L’analyse de Philippe
Crevel, Directeur du Cercle de l’Épargne.
Pas de repos estival
pour l’assurance vie
L’assurance vie n’a pas
faibli durant l’été. La collecte nette du mois d’août s’est, en effet, élevée à
3,7 milliards d’euros, soit presque autant que celle du mois de juillet (4,1
milliards d’euros). Elle est six fois supérieure au résultat d’août 2024 (618
millions d’euros) et quatre fois supérieure à la moyenne de ces dix dernières
années (930 millions d’euros).
Depuis 1997, au mois
d’août, l’assurance vie a connu quatre décollectes :
- deux durant la
période de la crise des dettes souveraines (2011 : −337 millions d’euros et
2012 :
−967 millions d’euros) et
- deux durant la
période des rendements faibles des fonds euros (2022 : −795 millions d’euros
et
2023 : −1,776 milliard d’euros).
Cette collecte nette
est portée tant par les unités de compte que par les fonds euros, ce qui
constitue une rupture par rapport aux années 2020/2024 (+1,5 milliard d’euros
pour les fonds euros et 2,2 milliards d’euros pour les unités de compte). Le
mois d’août est le septième mois consécutif de collecte nette pour les fonds
euros.
La compétitivité
retrouvée de l’assurance vie
Le retour en grâce des
fonds euros s’explique par la progression de leur rendement, 2,6% en moyenne en
2024, sachant que les assureurs proposent fréquemment des taux promotionnels
pouvant atteindre 4%. Par ailleurs, les fonds euros bénéficient de la baisse de
la rémunération des livrets réglementés (Livret A, LDDS) et des dépôts à terme.
Le taux du Livret A est passé, de janvier à août 2025, de 3 à 1,7%, et le taux
des dépôts à terme à un an est passé sur la même période de 3 à environ 2%,
sachant que ce type de produit est soumis au prélèvement forfaitaire unique de
30%. Labonne tenue des marchés financiers, malgré les frasques de Donald Trump,
incite les ménages à investir une partie de leur épargne en unités de compte.
Depuis le début de
l’année, la collecte nette atteint +35,3 milliards d’euros, supérieure de +17,1
milliards d’euros à celle de 2024 sur la même période. Cette collecte nette
positive s’élève à 5,7 milliards d’euros pour les fonds euros et 29,6 milliards
d’euros pour les unités de compte.
Dans ce contexte
porteur, l’assurance vie conforte sa place de premier placement des ménages
avec un encours qui s’élève fin août à 2 068 milliards d’euros, en hausse de
+4,7% sur un an.
Des cotisations brutes
à haut niveau, des prestations en recul
En août 2025, les
cotisations en assurance vie ont atteint 12,1 milliards d’euros, en progression
de
+26% par rapport à août 2024. Comme le souligne France Assureurs, le niveau
des cotisations n’a jamais été aussi élevé sur un mois d’août. Cette forte
hausse concerne à la fois les supports en euros (+26%) et ceux en unités de
compte (UC, +25%). Ce résultat témoigne du maintien d’un fort taux d’épargne
des ménages. En effet, depuis le début de l’année, les cotisations ont atteint
128,3 milliards d’euros, en hausse de près de 10%.
Au-delà du flux
d’épargne, les ménages réaffectent, par ailleurs, une partie de leurs
liquidités sur l’assurance vie, notamment celles en provenance des dépôts à
terme.
Les ménages sortent
moins d’argent de l’assurance vie qu’auparavant. Les prestations ne se sont
élevées qu’à 8,4 milliards d’euros, en baisse de 7% par rapport au mois d’août
2024. Les sorties sont en net recul pour les fonds euros, confirmant la
compétitivité retrouvée de ce type de support.
Depuis le début de
l’année, les prestations sont en recul de −7%, s’établissant à 93 milliards
d’euros. Cette baisse concerne à la fois les supports en euros (−6 milliards
d’euros) et les supports en UC
(−1,4 milliard d’euros).
L’assurance vie : le
placement de l’année face à la hausse de la fiscalité
L’assurance vie est
indéniablement le placement de l’année avec des résultats remarquables. Mais,
le succès de l’assurance vie attire les convoitises. Le Premier ministre, à la
recherche de recettes fiscales, étudie la possibilité d’alourdir la fiscalité
de l’épargne en réhaussant notamment les prélèvements sociaux ou le prélèvement
forfaitaire unique. L’assurance vie serait a priori concernée. Or, ce
placement, le premier en volume, est largement diffusé au sein de la
population. Près de la moitié des ménages disposent d’au moins un contrat
d’assurance vie. Il est le pilier de l’épargne des classes moyennes.
En taxant l’épargne, le Premier ministre espère une reprise de la consommation ; or, celle-ci n’obéit pas à des stimuli fiscaux : elle est avant tout fonction de la confiance. Une augmentation des prélèvements sur l’épargne a souvent engendré le résultat inverse de celui recherché. En effet, pour compenser la baisse de rendement, les ménages sont tentés d’épargner plus (effet Modigliani).


