Le point de vue de Fidel Martin, Président d’Exoé.
La Bourse oscille
aujourd’hui sur un fil, entre espoirs suscités par la perspective d’une baisse
des taux et inquiétudes légitimes quant à la santé de l’économie réelle. À
l’heure où de nombreux investisseurs scrutent les décisions des banques
centrales, il est urgent de rappeler que ces signaux monétaires sont souvent à
double tranchant.
Pourquoi une baisse des
taux ne rime pas forcément avec boum boursier
Quand les banques
centrales abaissent leurs taux directeurs, le raisonnement « traditionnel » est
le suivant : l’argent coûte moins cher, le crédit redevient abordable, les
entreprises investissent, et l’économie repart, ce qui profite aux actions.
Mais cette mécanique
présente deux limites majeures.
1. Anticipation d’un ralentissement
économique
Souvent, une baisse des
taux reflète déjà une détérioration de la croissance ou des perspectives de
profits, signe que le cycle économique est en phase d’essoufflement. Dans ce
contexte, la Bourse peut anticiper le recul des bénéfices futurs et pénaliser
les actions, plutôt que les encourager.
2. Effet sur le marché obligataire et la
prime de risque
Les taux plus faibles
rendent les obligations moins attractives, ce qui pousse une partie des
investisseurs vers les actions. Mais ce mouvement peut aussi générer une
volatilité accrue et revêtir un caractère spéculatif, sans fondations solides
en matière de croissance réelle.
Une position latérale
pour la Bourse… et un pari risqué
Actuellement, les
marchés semblent en “position latérale” : ni envolée euphorique, ni repli
brutal, mais une sorte d’attente suspendue. Autant d’incertitudes qui pèsent
sur les décisions des investisseurs, surtout dans un environnement
macroéconomique fragile.
La tentation est grande
d’y voir l’amorce d’un regain de confiance, mais c’est précisément dans ces
phases, souvent trop lentes pour rassurer, trop hâtives pour profiter, que le
risque de désillusion est le plus élevé.
Pour les investisseurs
et pour la France, un appel à la responsabilité
À l’aube de ce possible
nouveau cycle, il ne s’agit pas simplement d’espérer « un retour des liquidités
», mais de construire une stratégie d’investissement robuste, fondée sur la
qualité des entreprises, leur résilience, leur capacité à créer de la valeur,
même dans un contexte de taux bas.
Pour l’économie
française, c’est un moment clé : les entreprises doivent capter ce reflux
monétaire pour innover, investir, produire. Les investisseurs, eux, doivent
revenir à une logique de long terme, moins de spéculation, plus de performance
durable.
Si la Bourse peut offrir des opportunités lorsque les conditions monétaires sont favorables, elle ne doit pas devenir un miroir déformant de l’économie.


