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[Dossier] Allocation d’actifs et approche factorielle

Amundi vient de publier une étude sur les facteurs de risque auxquelles sont liées les rentabilités des actifs. Plusieurs d’entre eux sont susceptibles d’ajouter de la valeur. Quant à elle, la diversification permet de limiter la volatilité. Mais de quoi s’agit-il ?

 

Une exposition à un risque sous-jacent

« On constate un fort engouement pour l’investissement factoriel, font observer chez Amundi Marie Brière, recherche, stratégie et analyse, Alessandro Russo, recherche quantitative, et Eric Tazé-Bernard, conseil en allocation d’actifs. Cette notion s’est développée à la suite de la publication, en 2009, du rapport rédigé par Ang, Goetzmann et Shaefer chargé d’évaluer les performances de la gestion active du fonds souverain norvégien. Selon les auteurs, les facteurs de risque seraient comme des nutriments, ou briques élémentaires, expliquant les rendements des différents actifs, assemblages de ces blocs de base. Les défenseurs de l’approche factorielle considèrent qu’il serait plus judicieux de constituer un portefeuille en allouant entre les facteurs, plutôt qu’entre les classes d’actifs. »

En effet, les classes d’actifs sont naturellement corrélées, du fait de leur exposition sous-jacente à des facteurs de risque communs. Les actions et les obligations d’entreprise à haut rendement, par exemple, sont exposées au risque actions. Elles sont donc fortement corrélées. De plus, la corrélation entre classes d’actifs s’amplifie pendant les crises. Le risque de marché se met alors à dominer les autres risques. En conséquence, nombre d’investisseurs « ont questionné » les approches traditionnelles d’allocation par classes d’actifs et se sont tournés vers des méthodes cherchant à diversifier les sources de risque élémentaires. En théorie, un facteur de risque est une exposition « pure » à un risque sous-jacent censé générer une prime de risque. En pratique, de multiples conceptions de facteurs coexistent : macroéconomiques, statistiques, de taille de capitalisation, de momentum, de style (value, croissance)… Dans le seul univers actions, on dénombrerait plus de trois cents facteurs de risque !

L’étude d’Amundi porte sur la définition d’une allocation stratégique entre facteurs. Elle montre, notamment, l’importance de la diversification factorielle. Elle examine aussi l’intérêt d’une allocation dynamique entre ces facteurs, en particulier en fonction du cycle économique. Le gros avantage de l’investissement factoriel est de permettre de capter différentes primes de risque disponibles dans le marché. Les facteurs les plus couramment utilisés dans le marché actions présentent des performances attrayantes, supérieures à celle du marché et des secteurs d’activité sur longue période. Le risque associé est, en moyenne, également plus élevé.

 

Les vertus de l’équipondération

« Une stratégie de diversification entre facteurs est-elle pour autant plus attrayante qu’entre les classes d’actifs traditionnelles ? », se demandent les experts d’Amundi. La réponse dépend de ce que l’on entend par facteurs. Par définition, les facteurs statistiques issus d’une analyse en composantes principales sont indépendants. Il peut, cependant, y avoir une « instabilité temporelle » de la composition des facteurs et une difficulté à les interpréter économiquement. Les facteurs construits comme des portefeuilles long/short sont diversifiants, mais les ventes à découvert ne sont pas toujours autorisées… Au moins six des indices factoriels du MSCI World, à savoir minimum volatility, high dividend, quality, value, momentum, et mid cap, sont plus corrélés entre eux dans la durée que les secteurs dans le cadre d’un investissement long only. Elles sont comparables, néanmoins, lorsque l’on regarde les rentabilités ajustées du beta. Par ailleurs, les corrélations entre facteurs sont plus stables que celles entre secteurs.

« La mise en œuvre d’une stratégie diversifiée entre facteurs permet aux investisseurs de bénéficier d’un supplément de rentabilité », soulignent les spécialistes d’Amundi. Un portefeuille équipondéré des six facteurs énumérés ci-dessus offre une rentabilité supérieure, sur vingt ans, à celle de l’indice MSCI World : 8,6 % versus 6 %, avec une volatilité inférieure (14,1 % contre 15,4 %). La performance d’une stratégie de diversification peut encore être améliorée par l’introduction d’une pondération dynamique, selon différentes approches : par la valorisation ou par des techniques statistiques, par exemple. L’équipe du gestionnaire s’est focalisée sur une allocation dynamique en fonction du cycle économique. Celle-ci procède de l’observation selon laquelle certains facteurs, comme la faible volatilité ou les hauts dividendes, ont un comportement défensif, tandis que d’autres, comme le momentum, sont associés à un trend de marché haussier.

Alessandro Russo a étudié le comportement de différents facteurs sur le marché américain des actions au cours des vingt dernières années, en fonction de situations cycliques segmentées en quatre phases : expansion, décélération, récession, reprise. « Ces phases, précise-t-il, ont été caractérisées sur la base d’un indicateur relatif au marché du travail aux Etats-Unis et d’un indicateur de stress, en l’occurrence le spread entre le taux des obligations d’entreprises notées BBB et celui des obligations du Trésor. »

 

Bien identifier la phase du cycle

Son travail montre qu’il faut privilégier les facteurs momentum et qualité, au détriment du facteur volatilité minimale, dans les phases d’expansion, les facteurs faible volatilité minimale et dividendes élevés dans les phases de décélération, les facteurs faible volatilité et qualité, au détriment du facteur momentum, dans les phases de récession et les facteurs valeurs moyennes et value, au détriment des facteurs qualité et faible volatilité, dans les phases de reprise. Un portefeuille construit sur la base de ce schéma de pondération dynamique surperforme un portefeuille équipondéré entre facteurs. Encore convient-il de bien identifier la phase du cycle dans laquelle on se situe, sans parler des différences de cycle entre les pays. Une approche factorielle distincte doit donc être mise en œuvre selon les zones géographiques.

« L’exercice peut être rendu délicat par l’apparition de changements structurels dans le fonctionnement des économies, par exemple sous l’impact de politiques monétaires de desserrement quantitatif, poursuivent les experts d’Amundi. De plus, le basculement d’une phase du cycle à une autre est le plus souvent lié à l’intervention d’un catalyseur, événement économique ou de marché, que l’investisseur doit pouvoir détecter de manière adéquate, sans le confondre avec un simple bruit de marché. » L’analyse cyclique est nécessaire, mais elle ne suffit pas à définir une allocation. Les critères de valorisation,  notamment, doivent aussi être pris en compte. De surcroît, certains facteurs peuvent suivre des cycles très longs et, à l’inverse, ne plus être opérationnels pendant plusieurs années. C’est le cas du portage (carry) sur les devises, qui est en général performant sur le long terme, mais qui a cessé de fonctionner depuis la crise de 2008.

Une autre approche consiste à considérer les variables macroéconomiques – inflation, croissance, taux d’intérêt, taux de change, prix des matières premières – comme des facteurs de risque. Ainsi un fonds de pension dont les engagements sont liés à l’inflation souhaitera-t-il détenir des actifs sensibles à ce paramètre, alors qu’un fonds souverain d’un pays producteur de matières premières sera incité à se diversifier vers des classes d’actifs qui pourraient profiter de la baisse de leurs prix.

Michel Lemosof

 

L’avis de la rédaction

Les ingénieurs en mathématiques financières et autres intellectuels de la gestion ne relâchent jamais leurs efforts pour expliquer le passé et prévoir l’avenir. Les enjeux sont si considérables – à commencer par le financement des retraites – futures que l’objectif est de trouver une forme de martingale qui, d’une part, évite les pertes et qui, d’autre part, améliore la rentabilité des investissements rapportée au risque.

Dans le maquis des possibilités offertes par l’industrie de la gestion collective, il revient à l’épargnant de choisir le véhicule qui répondra à ses attentes. Ce qui relève de la gageure, dans la mesure où les institutionnels, les sélectionneurs, les banquiers privés, etc. ont déjà eux-mêmes du mal le faire. Le risque d’erreur est important, si bien que certains épargnants sont tentés de changer de cap, parfois… avant que la classe d’actifs qu’ils délaissent ne remonte dans les palmarès. D’autres, découragés, désertent les marchés.

Amundi développe une approche d’allocation stratégique fondée sur la diversification entre scénarios macroéconomiques en tirant parti de l’exposition des actifs aux variations de trois facteurs clés : croissance, inflation, stress. Les obligations sont « clairement polarisées » à la baisse de la croissance, au repli de l’inflation et à la hausse du stress. Les matières premières présentent des « polarisations claires » à la progression de la croissance, à la hausse de l’inflation et au recul du stress. Un portefeuille acheteur de valeurs à forte profitabilité et vendeur de valeurs à faible profitabilité présente des polarisations au repli de la croissance et à l’augmentation du stress. Une façon de maîtriser le risque global.

Le problème est de trouver dans les marchés des indices factoriels ou des titres aussi représentatifs que possible des facteurs de risque qui correspondent aux stratégies souhaitées. Pour l’instant, il semble que l’épargnant n’ait pas à sa disposition d’instruments qui répondent à un type de demande aussi sophistiquée. Les ETF smart beta, par exemple, ne nous paraissent pas supérieurs – et rares sont ceux à la fois intéressants et accessibles aux particuliers – aux fonds activement gérés par des professionnels qui ont largement fait leurs preuves. Laissons le dernier mot aux experts d’Amundi, qui reconnaissent que « l’approche factorielle mérite d’être considérée comme un complément plutôt que comme un substitut à l’allocation d’actifs traditionnelle ».

 

 Comprendre l'économie durable pour s'y investir

 

 

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