une logique de condition.
Chez MAIF, nous
franchissons une nouvelle étape : nos contrats intégreront systématiquement des
critères de performance environnementale, au même titre que la visibilité, la
notoriété ou les résultats sportifs. C’est une démarche co-construite,
exigeante, mais réaliste. Elle repose sur la conviction que le sport peut et
doit être un acteur de la transition écologique, sans perdre son intensité, sa
beauté, ni sa popularité.
Notre enjeu : que les performances
environnementales soient enfin reconnues à la hauteur des performances
sportives Il ne s’agit pas de demander la perfection à tous les acteurs du
sport. Mais de poser un cadre clair : l’accès aux financements doit désormais
s’accompagner d’engagements concrets pour réduire l’empreinte écologique.
Cela suppose de changer
la manière dont nous définissons et évaluons un partenariat sportif. D’élargir
nos critères de soutien. De considérer qu’un événement n’est pas seulement
réussi parce qu’il est médiatisé, mais aussi parce qu’il est plus sobre, mieux
organisé, plus durable. De dire aux fédérations que remporter des médailles,
c’est bien mais que ce n’est pas suffisant. Les victoires se jouent aussi en
dehors du terrain, sur la planète sur laquelle nous vivons.
Concrètement, cela
signifie que :
• les acteurs que nous soutenons devront
s’inscrire dans une trajectoire formalisée d’amélioration continue de leur
impact environnemental : bilan carbone, plans de mobilité douce, gestion des
déchets...
• les structures partenaires seront
accompagnées dans cette transition par des outils, des expertises, des
référentiels partagés ;
• les contrats intégreront des objectifs
mesurables, adaptés à la réalité de chaque projet, avec une logique
d’encouragement et une ambition de résultat.
Protéger, c’est aussi prévenir et c’est au cœur de notre métier d’assureur militant. Dans un monde confronté à des bouleversements climatiques majeurs, il est temps de valoriser celles et ceux qui transforment les pratiques. Nous croyons à un partenariat plus utile, plus aligné, plus durable. Et nous espérons que d’autres feront ce choix avec nous, pour que demain, la performance environnementale soit reconnue à la hauteur de la performance sportive. Parce qu’une victoire est encore plus belle quand elle respecte la planète.


