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Les actions devraient bénéficier de la reprise économique mondiale

 

Entretien avec Maya Bhandari, gérante du fonds Threadneedle (Lux) Global Multi Asset Income de Columbia Threadneedle Investments, qui estime que même si les actions sont relativement onéreuses, elles offrent une prime attrayante qui n’est pas présente dans d’autres actifs comportant un risque similaire.


Comment l’allocation d’actifs a-t-elle évolué en 2017 ?

Nous avons entamé l’année 2017 avec des perspectives négatives à l'égard des rendements ajustés du risque de différentes classes d’actifs et ce depuis la mi-juin 2016, juste avant le référendum sur le Brexit au Royaume-Uni. En début d’année, nous avons relevé notre tolérance au risque, pour deux raisons essentiellement. Premièrement, il devenait de plus en plus évident que la phase de diminution des bénéfices que les entreprises du monde entier avaient connue pendant cinq ou six ans était de l'histoire ancienne, compte tenu de la bonne orientation des résultats et des prévisions de bénéfices. Deuxièmement, la reprise économique mondiale prenait de plus en plus d'ampleur, soutenant ainsi l’expansion des marges des entreprises. L'année 2017 s'est caractérisée par une pléthore de risques potentiels, mais peu de choses se sont finalement produites.

Nous nous sommes montrés optimistes à l’égard des actions au cours de l'année, en commençant par revoir notre opinion vis-à-vis de l’Europe en mars, puis au niveau global début mai. Nous privilégions fortement le Japon depuis octobre. La nature globale de la croissance économique actuelle profite en particulier à des marchés tels que le Japon et l’Europe, qui présentent un important levier opérationnel (c.-à-d. des coûts fixes élevés par rapport aux coûts variables) par rapport au cycle industriel mondial.

L’autre changement a consisté à adopter un positionnement stratégiquement neutre sur le dollar américain en début d’année, qui s'est ensuite fait plus prudent en septembre. Il me vient souvent à l'esprit l’image d’un « sourire » lorsque je pense au dollar : le billet vert réalise généralement un beau parcours lorsque les Etats-Unis surperforment le reste du monde ou dans un contexte de récession mondiale. La situation actuelle ne correspond à aucun de ces scénarios. Le dollar se trouve donc dans le « creux » du sourire plutôt qu’à l’une ou l’autre de ses « extrémités » positives, tandis que d’autres devises telles que l’euro paraissent plus attrayantes.

Ce qui n’a pas changé cette année, c’est notre prudence vis-à-vis des actifs à duration longue, et en particulier des emprunts d'Etat « core », qui continuent de faire l'objet de sous-pondérations ou de positions courtes sur l’ensemble de nos stratégies.


En 2017, les marchés d’actions mondiaux ont atteint ou flirté avec des records historiques. Pourront-ils maintenir une telle cadence ?

Les actions ont généré des rendements de 60 à 160% en devises locales au cours des cinq dernières années, une période associée à une croissance économique réelle guère enthousiasmante de l'ordre de 1,5 à 2,5%. Depuis le début de l’année, les rendements ajustés de la volatilité générés par les marchés d'actions mondiaux s'établissent à leur niveau le plus élevé en vingt ans, et selon certaines mesures, les valorisations semblent pleines. Les risques ne sont cela dit pas négligeables : resserrement monétaire après une décennie d’assouplissement quantitatif, multitude de menaces géopolitiques, pressions persistantes à la démondialisation (Brexit, Alena), etc. Mais nous estimons toujours que les actions devraient générer des rendements ajustés du risque solides en 2018. Pourquoi ?

Car après une période au cours de laquelle les rendements totaux des actions étaient exclusivement dictés par les valorisations (autrement dit, nous payions de plus en plus cher pour des résultats de moins en moins bons), ils sont à présent presque entièrement dictés par l'amélioration des marges et des ventes. Les actions progressent pour les « bonnes » raisons, à savoir une participation à la hausse à l'accélération de la croissance économique et à l'amélioration des bénéfices des entreprises. Les prévisions bénéficiaires pour cette année et l’an prochain se sont en effet non seulement maintenues, mais s'inscrivent également en hausse, mettant fin à la forte « attraction gravitationnelle » observée ces dix dernières années. Jusqu’à cette année, le même scénario se répétait chaque année : les prévisions de croissance des BPA à 24 mois, de l'ordre de 10 à 15%, se tassaient progressivement pour donner lieu à des prévisions stables, voire négatives, à l’approche de la période anticipée. L'évolution des prévisions de bénéfices pour 2017, 2018 et 2019 a mis fin à cette tendance. Par conséquent, la revalorisation des actions a accusé un certain retard par rapport à l'évolution d'autres actifs risqués : par exemple, les rendements bénéficiaires anticipés des actions mondiales n’ont pas suivi le resserrement des rendements des obligations d’entreprises à haut rendement. Nos propres prévisions suggèrent que cette tendance se poursuit, avec une croissance des BPA attendue à 10-15% dans les principales régions actions à l'horizon des 12 à 18 prochains mois.

Pour simplifier, même si les actions sont relativement onéreuses, elles offrent une prime attrayante qui n’est pas présente dans d’autres actifs comportant un risque similaire. Nos stratégies nous permettent d’engranger cette prime.


S'agissant des actions mondiales, quels sont les segments qui suscitent le plus votre optimisme en 2018 ?

Les régions qui recèlent selon nous les meilleures opportunités sont le Japon, l’Europe et les marchés émergents d’Asie, avec une prédilection pour le Japon. Les stratégies d’allocation d’actifs de Columbia Threadneedle Investments pour la région EMOA surpondèrent/investissent dans les actions japonaises depuis l’été 2013, une période associée (uniquement au Japon) à une bonne performance et à des valorisations relatives plus abordables, appuyées par des résultats solides. Malgré un rendement total spectaculaire de 20% depuis le début de l’année au moment où nous écrivons ces lignes, les actions japonaises continuent d’afficher une décote par rapport aux indices boursiers mondiaux. Compte tenu du renforcement des bénéfices des entreprises d’un point de vue bottom-up, de la poursuite des réformes des entreprises améliorant les rendements pour les actionnaires, des prévisions économiques solides (nos propres prévisions dépassent systématiquement les prévisions croissantes du consensus), de la diminution du risque politique et du fait que l’activité du Japon est fortement exposée, d’un point de vue opérationnel, à des améliorations simultanées de l’économie mondiale, les actions japonaises devraient selon nous générer des rendements  ajustésdu risque exceptionnels en 2018.

A l'instar du Japon, l’Europe bénéficie également d’une forte exposition opérationnelle à la reprise mondiale actuelle. Les marges peuvent encore s’améliorer à partir de niveaux toujours bas, et les bénéfices continuent de ressortir en ligne avec des prévisions optimistes. Parallèlement, les marchés émergents asiatiques offrent des valorisations intéressantes, un potentiel bénéficiaire solide et des risques moindres qu’il y a 18 mois.


Les matières premières ont quelque peu rebondi en 2017. Quelle sera selon vous l'évolution de la classe d'actifs et comment utilisez-vous les matières premières dans le cadre de l'allocation d'actifs ?

Les matières premières peuvent jouer un rôle important au sein des portefeuilles d’allocation d’actifs, car leur évolution a tendance à être dictée par l’offre et la demande plutôt que par l'appétence au risque. Leur bêta par rapport aux actifs risqués est très instable, ce qui permet aux portefeuilles investis dans plusieurs classes d’actifs de se diversifier.

Nous privilégions les matières premières depuis septembre 2016, anticipant une reprise généralisée liée à une dynamique favorable entre l’offre et la demande. Nous observons actuellement une forte demande généralisée, particulièrement en provenance de Chine et d’autres marchés émergents asiatiques dès lors que la reprise économique conserve son élan. La discipline au niveau de l’offre s'est renforcée pour diverses raisons, laissant notamment de nombreux marchés de métaux de base en situation de (quasi-)déficit net après des années d’offre excédentaire. S'agissant des marchés pétroliers, les producteurs de schiste sont incapables de revenir sur le marché aussi rapidement qu'en 2011-2012, tandis que la croissance de la demande est solide. La dépréciation du dollar américain a également aidé, et bien qu’une forte augmentation des cours du pétrole pourrait mettre fin à ces conditions favorables, ce n’est pas ce que nous prévoyons. Dans l’ensemble, 60 USD le baril nous apparait comme un niveau favorable pour le pétrole.


La croissance chinoise continuera-t-elle d'impressionner et quels seront ses moteurs en 2018 ?

Depuis plusieurs années, la Chine tente de rééquilibrer son économie au profit d'un modèle axé sur la demande intérieure plutôt que sur les exportations et l’investissement. Cela semble lui réussir : la croissance économique réelle a ralenti, pour passer de l'ordre de 10-15% dans le sillage de la crise financière mondiale à 6-6,5% en 2017, mais elle est en grande partie alimentée par la demande intérieure et ne devrait guère baisser davantage.  Les entreprises chinoises ont progressé le long de la chaîne de valeur, ce qui crée des opportunités pour d’autres marchés émergents. Notre scénario central pour 2018 table sur une certaine stabilité en Chine, avec une croissance historiquement plus faible, mais de meilleure qualité. La Chine continue de représenter un tiers environ de la croissance attendue du PIB mondial.

Sur un horizon de cinq ans, nous restons préoccupés par la manière dont la Chine se sortira du « trilemme du RMB », un problème qu’elle devra impérativement résoudre. Il est avéré en économie qu’un pays ne peut gérer simultanément que deux des trois variables suivantes avec succès : le taux de change, les mouvements de capitaux et une politique monétaire indépendante. Les efforts sporadiques déployés par la Chine pour libéraliser sa monnaie n’ont pas été sans peine ; le compte de capital n’est pas entièrement étanche, jusqu’à 2% des actifs du système bancaire quittant le pays en périodes de crise ; et les efforts visant à ajuster la politique intérieure ont souvent dérouté plutôt que rassuré les investisseurs mondiaux.

La croissance est quant à elle stable à un rythme plus lent et plus durable, et les indicateurs que nous surveillons pour l’économie chinoise affichent peu de signes de tensions. Comme pour d’autres pays, une augmentation de la productivité économique permettrait à la Chine de se rapprocher de la frontière de la productivité, ce qui tirerait tout le monde d’affaire. Bien sûr, la Chine pourrait aussi accorder plus de flexibilité à sa monnaie en laissant jouer davantage les forces du marché.


Il semble que le cycle du crédit tire à sa fin. Quelles sont vos perspectives pour le crédit et, plus généralement, les obligations ?

Nous affichons actuellement un positionnement neutre vis-à-vis du crédit, et nous ne privilégions plus les obligations à haut rendement européennes par rapport au segment investment grade. Comme évoqué ci-dessus, le crédit offre une prime de risque inférieure, par exemple, à celle des actions. Nous nous trouvons de plus à un stade du cycle économique mondial qui favorise davantage les actions que le crédit.

Nous conservons notre opinion négative à l'égard des emprunts d’Etat « core » affichant des valorisations onéreuses et une duration longue, en particulier dans un contexte de hausse des taux d’actualisation et de tapering/resserrement quantitatif. Les taux courts et les primes de terme incorporés dans les obligations souveraines paraissent trop faibles. Bien sûr, du point de vue de l’allocation d’actifs, les emprunts d’Etat jouent un rôle très limité au sein des portefeuilles. Une combinaison d’actions et de liquidités semble en effet plus intéressante que des actions et des obligations en termes de frontière efficiente ex-post.

Par conséquent, nos portefeuilles d’allocation d’actifs affichent une très faible duration (1,2 an pour notre stratégie Threadneedle Dynamic Real Return par exemple).


Synthèse

Les conditions économiques idéales des 12 à 18 derniers mois ont stimulé les prix de la plupart des actifs, les ratios de Sharpe et les rendements ajustés de la volatilité s'établissant dans bien des cas à leurs plus hauts de ces vingt dernières années, voire au-dessus. Cela dit, les risques n’ont pas disparu : les banques centrales resserrent leurs politiques monétaires après une décennie d’assouplissement. La politique reviendra sur le devant de la scène en début d’année prochaine en Europe et dans plusieurs marchés émergents, et nous investissons dans un monde où les frontières nationales pourraient se renforcer plutôt que s'estomper.

Cependant, nous devons surmonter ces incertitudes et tirer profit de primes de risque attrayantes en compensation de ces défis. C’est dans ce contexte que nous avons renforcé notre allocation aux actions tout au long de l'année 2017, nonobstant des valorisations élevées.  Parallèlement, nous continuons de gérer nos portefeuilles multi-actifs moyennant une très faible duration, l’immobilier commercial britannique, les matières premières et le crédit à duration courte constituant nos sources de diversification privilégiées.

www.columbiathreadneedle.com

 

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